Revue générale des hémorragies gastro-intestinales

ParParswa Ansari, MD, Hofstra Northwell-Lenox Hill Hospital, New York
Vérifié/Révisé mai 2023
Voir l’éducation des patients

Une hémorragie gastro-intestinale peut se produire à un niveau quelconque du tube digestif, de la bouche jusqu'à l'anus et être visible ou occulte. Les manifestations dépendent de la localisation et du débit de l'hémorragie. (Voir aussi Varices et Lésions vasculaires digestives.)

L'hématémèse est un vomissement de sang rouge, qui correspond à une hémorragie de la partie supérieure de l'appareil digestif, habituellement due à un ulcère gastroduodénal, une lésion vasculaire ou une varice. Les vomissements "marc de café" sont des vomissements marron foncé, granuleux qui ressemblent au marc de café. Ils résultent de saignements gastro-intestinaux hauts situés qui ont ralenti ou ont cessé, avec conversion de l'hémoglobine rouge au brun de l'hématine par l'acide gastrique.

Les rectorragies sont l'évacuation de sang rouge par l'anus, provenant habituellement d'une hémorragie de la partie terminale du tube digestif, mais peuvent résulter également d'une hémorragie importante du tube digestif haut avec accélération du transit intestinal.

Un méléna correspond à l'extériorisation de selles noires par l'anus et témoigne généralement d'une hémorragie de la partie supérieure de l'appareil digestif, mais une hémorragie venant de l'intestin grêle ou du côlon droit peut également en être la cause. Environ 100 à 200 mL de sang dans le tube digestif haut est nécessaire pour provoquer un méléna, qui peut persister pendant plusieurs jours après l'arrêt de l'hémorragie. Des selles noires dans lesquelles la recherche de sang occulte est négative peuvent être dues à l'ingestion de fer, de bismuth ou de divers aliments et ne doivent pas être confondues avec un méléna.

Un saignement chronique occulte peut provenir de n'importe quelle localisation du tube digestif et est décelable par la réalisation d'un test chimique spécifique dans les selles.

Des hémorragies aiguës et graves peuvent également provenir de n'importe quelle localisation du tube digestif. Les patients peuvent présenter initialement des signes de choc. Les patients présentant une cardiopathie ischémique peuvent développer un angor ou un infarctus du myocarde en raison de l'hypoperfusion coronarienne.

Une hémorragie gastro-intestinale chez des patients qui ont une maladie hépatique sous-jacente peut déclencher une encéphalopathie portosystémique ou un syndrome hépatorénal (insuffisance rénale secondaire à une insuffisance hépatique).

Étiologie des hémorragies gastro-intestinales

De nombreuses causes existent (voir tableau Causes fréquentes de saignement gastro-intestinal), et sont classées en fonction de leur origine, tractus digestif haut (au-dessus de l'angle de Treitz), côlon et intestin grêle.

L'hémorragie, quelle qu'en soit la cause, est plus probable et potentiellement plus sévère, en cas d'atteinte hépatique chronique (p. ex., maladie hépatique alcoolique, hépatite chronique), ou de troubles héréditaires de la coagulation ou de prise de certains médicaments.

Les médicaments associés à une hémorragie gastro-intestinale comprennent les anticoagulants (p. ex., héparine, warfarine, dabigatran, apixaban, rivaroxaban, edoxaban), ceux touchant la fonction plaquettaire (p. ex., aspirine et AINS, clopidogrel, inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine) et ceux qui affectent les défenses de la muqueuse (p. ex., AINS).

Tableau

Évaluation des saignements gastro-intestinaux

Chez les patients gravement malades, la stabilisation avec protection des voies respiratoires, remplissage vasculaire IV, ou des transfusions est essentielle avant et pendant les investigations diagnostiques.

