Troubles de la marche chez les adultes plus âgés

ParJames O. Judge, MD, University of Connecticut School of Medicine
Vérifié/Révisé nov. 2023
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On parle de troubles de la marche lorsqu’une personne marche de manière anormale, par exemple en cas de perte de vitesse, de fluidité, de symétrie ou d’équilibre.

Des actions telles que marcher, se lever d’une chaise, tourner et se pencher sont essentielles pour pouvoir se déplacer de manière autonome. La vitesse de marche, le temps nécessaire pour se lever d’une chaise et la capacité à se tenir debout avec un pied devant l’autre (pieds en tandem) permettent de prédire la capacité d’une personne âgée à accomplir des activités quotidiennes et d’autres, telles que faire les courses, voyager et cuisiner.

La marche sans assistance nécessite la coordination des zones du cerveau qui contrôlent l’attention, la force, les sensations et la coordination des perceptions des sens et de la contraction musculaire (voir la figure Utiliser le cerveau pour faire bouger un muscle) pour une marche sûre et régulière. La démence et d’autres troubles neurologiques peuvent significativement affecter la marche en altérant ces zones du cerveau.

Modifications normales de la marche liées à l’âge

Il est normal que certains éléments de la marche évoluent avec l’âge ; mais ce n’est pas le cas pour d’autres.

La vitesse de marche reste la même jusqu’à l’âge de 70 ans environ, puis elle diminue. La vitesse de marche est un indicateur important de la mortalité, aussi important que le nombre de pathologies chroniques et d’hospitalisations. À l’âge de 75 ans, les marcheurs lents décèdent au moins 6 ans avant les marcheurs normaux, et au moins 10 ans avant les marcheurs rapides.

La vitesse de marche ralentit car les personnes âgées font de plus petits pas. La raison la plus probable de raccourcissement de la longueur des pas (la distance entre l’impact d’un talon et l’impact suivant) est la faiblesse des muscles du mollet. Les muscles du mollet propulsent le corps vers l’avant, et la force des muscles du mollet diminue avec l’âge. Cependant, les personnes âgées semblent compenser la diminution de la force des mollets en utilisant davantage leurs muscles fléchisseurs et extenseurs de la hanche que les adultes plus jeunes.

La cadence, qui désigne le nombre de pas effectués en une minute, ne ralentit pas avec l’âge. Chaque personne a une cadence préférentielle, qui dépend de la longueur de ses jambes. Les personnes grandes font des pas plus longs à une cadence plus lente ; les personnes plus petites font des pas plus courts à une cadence plus rapide.

Le temps de double appui fait référence au moment où les deux pieds sont posés sur le sol alors qu’ils font un pas. Cette phase de la marche est une position plus stable pour avancer que lorsqu’un seul pied est au sol. Le pourcentage de temps passé en double appui augmente avec l’âge. Chez les personnes plus âgées, le temps passé en double appui peut augmenter, surtout lorsqu’elles marchent sur des sols inégaux ou glissants, lorsqu’elles se sentent déséquilibrées ou lorsqu’elles ont peur de tomber. Elles peuvent sembler marcher sur de la glace.

La posture de marche ne change que légèrement avec l’âge. Les personnes âgées marchent en se tenant droites, sans se pencher en avant. Cependant, les personnes âgées marchent avec une rotation pelvienne plus basse et une courbure accrue du bas du dos (lordose lombaire). Généralement, la faiblesse des muscles abdominaux, la tension des muscles fléchisseurs de la hanche et l’augmentation de la graisse abdominale contribuent à ce changement de posture. Les personnes plus âgées marchent également avec une légère rotation latérale des jambes (orteils vers l’extérieur) d’environ 5 degrés, probablement parce que leurs hanches sont moins capables de se tourner vers l’intérieur ou parce qu’elles essaient d’accroître leur stabilité. Le décollement du pied lors de la phase oscillante ne change pas avec l’âge.

