Paludisme

ParChelsea Marie, PhD, University of Virginia;
William A. Petri, Jr, MD, PhD, University of Virginia School of Medicine
Vérifié/Révisé déc. 2022
Voir l’éducation des patients

Le paludisme est une infection à Plasmodium spp. La symptomatologie comprend une fièvre (qui peut être périodique), des frissons, des sueurs, une diarrhée, des douleurs abdominales, une détresse respiratoire, une confusion, des convulsions, une anémie hémolytique, une splénomégalie et des anomalies rénales. Le diagnostic repose sur l'identification du Plasmodium sur un frottis de sang périphérique et par un test diagnostique rapide. Le traitement et la prophylaxie dépendent des Plasmodium spp, de la sensibilité aux médicaments et de l'état clinique du patient. Les protocoles de traitement de la maladie aiguë comprennent l'association thérapeutique à base d'artémisinine, le protocole à action la plus rapide, l'association fixe d'atovaquone et de proguanil et, plus rarement, la chloroquine, la quinine ou la méfloquine. Les patients infestés par P. vivax et P. ovale sont traités également par la primaquine ou une dose unique de tafénoquine pour éviter les rechutes. La prophylaxie repose habituellement sur l'association fixe d'atovaquone plus proguanil ou de doxycycline; la chloroquine est utilisée dans les zones où la résistance à la chloroquine est absente. Le traitement terminal par la primaquine ou la tafénoquine est administré aux patients susceptibles d'avoir été exposés à P. vivax ou à P. ovale.

Le paludisme est une infection à Plasmodium spp. Environ la moitié de la population mondiale est exposée au paludisme. Le paludisme est endémique en Afrique, en Inde et dans autres régions du Sud et Sud-Est asiatique, en Corée du Nord et du Sud, au Mexique, en Amérique centrale, en Haïti, en République dominicaine, et dans l'Amérique du Sud (régions du Nord de l'Argentine), le Moyen-Orient (dont Turquie, Syrie, Iran et Iraq), et l'Asie centrale. Le Centers for Disease Control and Prevention (CDC) fournit des informations sur des pays où le paludisme est transmis (voir CDC: Yellow Fever and Malaria Information, by Country), les types de paludisme, les profils de résistance et la prophylaxie recommandée (voir CDC: Malaria).

En 2020, il y a eu environ 241 millions de cas de paludisme, dont 95% en Afrique (voir 2021 World Malaria Report). On estime que 627 000 personnes sont mortes du paludisme en 2020, principalement des enfants de < 5 ans. Depuis 2000, les décès dus au paludisme ont diminué d'environ 30% grâce aux efforts de la RBM (Roll Back Malaria) Partnership to End Malaria, qui compte > 500 partenaires (dont des pays d'endémie et diverses organisations et institutions). Malgré des décennies de déclin, le nombre de décès a augmenté en 2020 du fait des perturbations dues à la pandémie de COVID-19.

Le paludisme a été endémique aux États-Unis. Actuellement, environ 1500 cas se produisent aux États-Unis chaque année. Presque toutes les infections ont été contractées à l'étranger mais un petit nombre d'entre elles est dû à une transfusion de sang ou, rarement, à une transmission par l'intermédiaire de moustiques locaux qui se nourrissent sur des immigrants infestés ou les voyageurs de retour.

Physiopathologie du paludisme

Les espèces de Plasmodium qui infectent l'homme sont

  • P. falciparum

  • P. vivax

  • P. ovale

  • P. malariae

  • P. knowlesi

L'infection simultanée par plus d'une espèce de Plasmodium est peu fréquente mais peut se produire.

P. knowlesi est un agent pathogène en Asie du Sud-Est, en particulier en Malaisie. Les macaques sont les hôtes principaux. P. knowlesi est habituellement contractée par les personnes vivant ou travaillant à proximité ou dans les forêts.

Les éléments de base du cycle de vie sont les mêmes pour tous les Plasmodium spp. La transmission débute quand un moustique Anopheles femelle pique un sujet impaludé et ingère du sang contenant des gamétocytes.

Pendant les 1 à 2 semaines suivantes, les gamétocytes subissent une multiplication sexuée à l'intérieur du moustique et y produisent des sporozoïtes infestantes. Quand l'anophèle pique une nouvelle personne, elle transmet les sporozoïtes, qui atteignent rapidement le foie et pénètrent dans les hépatocytes.