Anamnèse

L'anamnèse de la maladie actuelle doit essayer d'établir la quantité et la fréquence des saignements. Cependant, la quantité peut être difficile à évaluer car même de petites quantités de sang (5 à 10 mL) dans l'eau de la cuvette des toilettes peuvent donner une couleur rouge opaque, et parce que des quantités modestes de sang dans les vomissements peuvent sembler énormes à un patient anxieux. Cependant, on peut le plus souvent distinguer quelques traces de sang, de quelques cuillères à café de sang et de volumineux caillots.

Il faut interroger les patients qui présentent une hématémèse afin de savoir si le saignement était présent dès les premiers vomissements ou après un (ou plusieurs) vomissement alimentaire non sanglant. En outre, le médecin doit poser des questions spécifiques pour distinguer l'hématémèse d'une hémoptysie, car les patients peuvent confondre les deux symptômes.

Il faut interroger les patients qui présentent des rectorragies afin de savoir s’il s’agit de sang frais rouge pur; ou mélangé aux selles, à du pus ou du mucus; ou si les selles étaient simplement recouvertes de filets de sang ou s'il s'en trouvait sur le papier toilette. Il faut interroger ceux présentant une diarrhée sanglante, sur la notion de voyage ou toute autre situation d'exposition à un agent pathogène.

La revue des symptômes doit comprendre la recherche d'une gêne abdominale, d'une perte de poids, de saignements récents comme les ecchymoses, des résultats de coloscopies ou endoscopie antérieures et des symptômes d'anémie (p. ex., asthénie, fatigabilité, vertiges).

La recherche des antécédents médicaux doit comprendre celle de saignements gastro-intestinaux antérieurs (diagnostiqués ou non); de maladie intestinale inflammatoire chronique connue, de troubles de la crase sanguine, de maladies hépatiques; et de médicaments ou de drogues qui augmentent la probabilité de saignement ou de maladie chronique du foie (p. ex., l'alcool).

Examen clinique

L'examen général se concentre sur les constantes vitales et sur tout autre signe de choc ou d'hypovolémie (p. ex., tachycardie, tachypnée, pâleur, diaphorèse, oligurie, confusion) et les signes d'anémie (p. ex., pâleur, sueurs). Les patients qui présentent des saignements moins importants peuvent simplement présenter une tachycardie modérée (fréquence cardiaque > 100) ou aucun signe.

Des modifications orthostatiques du pouls (une modification > 10 battements/minute) ou de la pression artérielle (une baisse 10 mmHg) sont souvent observées après une perte aiguë de 2 unités de sang. Cependant, les mesures orthostatiques sont peu adaptées en cas d'hémorragie sévère car elles peuvent entraîner une syncope et sont peu sensibles et spécifiques pour mesurer la volémie en cas d'hémorragie modérée, en particulier chez le sujet âgé.

Les stigmates extérieurs des troubles hémorragiques (p. ex., pétéchies, ecchymoses) sont recherchés, ainsi que des signes de maladie chronique du foie (p. ex., angiomes stellaires, ascite, érythème palmaire) et d'hypertension portale (p. ex., splénomégalie, circulation veineuse collatérale abdominale).

Un toucher rectal est nécessaire pour définir la couleur des selles, et rechercher une masse anorectale. L'anuscopie est effectuée afin de diagnostiquer des hémorroïdes pathologiques ou une fissure anale. Les tests chimiques de recherche spécifique de sang occulte dans les selles peuvent terminer l'examen lorsque le sang n'est pas macroscopiquement présent.

Signes d'alarme

Plusieurs signes suggèrent une hypovolémie ou un choc hémorragique:

  • Syncope

  • Hypotension

  • Pâleur

  • Transpiration

  • Tachycardie

  • Oligurie

Interprétation des signes

L’anamnèse et l’examen clinique suggèrent une origine au saignement chez environ 50% des patients, néanmoins les signes sont rarement concluants pour le diagnostic et les examens complémentaires sont nécessaires pour confirmer le diagnostic.

Une gêne abdominale épigastrique soulagée par l'alimentation ou les antiacides évoque un ulcère gastroduodénal. Cependant, dans de nombreux cas d'hémorragie ulcéreuse, on ne retrouve pas d'antécédents douloureux.