Modifications anormales de la marche

Plusieurs troubles peuvent contribuer à une marche dysfonctionnelle ou dangereuse. Causes fréquentes :

Il existe diverses anomalies de la démarche, et certains types d’anomalies aident les médecins à identifier l’origine du trouble de la marche.

Asymétrie : Lorsque la personne est en bonne santé, son corps se déplace de manière symétrique lorsqu’elle marche (c’est-à-dire, les mouvements sont égaux sur les côtés droit et gauche). Si une personne manque systématiquement de symétrie lorsqu’elle marche, cela est souvent lié à un problème unilatéral au niveau des nerfs, des os ou des articulations (par exemple, le fait de boiter à cause d’une hanche ou d’une cheville douloureuse). Si la raison du manque de symétrie n’est pas évidente, il peut être dû à un dysfonctionnement au niveau du cerveau ou à la prise de certains médicaments.

Perte de synchronisation : La synchronisation normale de la marche implique un mouvement régulier et rythmé des membres supérieurs et inférieurs, ainsi qu’une coordination harmonieuse des membres. La synchronisation permet à la personne de se déplacer vers l’avant. Les troubles neurologiques ou musculosquelettiques qui affectent des aspects spécifiques de la marche entraînent une perte de la synchronisation.

Difficulté à commencer ou continuer à marcher : Les personnes âgées peuvent avoir des difficultés à commencer ou continuer à marcher. Lorsqu’elles commencent à marcher, leurs pieds peuvent sembler collés au sol, généralement parce qu’elles ne font pas basculer leur poids sur l’un des deux pieds pour permettre à l’autre d’avancer. Les médecins peuvent rechercher un trouble du mouvement, par exemple la maladie de Parkinson, afin d’identifier la cause de ce trouble de la marche. Une fois la marche initiée, les pas doivent s’enchaîner de manière continue, avec une variabilité minimale au niveau du rythme des pas. Le fait de se figer, de s’arrêter ou de pratiquement s’arrêter suggère généralement une démarche hésitante, une peur de tomber ou un problème au niveau du lobe frontal du cerveau. Le fait de traîner les pieds n’est pas normal (et constitue un facteur de risque de trébuchement). Les causes de ce problème comprennent la maladie de Parkinson et la faiblesse et/ou l’engourdissement des pieds provoqués par des lésions nerveuses.

Rétropulsion : On parle de rétropulsion lorsqu’une personne fait involontairement un pas vers l’arrière lorsqu’elle essaie de commencer à marcher ou tombe en arrière pendant qu’elle marche. Les médecins peuvent rechercher la cause possible parmi un problème au niveau des lobes antérieurs du cerveau, un syndrome parkinsonien, la syphilis, des AVC mineurs ou une paralysie supranucléaire progressive.

Pied tombant : Le pied tombant désigne une difficulté à lever la partie antérieure du pied en raison d’une faiblesse ou d’une paralysie des muscles impliqués. Lorsque la personne fait un pas, les orteils sont traînés au sol. Afin d’éviter que cela ne les fasse trébucher, les personnes avec un pied tombant peuvent avoir tendance à soulever la jambe plus haut que la normale lorsqu’elles marchent. Le pied tombant peut être provoqué par une lésion nerveuse ou une faiblesse musculaire.

Raccourcissement de la longueur des pas : Un raccourcissement de la longueur des pas peut être provoqué par une peur de tomber ou par un problème nerveux ou musculaire. La jambe avec le pas court est généralement celle qui est en bonne santé, et le pas court survient généralement lorsqu’une personne passe moins de temps sur la jambe à problème que sur la jambe normale pendant la marche.

Augmentation de la largeur des pas : Lorsque la vitesse de marche diminue, la largeur de pas augmente généralement légèrement. Une largeur excessive peut être provoquée par un problème de genoux, de hanches ou par un problème au niveau du cervelet, dans le cerveau. Une largeur variable des pas (embardées d’un côté ou des deux côtés) peut être due à un mauvais contrôle musculaire en raison d’un problème cérébral.