Les parasites se transforment en schizontes tissulaires au sein des hépatocytes. Chaque schizonte produit 10 000 à 30 000 mérozoïtes, qui sont libérés dans la circulation sanguine 1 à 3 semaines plus tard, lors de la rupture de l'hépatocyte. Chaque mérozoïte peut envahir un globule rouge et s'y transformer en trophozoïte.

Les trophozoïtes grandissent, et la plupart deviennent des schizontes érythrocytaires; les schizontes produisent à leur tour des mérozoïtes, ce qui déclenche 48 à 72 heures plus tard l'éclatement du globule rouge et sont libérés dans la circulation. Ces mérozoïtes envahissent ensuite rapidement de nouveaux globules rouges, répétant le cycle. Certains trophozoïtes se transforment en gamétocytes, qui sont ingérés par un moustique du genre Anopheles. Ils s'unissent sexuellement dans l'intestin des moustiques, se transforment en oocystes et libèrent des sporozoïtes infestantes, qui migrent vers les glandes salivaires.

Avec P. vivax et P. ovale (mais ni avec P. falciparum ni avec P. malariae), les schizontes tissulaires peuvent persister en tant qu'hypnozoïtes dans le foie pendant des années. Une rechute de P. ovale a eu lieu 6 ans après un épisode de paludisme symptomatique, et une infection a été transmise par transfusion de sang d'une personne qui a été exposée 7 ans avant le don de sang. Ces formes dormantes servent de "bombes à retardement", provoquant à chaque libération différée des parasites des rechutes et compliquent la chimiothérapie, car elles ne sont pas détruites par la plupart des médicaments antipaludéens, qui agissent habituellement sur les parasites du sang.

La phase pré-érythrocytaire (hépatique) du cycle de vie du paludisme est court-circuitée quand le parasite est transmis par une transfusion sanguine, par le partage de seringues contaminées ou de façon congénitale. Ces modes de transmission ne sont donc pas responsables de maladie latente et de récidives tardives.

La rupture des globules rouges pendant la libération des mérozoïtes est associée à des symptômes cliniques. Dans les cas sévères, l'hémolyse entraîne une anémie et un ictère, aggravés par la phagocytose des globules rouges infectés dans la rate. L'anémie peut être sévère dans l'infestation par P. falciparum ou l'infestation chronique à P. vivax mais est modérée dans l'infestation par P. malariae.

Paludisme à falciparum

Contrairement à d'autres formes de paludisme, P. falciparum entraîne une obstruction microvasculaire, car les globules rouges infestés adhèrent aux cellules endothéliales vasculaires. Une ischémie peut se développer avec, pour conséquence, une hypoxie tissulaire, en particulier dans le cerveau, les reins, les poumons et le tube digestif. L'hypoglycémie et l'acidose lactique peuvent constituer d'autres complications potentielles.

Résistance à l'infestation

Beaucoup d'Africains de l'Ouest ont une résistance complète à P. vivax, car ils ne possèdent pas l'antigène du groupe Duffy impliqué dans la pénétration des globules rouges par P. vivax; de nombreux Afro-Américains présentent également une telle résistance. Le développement du Plasmodium dans les globules rouges est également retardé chez le patient qui a une hémoglobinose S ou C, une thalassémie, un déficit en G6PD ou une elliptocytose.

Des antécédents de paludisme procurent une immunité partielle. Lorsque les résidents des zones hyperendémiques les quittent, leur immunité acquise diminue au fil du temps (des mois ou des années) et ils peuvent développer un paludisme symptomatique s'ils se réinfestent en rentrant chez eux.

Symptomatologie du paludisme

La période d'incubation est généralement

  • 12 à 17 jours pour P. vivax

  • 9 à 14 jours pour P. falciparum

  • 16 à 18 jours ou plus pour P. ovale

  • Environ 1 mois (18 à 40 jours) ou plus (années) dans le cas de P. malariae

Cependant, certaines souches de P. vivax dans les pays à climat tempéré peuvent ne pas provoquer de maladie pendant une période allant de plusieurs mois à > 1 an après l'infestation.