Une perte de poids et une anorexie, avec ou sans anomalie des selles, suggèrent un cancer digestif.

Des antécédents de cirrhose ou d'hépatite chronique évoquent des varices œsophagiennes. Une dysphagie évoque un cancer ou une sténose de l'œsophage. Des vomissements ou des efforts de vomissements avant le début de l’hémorragie évoquent un syndrome de Mallory-Weiss, bien que, dans près de 50% des cas, ces prodromes soient absents.

Un antécédent d'hémorragie (p. ex., purpura, ecchymose, hématurie) peut évoquer une diathèse hémorragique (p. ex., hémophilie, insuffisance hépato-cellulaire).

Une diarrhée sanglante, fébrile et des douleurs abdominales suggèrent une colite ischémique, une maladie intestinale inflammatoire (p. ex., rectocolite ulcéro-hémorragique, maladie de Crohn) ou une colite infectieuse (p. ex., Shigella, Salmonella, Campylobacter, amibiase).

Des rectorragies évoquent une diverticulose colique ou des angiodysplasies. Du sang frais sur le papier toilette ou à la surface des selles formées suggère des hémorroïdes internes ou une fissure, alors que du sang mélangé aux selles indique une source plus proximale. La présence de sang occulte dans les selles peut être le premier signe d'un cancer du côlon ou d'un polype, en particulier chez le malade > 45 ans.

La présence de sang dans le nez ou coulant vers le bas du pharynx, évoque une épistaxis comme origine de l'hémorragie.

La présence d'angiomes stellaires, d'hépatosplénomégalie, d'ascite, suggère une hépatopathie chronique et donc de probables varices œsophagiennes. Des malformations artérioveineuses, en particulier des muqueuses, suggèrent une télangiectasie hémorragique héréditaire (syndrome de Rendu-Osler-Weber). Les télangiectasies de la matrice de l'ongle, de la peau et du tractus gastro-intestinal peuvent être le signe d'une sclérodermie ou d'une connectivite mixte.

Examens complémentaires

Plusieurs tests sont effectués pour confirmer le diagnostic suspecté:

  • Numération formule sanguine, profil de coagulation et souvent autres examens sanguins

  • La mise en place d'une sonde nasogastrique sauf pour les saignements minimes rectaux

  • Endoscopie digestive haute en cas de suspicion d'hémorragie gastro-intestinale du tractus digestif haut

  • Coloscopie pour les causes basses (non clairement provoquées par des hémorroïdes)

  • Parfois, angiographie pour saignement gastro-intestinal haut et bas

Une NFS doit être pratiquée en cas de perte de sang de gros volume ou occulte. Les patients qui présentent des saignements plus importants doivent également subir des examens de la coagulation (p. ex., numération plaquettaire, temps de prothrombine [temps de Quick (TQ)], temps partiel de thromboplastine [= TPP, TCK, TCA, TPP]) et des examens hépatiques (p. ex., bilirubine, phosphatase alcaline, albumine, aspartate aminotransférase [AST], alanine aminotransférase [ALT]). Un groupe, avec Rhésus et recherche d'agglutinines irrégulières, est effectué si un saignement est en cours. L'hémoglobine et l'hématocrite peuvent être répétés jusqu'à toutes les 6 heures en cas d'hémorragies sévères.

Une aspiration par sonde gastrique endonasale et un lavage gastrique par la sonde doivent être pratiqués chez tout malade suspecté d'hémorragie de la partie haute du tube digestif (p. ex., hématémèse, vomissements noirâtres, méléna, hémorragies rectales massives). Une présence de sang dans l’aspiration nasogastrique indique une hémorragie active de la partie supérieure du tube digestif, mais 10% environ des malades ayant une hémorragie des voies digestives supérieures n’ont pas de traces de sang dans l’aspiration gastrique. La présence de sang noir digéré indique une hémorragie lente ou arrêtée. S’il n’y a aucun signe de saignement, et que de la bile est ramenée, la sonde nasogastrique est retirée; sinon, elle est laissée en place pour contrôler le saignement qui peut être continu ou récurrent. Un aspirât non sanglant, non bilieux est considéré comme une aspiration non diagnostique.