Fauchage : Le fauchage consiste à déplacer le pied en arc de cercle plutôt qu’en ligne droite lorsqu’on fait un pas en avant. Le fauchage peut être provoqué par une faiblesse musculaire pelvienne ou des difficultés à plier le genou.

Inclinaison vers l’avant : Une inclinaison vers l’avant pendant la marche peut survenir chez les personnes atteintes d’une cyphose, de la maladie de Parkinson ou de certains types de démence (en particulier la démence vasculaire et la démence à corps de Lewy).

Festination : La festination désigne une accélération progressive de la cadence des pas (généralement en se penchant vers l’avant) qui peut pousser la personne à se mettre à courir pour ne pas tomber en avant. La festination peut survenir chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson et, dans de rares cas, comme effet secondaire des médicaments antidopaminergiques (certains antipsychotiques, par exemple).

Inclinaison du tronc : Une inclinaison latérale du tronc peut indiquer la compensation d’une douleur articulaire due à l’arthrite ou d’un pied tombant.

Modifications du balancement des bras : Les personnes atteintes de la maladie de Parkinson ou d’une démence vasculaire peuvent moins balancer les bras ou ne plus les balancer du tout lorsqu’elles marchent. Des modifications du balancement des bras peuvent également faire partie des effets secondaires des médicaments antidopaminergiques.

Évaluation de la marche

Les médecins essaient d’identifier autant de facteurs potentiels pouvant contribuer aux troubles de la marche que possible en :

  • Abordant avec la personne ses griefs, ses peurs et ses objectifs en termes de mobilité

  • Observant la démarche de la personne, avec et sans dispositif d’assistance, tel qu’une canne ou un déambulateur (si cela est sans danger)

  • Évaluant tous les composants de la marche (initiation de la marche, longueur et hauteur des pas droits, longueur et hauteur des pas gauches, et symétrie)

  • Observant à nouveau la marche, après avoir examiné les composants de la marche

Les médecins réalisent un examen clinique et posent des questions ouvertes concernant d’éventuelles difficultés avec la marche, l’équilibre, ou les deux, y compris la survenue de possibles chutes (ou la peur de tomber). Les médecins interrogent également la personne sur certaines capacités spécifiques, telles que la capacité à monter et descendre des escaliers, s’asseoir et se lever d’une chaise, entrer et sortir d’une baignoire ou d’une douche, et marcher autant que nécessaire pour acheter et préparer à manger et effectuer des tâches ménagères. Les médecins évaluent la force musculaire de la personne, en particulier au niveau des mollets et des cuisses.

Parfois, les médecins réalisent des examens, notamment une tomodensitométrie (TDM) ou une imagerie par résonance magnétique (IRM), afin de déterminer si la démarche anormale est due à un trouble du cerveau, de la colonne vertébrale ou d’une autre partie du corps.

Traitement des troubles de la marche

Un trouble de la marche n’a pas toujours besoin d’être traité ou modifié. Une démarche lente et anormale peut aider certaines personnes âgées à marcher en toute sécurité et sans aide. Cependant, les médecins peuvent proposer de traiter un trouble de la marche afin d’améliorer la qualité de vie de la personne. Les traitements comprennent l’exercice physique, le travail de l’équilibre et des dispositifs d’assistance.

Musculation

Un programme d’activité physique peut permettre aux personnes âgées fragiles qui présentent des problèmes de mobilité d’améliorer ceux-ci. L’entraînement à la marche ou la musculation (entraînement en résistance) peut réduire les douleurs du genou et améliorer la démarche des personnes atteintes d’arthrite. Les exercices de résistance peuvent développer la force, surtout si la personne est fragile et marche lentement. Deux ou trois séances d’entraînement hebdomadaires sont généralement nécessaires jusqu’à ce que les objectifs de renforcement soient atteints. Il est important de bien respecter la forme de chaque exercice pour prévenir toute douleur ou blessure.

Une combinaison d’exercices à la presse à cuisses (ou des squats en relevés de chaise avec un gilet lesté ou avec des poids autour de la taille), de montées sur banc, de montées d’escaliers et d’exercices sur les appareils d’extension du genou peut être recommandée pour renforcer l’ensemble des grands groupes de muscles impliqués dans la marche.