Les manifestations fréquentes à toutes les formes de paludisme comprennent

  • Fièvre et frissons, la crise de paludisme

  • Anémie

  • Ictère

  • Splénomégalie

  • Hépatomégalie

Le paroxysme du paludisme est dû à l'hémolyse des globules rouges infectés, aux mérozoïtes libérés et à d'autres antigènes du paludisme et à la réponse inflammatoire qu'ils provoquent. Un accès classique de paludisme débute par une sensation de malaise, des frissons et une fièvre s'élevant à 39 à 41° C, un pouls rapide et faible, une polyurie, des céphalées, une myalgie et des nausées. Après 2 à 6 heures, la fièvre chute et on observe des sudations abondantes pendant 2 à 3 heures, suivies d'une fatigue extrême. La fièvre est souvent irrégulière au début de l'infection. Dans l'infection établie, l'accès typique de paludisme se produit habituellement toutes les 2 à 3 jours selon l'espèce.

La splénomégalie devient habituellement palpable à la fin de la 1ère semaine après l'apparition des symptômes cliniques, mais peut ne pas se manifester avec P. falciparum. La rate augmentée de volume est souple et risque une rupture traumatique. La splénomégalie peut diminuer avec les accès récidivants de paludisme, au fur et à mesure que l'immunité fonctionnelle se développe. Après de nombreuses crises, la rate peut devenir fibreuse et ferme et, chez certains patients, hypertrophiée (splénomégalie tropicale). L'hépatomégalie accompagne habituellement une splénomégalie.

Manifestations de P. falciparum

P. falciparum provoque une maladie souvent sévère du fait de ses effets microvasculaires. C'est la seule espèce susceptible d'induire une maladie fatale si elle n'est pas traitée; les patients non immunisés peuvent mourir en quelques jours après les premiers symptômes. Les pics de température et les symptômes qui les accompagnent surviennent généralement de façon irrégulière, mais ils peuvent devenir synchrones, se produisant selon un modèle de tierce (pics de température à des intervalles de 48 heures), particulièrement chez les résidents des régions endémiques partiellement immunisées.

Les patients présentant un paludisme cérébral peuvent développer des symptômes allant de l'irritabilité à une attaque cérébrale et au coma. Les syndromes de détresse respiratoire aiguë (ARDS [acute respiratory distress syndrome]), une diarrhée, un ictère, une douleur épigastrique, des hémorragies rétiniennes, un paludisme algide (un syndrome similaire au choc) et une thrombopénie sévère peuvent également se produire.

L'insuffisance rénale peut être le résultat d'une déplétion volémique, d'une obstruction vasculaire par des globules rouges parasités ou par des dépôts de complexes immuns. L'hémoglobinémie et l'hémoglobinurie résultant de l'hémolyse intravasculaire peuvent évoluer en fièvre bilieuse hémoglobinurique (nommée ainsi à cause de la couleur foncée de l'urine), soit spontanément, soit après un traitement par la quinine.

L'hypoglycémie est fréquente et peut être aggravée par le traitement de la quinine et l'hyperinsulinémie qu'elle entraîne.

L'atteinte placentaire peut entraîner un faible poids à la naissance, une fausse couche spontanée, une mort fœtale tardive ou une infection congénitale.

Manifestations de P. vivax, P. ovale, P. malariae et P. knowlesi

P. vivax, P. ovale, et P. malariae ne compromettent pas, habituellement, les organes vitaux. La mortalité est rare et est principalement due à une rupture splénique ou à une hyperparasitémie non contrôlée chez le patient splénectomisé.

L'évolution clinique avec P. ovale est semblable à celle de P. vivax. Dans les infections établies, les pics de température surviennent à des intervalles de 48, fièvre tierce.

Les infections par P. malariae peuvent ne pas entraîner de symptômes aigus, mais une parasitémie de faible niveau peut persister pendant des décennies et induire une néphrite à complexes immuns ou une néphrose ou une splénomégalie tropicale; lorsqu'elle est symptomatique, la fièvre peut survenir à des intervalles de 72 heures, fièvre quarte.

P. knowlesi est associé au spectre complet du paludisme. Contrairement à P. falciparum, l'infection est plus fréquente chez les hommes de plus de 15 ans vivant à proximité ou travaillant dans des zones boisées. Il existe généralement des pics de température quotidiens. La gravité augmente avec l'âge du patient. Le cycle court de réplication asexuée de 24 heures peut induire des taux élevés de parasitémie et, en l'absence de traitement, la mort. La thrombopénie est fréquente, mais elle n'est généralement pas associée à une hémorragie.