Une endoscopie digestive haute (examen de l'œsophage, de l'estomac et du duodénum) doit être pratiquée en cas d'hémorragie de la partie supérieure de l'appareil digestif. L'endoscopie pouvant être thérapeutique autant que diagnostique, elle doit être pratiquée rapidement en cas d'hémorragie importante, mais peut être reportée de 24 heures si l'hémorragie s'arrête ou si elle est minime. Le transit baryté œso-gastro-duodénal n'a aucune indication dans l'hémorragie aiguë et le contraste utilisé peut obscurcir ultérieurement les tentatives d'angiographie.

Une sigmoïdoscopie flexible et une anuscopie rigide sont les seuls examens nécessaires à court terme devant des symptômes caractéristiques d'hémorragie hémorroïdaire. Tous les autres patients qui présentent une rectorragie doivent subir une coloscopie qui est effectuée après une préparation standard, sauf en cas d'hémorragies continues importantes. Chez ces patients, une préparation rapide (5 à 6 L de solution de polyéthylène glycol délivrée par sonde nasogastrique ou par la bouche en 3 à 4 heures) permet souvent une visualisation adéquate.

L'angiographie peut être utilisée pour localiser la source si elle ne peut pas être visualisée par coloscopie et si l'hémorragie en cours est suffisamment rapide (> 0,5 à 1 mL/minute). Certains angiographistes réalisent en premier une scintigraphie afin de focaliser l'examen, parce que l'angiographie est moins sensible que la scintigraphie. L'angiographie peut être utile pour le diagnostic d'hémorragie gastro-intestinale haute et basse et permet certaines manœuvres thérapeutiques (p. ex., embolisation, perfusion de vasoconstricteurs). Les lignes directrices de l'American Journal of Gastroenterology de 2023 sur la prise en charge des patients qui ont une hémorragie gastrointestinale basse aiguë (American Journal of Gastroenterology’s 2023 updated guidelines on management of patients with acute lower GI bleeding) suggèrent que l'angio-TDM soit le test diagnostique initial chez les patients qui présentent une hématochézie hémodynamiquement significative. La décision de pratiquer ou non à une endoscopie ou une angiographie comme test diagnostique ou thérapeutique initial doit être basée sur l'état clinique du patient et sur l'expertise et les infrastructures disponibles à l'hôpital de traitement.

Le diagnostic d'hémorragie occulte peut être difficile, car elle peut résulter d'hémorragies situées n'importe où dans le tube digestif. L'endoscopie est la méthode diagnostique de choix dans ce cas, les symptômes déterminent si la partie supérieure ou inférieure du tube digestif doit être examinée en premier. Le lavement baryté à double contraste et la sigmoïdoscopie peuvent être utilisés pour la partie inférieure du tube, lorsque la coloscopie n'est pas possible ou est refusée par le patient.

Si les résultats de l'endoscopie haute et de la coloscopie sont négatifs et que du sang occulte est toujours présent dans les selles, un TOGD avec opacification de tout l'intestin grêle, une endoscopie de l'intestin grêle (entéroscopie), une entérographie TDM, une endoscopie par capsule (qui utilise une petite caméra en forme de pilule qui est avalée), une scintigraphie aux globules rouges ou aux colloïdes marqués au technétium, et une angiographie doivent être envisagés. L'endoscopie par capsule est d'une valeur limitée chez un patient qui saigne activement.