Manifestations chez des patients qui reçoivent une chimioprophylaxie

En cas de chimioprophylaxie (voir tableau Médicaments utilisés pour prévenir le paludisme) le paludisme peut être atypique. La période d'incubation peut se prolonger plusieurs semaines ou mois après l'interruption du médicament. Les personnes infestées peuvent présenter des céphalées, des lombalgies et une fièvre irrégulière, mais les parasites peuvent être initialement difficiles à trouver dans les prélèvements de sang.

Diagnostic du paludisme

  • L'examen au microscope optique de prélèvement de sang (frottis mince et goutte épaisse)

  • Des tests diagnostiques rapides détectent les antigènes ou les enzymes de Plasmodium dans le sang

La fièvre et les frissons chez un immigrant ou un voyageur revenant d'une région d'endémie doivent amener à évoquer rapidement un paludisme. Les symptômes apparaissent généralement dans les 6 premiers mois après l'infection, mais leur apparition peut prendre jusqu'à 2 ans ou, plus rarement, plus longtemps.

Le paludisme peut être diagnostiqué par la découverte de parasites dans les examens microscopiques de frottis sanguins en goutte épaisse ou en étalement mince. Les espèces infectantes (qui déterminent le traitement et le pronostic) sont identifiées par des caractéristiques sur les frottis (voir tableau Caractéristiques diagnostiques de Plasmodium spp dans les frottis sanguins). Si le frottis sanguin initial est négatif, des frottis supplémentaires doivent être répétés à des intervalles de 12 à 24 heures jusqu'à ce que 3 frottis soient négatifs.

Les frottis sanguins minces colorés par la coloration de Wright-Giemsa permettent d'évaluer la morphologie du parasite dans les globules rouges, souvent la spéciation et la détermination du pourcentage de parasitémie (densité parasitaire), évaluée par grossissement en immersion dans l'huile des parties du frottis où les globules rouges sont plus ou moins touchant, qui doit montrer environ 400 globules rouges par champ. Les gouttes épaisses sont plus sensibles mais plus difficiles à préparer et à interpréter, les globules rouges étant lysées avant la coloration. La sensibilité et la précision des résultats dépendent de l'expérience de l'examinateur.

Les tests diagnostiques rapides du paludisme disponibles dans le commerce sont basés sur la présence de certains antigènes de Plasmodium ou de certaines activités enzymatiques. Les dosages peuvent impliquer la détection de la protéine riche en histidine 2 (HRP-2) associé aux parasites du paludisme (en particulier P. falciparum) et la détection de la lactate déshydrogénase associée au plasmodium (pLDH). Les tests rapides sont généralement comparables en sensibilité à la microscopie pour détecter de faibles taux de parasitémie mais ils ne différencient pas l'infection unique d'une infection concomitante par plus d'un Plasmodium spp ou ne permettent pas la spéciation sauf de P. falciparum.

La microscopie optique et les tests diagnostiques rapides sont complémentaires et doivent être effectués lorsqu'ils sont disponibles. Ils ont une sensibilité similaire. Les résultats négatifs même dans les deux cas n'excluent pas le paludisme chez un patient ayant une faible parasitémie.

Il est possible d'avoir recours à la Polymerase Chain Reaction (PCR) et à des sondes ADN spécifiques mais elles ne sont pas largement disponibles au lit du malade. Ils peuvent permettre d'identifier l'infection à Plasmodium spp après le diagnostic du paludisme. Les tests sérologiques peuvent refléter l'état antérieur à l'exposition et ne sont donc pas indiqués pour diagnostiquer un paludisme aigu.

Tableau

Gravité du paludisme

Le paludisme grave est défini par la présence de l'un des signes cliniques et biologiques suivants. Le paludisme grave est en général dû à P. falciparum.

Critères cliniques du paludisme grave:

  • Syndrome de détresse respiratoire aiguë/œdème pulmonaire

  • Saignements

  • Coma ou troubles de la conscience

  • Ictère

  • Convulsions (récurrentes)

  • Le choc

Critères de laboratoire pour le paludisme grave:

Traitement du paludisme

  • Médicaments antipaludéens

Les médicaments antipaludéens sont choisis en fonction des éléments suivants:

  • Gravité de la maladie (critères cliniques et de laboratoire)

  • Plasmodium spp infectant

  • Profils de résistance connus des souches dans la zone d'acquisition

  • Efficacité et effets indésirables des médicaments disponibles

La polythérapie à base d'artémisinine, telle que l'artéméther/luméfantrine, est le traitement le plus rapidement actif et, dans de nombreuses situations, c'est le traitement de choix. La résistance aux artémisinines a été rapportée mais n'est pas encore fréquente.

Le paludisme grave nécessite un traitement urgent, de préférence par l'artésunate intraveineux, qui est le seul médicament disponible aux États-Unis pour le traitement parentéral du paludisme grave (ou pour les patients qui ne peuvent pas prendre de médicaments par voie orale). Si l'artésunate n'est pas immédiatement disponible, commencer un traitement oral provisoire par l'artéméther-luméfantrine, l'atovaquone/proguanil, le sulfate de quinine (plus la doxycycline ou la clindamycine par voie intraveineuse), ou si rien d'autre n'est disponible, la méfloquine. Chez les patients qui vomissent, un antiémétique peut être utile. Ceux qui ne peuvent pas avaler (p. ex., en raison d'un syndrome confusionnel) peuvent recevoir des comprimés écrasés d'artéméther/luméfantrine ou d'atovaquone/proguanil par une sonde nasogastrique.

En raison du risque d'évolution vers une maladie grave en cas d'infection par P. falciparum, les patients doivent être hospitalisés pour surveiller la réponse clinique et pour vérifier la densité parasitaire toutes les 12 à 24 heures jusqu'à ce que la présentation clinique s'améliore et qu'une diminution de la densité parasitaire apparaisse (voir CDC: Treatment of Malaria: Guidelines for Clinicians [United States]).

En raison du risque d'hémolyse retardée, une complication fréquente du paludisme hyperparasitémique traité par l'artésunate IV (1), les taux d'hémoglobine doivent être surveillés pendant 4 semaines après le traitement.

Pièges à éviter

  • Le temps est essentiel pour traiter le paludisme grave. Commencer le traitement par l'artésunate IV dès que possible. Commencer un traitement oral provisoire avec d'autres médicaments si l'artésunate IV n'est pas immédiatement disponible.

Dans certaines zones d'endémie, une proportion significative des médicaments antipaludéens disponibles localement sont contrefaits. Ainsi, certains recommandent aux voyageurs qui se rendent dans des régions à haut risque de prendre un cycle complet d'un protocole de traitement approprié si un paludisme médicalement constaté est contracté en dépit de la prophylaxie; cette stratégie permet également d'éviter d'épuiser les ressources en médicaments limitées dans le pays de destination.

Le paludisme est particulièrement dangereux chez l'enfant de < 5 ans (la mortalité est plus élevée chez l'enfant de < 2 ans), chez la femme enceinte, chez la personne indemne de toute infection antérieure et voyageant en zone d'endémie.

En cas de suspicion de P. falciparum, le traitement doit débuter immédiatement, même si le frottis et le test diagnostique rapide initial sont négatifs. La résistance de P. falciparum aux antipaludéens est à présent largement répandue et P. vivax résistant à la chloroquine est fréquent en Papouasie-Nouvelle-Guinée, en Indonésie et émerge dans d'autres régions (p. ex., Asie du Sud-Est, Asie du Sud, Moyen-Orient, Afrique de l'Est, et les Amériques) (2).

Pour les médicaments et les doses recommandés pour le traitement et la prévention du paludisme, voir les tableaux Traitement du paludisme et Médicaments utilisés pour prévenir le paludisme. Les effets indésirables fréquents et les contre-indications sont listés dans le tableau Effets indésirables et contre-indications des médicaments antipaludéens. Voir aussi le CDC web site (Malaria Diagnosis and Treatment in the United States), ou pour une consultation d'urgence sur la prise en charge, appeler la CDC Malaria Hotline aux numéros listés ci-dessus.

En cas de maladie fébrile pendant un voyage dans une région d'endémie, un bilan médical immédiat est indispensable. Lorsqu'une évaluation rapide n'est pas possible (p. ex., parce que la région est très isolée), l'auto-médication par l'artéméther/luméfantrine ou atovaquone/proguanil peut être envisagée en attendant l'évaluation. En cas de fièvre chez des voyageurs de retour d'une zone d'endémie et si aucun autre diagnostic n'est porté, un traitement empirique contre le paludisme non compliqué doit être envisagé, même lorsque le frottis pour le paludisme et/ou les tests diagnostiques rapides sont négatifs.