Traitement des hémorragies gastro-intestinales

  • Une protection des voies respiratoires sûre si nécessaire

  • Réanimation par remplissage vasculaire IV

  • Transfusion sanguine si nécessaire

  • Parfois, médicaments

  • Dans certains cas, hémostase endoscopique ou angiographique

(Voir aussi the American College of Gastroenterology–Canadian Association of Gastroenterology’s 2022 Clinical Practice Guideline: Management of Anticoagulants and Antiplatelets During Acute Gastrointestinal Bleeding and the Periendoscopic Period, the American Journal of Gastroenterology's 2023 Management of Patients With Acute Lower Gastrointestinal Bleeding: An Updated ACG Guideline, the American Journal of Gastroenterology's 2021 ACG Clinical Guideline: Upper Gastrointestinal and Ulcer Bleeding, and the American Journal of Gastroenterology's 2015 ACG Clinical Guideline: Diagnosis and Management of Small Bowel Bleeding.)

L'hématémèse, les rectorragies ou le méléna doivent être considérées comme des urgences. L'admission en USI ou d'autres environnements contrôlés incluant une consultation par un chirurgien et un gastro-entérologue dans le même temps, est recommandée chez tout malade présentant une hémorragie digestive importante. Le traitement général vise à maintenir la protection des voies respiratoires et à la conservation d'une bonne hémodynamique vasculaire. L'hémostase et les traitements à entreprendre dépendent de la cause du saignement.

Voies respiratoires

Une cause majeure de morbidité et de mortalité en cas d'hémorragie active du haut appareil digestif est l'inhalation de sang et les complications respiratoires qui s'ensuivent. Pour éviter ces troubles, l'intubation endotrachéale doit être envisagée chez les patients dont le réflexe pharyngé est aboli ou chez les patients présentant des troubles de la conscience, en particulier s'ils ont besoin d'une endoscopie digestive haute.

Une restauration volémique et parfois transfusion de produits sanguins

L'accès intraveineux doit être obtenu immédiatement. Les cathéters courts, de gros calibre (p. ex., calibre 14 à 16) IV dans les veines antécubitales sont préférables à un cathéter veineux central, sauf si une grande (8,5 French) gaine est utilisée. Les liquides IV sont commencés immédiatement, comme chez tout patient présentant une hypovolémie ou un choc hémorragique (voir Réanimation volémique intraveineuse). On administre aux adultes sans comorbidités du sérum physiologique IV à la dose de 500 à 1000 mL, jusqu'à ce que les signes d'hypovolémie disparaissent, jusqu'à un maximum de 2 L (chez l'enfant 20 mL/kg, qui peuvent être répétés 1 fois).

Le patient nécessitant plus de réanimation doit recevoir une transfusion de culots globulaires. Les transfusions se poursuivent jusqu'à ce que la volémie soit restaurée, puis sont administrées au besoin pour remplacer les pertes sanguines. La transfusion chez les patients âgés ou chez les coronaropathes peut être arrêtée lorsque l'hémoglobine est stable à 8 à moins que le patient ne soit symptomatique. Le patient plus jeune ou celui qui présente une hémorragie chronique n'est généralement pas transfusé, sauf si l'hémoglobinee est < 7 ou en cas de symptômes, tels qu'une dyspnée ou une ischémie coronaire.

La numération plaquettaire doit être surveillée de près; une transfusion plaquettaire peut être nécessaire au cours des hémorragies sévères. Le patient qui prend des médicaments antiagrégants (p. ex., clopidogrel, aspirine) souffre d'un dysfonctionnement plaquettaire, entraînant souvent une hémorragie accrue. Une transfusion de plaquettes peut être considérée lorsque le patient qui prend ces médicaments a une hémorragie continue grave, bien que les médicaments circulants résiduels (en particulier le clopidogrel) puissent inactiver les plaquettes transfusées. Si les patients prennent un antiplaquettaire ou un anticoagulant pour une indication cardiovasculaire récente, un cardiologue doit être consulté si possible, avant d'arrêter le médicament, d'inhiber le traitement ou de pratiquer une transfusion de plaquettes.

Si une transfusion sanguine importante est nécessaire, du plasma frais congelé et des plaquettes doivent également être transfusés avec des culots de globules rouges conformément aux protocoles de transfusion massifs de l'établissement. Si le patient présente une coagulopathie, une correction par du plasma frais congelé ou du concentré de complexe prothrombinique doit être envisagée.

La décision de bloquer le traitement anticoagulant ou antiplaquettaire d'un patient doit être prise en fonction du risque hémorragique évalué par rapport au risque thrombotique du patient. Les lignes directrices actuellement publiées ne sont pas en mesure de fournir des lignes directrices dans le cas du traitement par du plasma frais congelé, par des concentrés de complexe prothrombinique ou d'autres agents d'inversion en raison de la rareté des preuves dans la littérature (voir aussi the American College of Gastroenterology–Canadian Association of Gastroenterology’s 2022 Clinical Practice Guideline: Management of Anticoagulants and Antiplatelets During Acute Gastrointestinal Bleeding and the Periendoscopic Period).

Médicaments

Un inhibiteur de la pompe à protons IV peut être débuté en cas de possible hémorragie digestive haute et doit être utilisé si un ulcère gastroduodénal est confirmé comme étant la source du saignement.

L'octréotide (un analogue synthétique de la somatostatine) est utilisé chez les patients chez qui on suspecte un saignement variqueux. L'octréotide est administré sous la forme d'un bolus IV de 50 mcg, suivi d'une perfusion continue de 50 mcg/h.

Hémostase

Les hémorragies gastro-intestinales s’arrêtent spontanément chez près de 80% des patients. D'autres traitements sont nécessaires pour les autres patients. Le traitement spécifique repose sur le site d'origine de l'hémorragie. L'intervention précoce pour contrôler l'hémorragie est importante pour minimiser la mortalité, en particulier chez les sujets âgés.

En cas d'ulcère gastroduodénal, l'hémorragie active ou une récidive sont traitées par coagulation endoscopique (par électrocoagulation bipolaire, sclérothérapie par injection, pince chaude ou clips) (voir the 2021 ACG Clinical Guideline: Upper Gastrointestinal and Ulcer Bleeding). La poudre hémostatique peut être utilisée comme agent de temporisation, en particulier pour les ulcères gastroduodénaux ou le cancer. Les vaisseaux visibles dans le fond de l'ulcère, non hémorragiques, sont également traités. Si les traitements endoscopiques n'arrêtent pas le saignement, l'endoscopie haute doit être répétée. Si la réintervention échoue, l'embolisation angiographique du vaisseau qui saigne peut être tentée, ou bien une intervention chirurgicale est nécessaire poursuturer le site de saignement. L'embolisation angiographique a un taux de récidive du saignement plus élevé que la chirurgie, mais a un taux de complications plus faible et permet des hospitalisations plus courtes. Si le patient a été traité médicalement pour un ulcère gastroduodénal mais présente un saignement récurrent, le chirurgien effectue une chirurgie de réduction acide dans le même temps.

Une hémorragie en cours due à des varices œsophagiennes peut être traitée par ligature endoscopique, injection sclérosante ou une anastomose portosystémique intrahépatique par voie transjugulaire (TIPS, transjugular intrahepatic portosystemic shunting) (1).

Une hémorragie grave, en cours, de la partie inférieure de l'appareil digestif due à des diverticules ou à des angiomes peut parfois être contrôlée pendant la coloscopie par électrocoagulation bipolaire, la coagulation par sonde chaude ou l'injection d'adrénaline diluée (voir the 2023 Management of Patients With Acute Lower Gastrointestinal Bleeding: An Updated ACG Guideline). Si ces méthodes sont inefficaces ou impraticables, une angiographie avec embolisation ou infusion de vasopressine peut être efficace. Cependant, les collatéralités vasculaires de l'intestin sont limitées, l'angiographie présente donc un risque d'ischémie ou d'infarctus de l'intestin à moins que l'angiographie soit réalisée par technique de cathétérisme supra-sélectif. Dans la plupart des séries publiées, le taux de complications ischémiques est < 5%. La perfusion de vasopressine permet, dans près de 80% des cas, à arrêter l’hémorragie, mais l’hémorragie récidive chez environ 50% des patients. Il existe également un risque d'HTA et d'ischémie coronarienne. En outre, l'angiographie peut être utilisée pour localiser la source d'hémorragie plus précisément.