Tableau
Tableau

Références pour le traitement

  1. 1. Aldámiz-Echevarría LT, López-Polín A, Norman FF, et al: Delayed haemolysis secondary to treatment of severe malaria with intravenous artesunate: Report on the experience of a referral centre for tropical infections in Spain. Travel Med Infect Dis 15:52-56, 2017. doi:10.1016/j.tmaid.2016.10.013

  2. 2. Ferreira MU, Nobrega de Sousa T, Rangel GW, et al: Monitoring Plasmodium vivax resistance to antimalarials: persisting challenges and future directions. Int J Parasitol Drug-Drug Resist 15:9-24, 2021. doi:10.1016/j.ijpddr.2020.12.001

Prévention des rechutes de la malaria à P. vivax ou P. ovale

Les hypnozoïtes doivent être éliminés du foie avec de la primaquine ou la tafénoquine pour éviter les rechutes de P. vivax ou de P. ovale. La primaquine ou la tafénoquine doit être administrée simultanément à la chloroquine ou dans un second temps. Certaines souches de P. vivax sont moins sensibles, et des récidives peuvent se produire, nécessitant la répétition du traitement. La primaquine n'est pas nécessaire contre P. falciparum ou P. malariae car ces espèces n'ont pas de phase hépatique persistante. Si l'exposition à P. vivax ou à P. ovale est intense ou prolongée ou si le voyageur est asplénique, un traitement prophylactique de 14 jours commencé au retour du voyage par la primaquine ou une dose unique de tafénoquine réduit le risque de récidive. Le principal effet indésirable est l'hémolyse chez le patient présentant un déficit en glucose-6-phosphate déshydrogénase (G6PD). Les taux de G6PD doivent être déterminés avant l'administration de primaquine ou de la tafénoquine.

La primaquine est contre-indiquée pendant la grossesse et l'allaitement, sauf s'il a été démontré que l'enfant n'avait pas de déficit en G6PD. Chez les femmes enceintes, la chimioprophylaxie par la chloroquine hebdomadaire peut être administrée pour le reste de la grossesse et après l'accouchement, les femmes peuvent recevoir de la primaquine, à condition qu'elles n'aient pas de déficit en G6PD.

Prévention du paludisme

Les voyageurs en régions d'endémie doivent recevoir une chimioprophylaxie (voir tableau Médicaments utilisés pour prévenir le paludisme). Des informations sur les pays où le paludisme est endémique sont disponibles auprès des Centers for Disease Control and Prevention (CDC) (voir CDC: Yellow Fever and Malaria Information, by Country et CDC: Malaria); l'information comprend les types de paludisme, les profils de résistance, la répartition géographique et la prophylaxie recommandée.

Tableau

Le paludisme pendant la grossesse est une menace sérieuse pour la mère et le fœtus. La chloroquine peut être utilisée pendant la grossesse dans les zones où Plasmodium spp est encore sensible mais il n'existe pas d'autre mesure préventive efficace, les femmes enceintes doivent éviter donc de voyager dans les zones de paludisme résistant à la chloroquine chaque fois que possible. Le traitement du paludisme pendant la grossesse dépend des espèces de Plasmodium infectants et des profils de résistance connus dans la zone de contage (voir CDC: Treatment of Malaria: Guidelines For Clinicians (United States): Alternatives for Pregnant Women).

La sécurité de la méfloquine pendant la grossesse n'a pas été très étudiée, mais une expérience limitée évoque qu'elle peut être utilisée lorsque le bénéfice est jugé être plus important que le risque. La doxycycline, l'atovaquone/proguanil, la primaquine et la tafénoquine ne doivent pas être utilisées pendant la grossesse.

Les artémisinines ont une demi-vie courte et ne sont pas utiles en prophylaxie.

Les mesures prophylactiques contre les moustiques comprennent les mesures suivantes

  • Effectuer des pulvérisations d'insecticides résiduels à la perméthrine ou au pyrèthre (qui ont une action prolongée)

  • Placer des moustiquaires sur les portes et fenêtres

  • Utiliser une moustiquaire (de préférence imprégnée de perméthrine ou de pyrèthre) sur les lits

  • Traiter les vêtements et les équipements (p. ex., bottes, pantalons, chaussettes, tentes) avec des produits contenant de la perméthrine à 0,5%, qui restent protecteurs pendant plusieurs lavages (des vêtements prétraités sont disponibles et peuvent protéger plus longtemps)

  • Appliquer des répulsifs pour moustiques tels que le DEET (diéthyltoluamide) 25 à 35% sur la peau exposée

  • Porter des chemises à manches longues et des pantalons, en particulier entre le crépuscule et l'aube, quand les moustiques Anopheles sont actifs

Les sujets qui prévoient d'utiliser des répulsifs contenant du DEET doivent être informés de ce qui suit

  • Appliquer des répulsifs seulement sur la peau exposée selon les indications de l'étiquette et les utiliser avec parcimonie autour des oreilles (et ils ne doivent pas être appliqués ou pulvérisés sur les yeux ou la bouche).

  • Se laver les mains après l'application.

  • Ne pas laisser les enfants manipuler les répulsifs (les adultes doivent appliquer le répulsif sur leurs mains en premier, puis l'étaler doucement sur la peau de l'enfant).

  • Appliquer juste assez de répulsif pour couvrir la zone exposée.

  • Laver le répulsif au retour en intérieur.

  • Laver les vêtements avant de les porter à nouveau, sauf indication contraire de l'étiquette du produit.

La plupart des répulsifs peuvent être utilisés sur les nourrissons et les enfants de < 2 mois. L'Environmental Protection Agency ne recommande pas de précautions supplémentaires dans l'utilisation de répulsifs enregistrés sur les enfants ou les femmes enceintes ou qui allaitent.

Le 6 octobre 2021, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a recommandé l'utilisation généralisée du vaccin contre le paludisme RTS,S/AS01 (RTS,S) chez les enfants en Afrique subsaharienne et dans d'autres régions où le risque transmission du paludisme à P. falciparum est modéré à élevé. (Voir WHO recommends groundbreaking malaria vaccine for children at risk.)

Points clés

  • En 2020, on estimait que 241 millions de personnes souffraient du paludisme dans le monde et qu'environ 627 000 décès survenaient, principalement chez les enfants de < 5 ans en Afrique; depuis 2000, les décès dus au paludisme ont diminué d'environ 60%.

  • P. falciparum provoque une obstruction microvasculaire et une ischémie tissulaire, notamment dans le cerveau, les reins, les poumons, le tractus gastro-intestinal des nourrissons et des adultes non immunisés; les patients peuvent mourir en quelques jours après les premiers symptômes.

  • P. vivax, P. ovale, et P. malariae ne compromettent pas, habituellement, les organes vitaux; la mortalité est rare. Le spectre complet du paludisme est produit par P. knowlesi. Son court cycle de réplication asexuée peut entraîner une parasitémie élevée et une maladie grave, potentiellement mortelle si elle n'est pas traitée.

  • Les manifestations comprennent de la fièvre et des frissons récurrents, des céphalées, des myalgies et des nausées; l'anémie hémolytique et la splénomégalie sont fréquentes.

  • Diagnostiquer par examen microscopique optique du sang (frottis mince et goutte épaisse) et d'autres examens sanguins diagnostiques rapides.

  • Traiter par des médicaments antipaludéens en fonction des espèces (si connues) et les profils de résistance aux médicaments dans la zone dans laquelle l'infection a été contractée.

  • Le traitement à base d'artémisinine (p. ex., artéméther/luméfantrine, artésunate, autres composés de l'artémisinine) est le traitement le plus rapidement actif; l'atovaquone plus proguanil est une alternative en cas de paludisme non compliqué.

  • Utiliser la primaquine ou la tafénoquine dans les infections confirmées ou suspectées à P. vivax et P. ovale pour prévenir la rechute à moins que les patientes ne soient enceintes ou allaitantes ou présentent un déficit en G6PD ou dont le statut G6PD est inconnu.

  • Un paludisme grave nécessite un traitement urgent. En raison du risque d'évolution vers une maladie grave en cas d'infection à P. falciparum, les patients doivent être hospitalisés pour surveiller la réponse clinique.

  • Administrer de la chimioprophylaxie aux personnes voyageant vers les régions d'endémies, et leur apprendre à éviter les piqûres de moustique.

Plus d'information

La source d'information suivante en anglais peut être utile. S'il vous plaît, notez que LE MANUEL n'est pas responsable du contenu de cette ressource.

  1. Centers for Disease Control and Prevention (CDC): Resources for Health Professionals: Malaria

quizzes_lightbulb_red
TESTEZ VOS CONNAISSANCESTake a Quiz!
Téléchargez l’application Manuel MSD. ANDROID iOS
Téléchargez l’application Manuel MSD. ANDROID iOS
Téléchargez l’application Manuel MSD. ANDROID iOS