Les polypes peuvent être enlevés par anse diathermique ou par cautérisation.

La chirurgie peut être effectuée en cas d'hémorragie continue (nécessitant > 6 unités de transfusion), mais la localisation du site de l'hémorragie est très importante. Si le site du saignement ne peut être localisé, une colectomie subtotale est recommandée. L'hémicolectomie aveugle (sans identification pré-opératoire du site de l'hémorragie) entraîne une mortalité plus élevée qu'une résection segmentaire dirigée et peut ne pas enlever le site de saignement; le taux de nouveau saignement est de 40%. Cependant, le bilan doit être très rapide, de sorte que la chirurgie ne soit pas inutilement retardée. Chez les patients qui ont reçu > 10 unités de culots globulaires, la mortalité est d'environ 30%.

Les hémorragies aiguës ou chroniques des hémorroïdes internes s'arrêtent spontanément dans la plupart des cas. Le patient qui présente des hémorragies réfractaires est traité lors de l'anuscopie, par ligature élastique, injections sclérosantes, coagulation ou par voie chirurgicale.

Référence pour le traitement

  1. 1. Hwang JH, Shergill AK, Acosta RD, et al: The role of endoscopy in the management of variceal hemorrhage. Gastrointest Endosc 80(2):221–227, 2014. doi: 10.1016/j.gie.2013.07.023

Bases de gériatrie: hémorragie digestive

Chez les personnes âgées, les hémorroïdes et le cancer colorectal sont les causes les plus fréquentes d'hémorragie mineure. L'ulcère gastroduodénal, la maladie diverticulaire et les angiodysplasies sont les causes les plus fréquentes des saignements graves. Les varices hémorragiques sont moins fréquentes que chez les patients jeunes.

Une hémorragie gastro-intestinale massive est mal tolérée par les sujets âgés. Le diagnostic doit être établi rapidement et le traitement doit être commencé plus tôt que chez les patients plus jeunes, qui peuvent mieux tolérer des épisodes de saignement.

Points clés

  • Des rectorragies peuvent résulter d'une hémorragie digestive haute ou basse.

  • Les modifications orthostatiques des signes vitaux sont des marqueurs non fiables d'hémorragie grave.

  • Une hématémèse, une hématochiaie ou un méléna doivent être considérés comme une urgence et être pris en charge en unité de soins intensifs ou un autre environnement surveillé.

  • La réanimation par perfusion intraveineuse doit commencer immédiatement et peut nécessiter une transfusion de produits sanguins.

  • Chez environ 80% des patients, les saignements s’arrêtent spontanément; l’hémostase endoscopique est habituellement le premier choix chez les autres patients.

Plus d'information

Les sources d'information suivantes en anglais peuvent être utiles. S'il vous plaît, notez que LE MANUEL n'est pas responsable du contenu de ces ressources.

  1. American College of Gastroenterology–Canadian Association of Gastroenterology: Clinical Practice Guideline: Management of Anticoagulants and Antiplatelets During Acute Gastrointestinal Bleeding and the Periendoscopic Period (2022)

  2. American Journal of Gastroenterology: Management of Patients With Acute Lower Gastrointestinal Bleeding: An Updated ACG Guideline (2023)

  3. American Journal of Gastroenterology: ACG Clinical Guideline: Upper Gastrointestinal and Ulcer Bleeding (2021)

  4. American Journal of Gastroenterology: ACG Clinical Guideline: Diagnosis and Management of Small Bowel Bleeding (2015)

quizzes_lightbulb_red
TESTEZ VOS CONNAISSANCESTake a Quiz!
Téléchargez l’application Manuel MSD. ANDROID iOS
Téléchargez l’application Manuel MSD. ANDROID iOS
Téléchargez l’application Manuel MSD. ANDROID iOS