Marche nordique

La marche nordique est un exercice de marche qui consiste à faire travailler tout le corps. Il comprend des bâtons de marche à longueur ajustable. Comparativement à la marche traditionnelle, le mouvement utilisé pour la marche nordique mobilise les muscles des épaules et des bras et nécessite une rotation pelvienne plus importante, ce qui augmente la longueur des pas et la vitesse de marche. Les personnes fragiles qui débutent la marche nordique doivent être supervisées et formées à l’utilisation des bâtons en toute sécurité.

Travail de l’équilibre

Chez de nombreuses personnes, des exercices d’équilibre permettent d’améliorer les problèmes d’équilibre. Tout d’abord, les professionnels de la santé aident les personnes à adopter une bonne posture debout et à trouver un bon équilibre en station debout. Les personnes apprennent alors à reconnaître l’emplacement de la pression sur leurs pieds et comment l’emplacement de la pression se déplace en se penchant lentement ou en se tournant pour regarder à gauche ou à droite. Les personnes s’entraînent à se pencher en avant (en s’appuyant sur un mur ou un plan de travail), en arrière (juste devant un mur) et latéralement de chaque côté. L’objectif est de pouvoir se tenir debout sur une jambe pendant 10 secondes.

Les exercices d’équilibre peuvent également être plus dynamiques. Le travail dynamique de l’équilibre peut impliquer des mouvements lents dans une seule position, des mouvements de tai-chi simples, de la marche en tandem (un pied devant l’autre, les orteils de l’un touchant le talon de l’autre), de la marche en virage, de la marche en arrière, de la marche par-dessus un objet virtuel (par exemple, une bande sur le sol), de lentes fentes avant et de lents mouvements de danse.

Dispositifs d’assistance

Des dispositifs d’assistance, tels que des cannes et des déambulateurs, peuvent aider les personnes à conserver leur mobilité et à maintenir leur qualité de vie. Les kinésithérapeutes aident les personnes à choisir quel dispositif est le plus adapté et leur enseignent comment l’utiliser.

Les cannes sont particulièrement utiles pour les personnes dont la douleur est provoquée par de l’arthrite du genou ou de la hanche, ou qui présentent une neuropathie périphérique des pieds, car la canne transmet à la main qui la tient des informations sur le type de surface ou le sol. Une canne quadripode (avec quatre petits pieds à la base) peut stabiliser le patient, mais ralentit généralement la marche. Les cannes sont généralement utilisées du côté opposé à la jambe douloureuse ou faible. Beaucoup de cannes achetées dans le commerce sont trop hautes, mais elles peuvent être ajustées à la bonne taille (voir la figure Exactement la bonne hauteur).

Les déambulateurs peuvent soulager une articulation arthritique et en réduire la douleur de manière plus conséquente qu’une canne chez les personnes qui présentent une force suffisante dans les bras et les épaules pour les utiliser. Les déambulateurs offrent une bonne stabilité et une protection modérée contre les chutes en avant, mais ils offrent une faible protection, voire n’offrent aucune protection, contre les chutes en arrière chez les personnes présentant des problèmes d’équilibre. Lorsqu’ils prescrivent l’utilisation d’un déambulateur, les kinésithérapeutes prennent en compte les besoins parfois contradictoires de stabilité et d’optimisation de l’efficacité de la marche. Les trotteurs à quatre roues équipés de roues plus larges et de freins optimisent l’efficacité, mais réduisent la stabilité.

Exactement la bonne hauteur

Il est important d’utiliser une canne à la bonne hauteur. Une canne trop longue ou trop courte peut provoquer des lombalgies, des postures incorrectes et une instabilité. La canne doit être tenue du côté opposé à la jambe qui présente une faiblesse.

Prévention des troubles de la marche

L’activité physique, pratiquée à un niveau recommandé, permet aux personnes plus âgées de conserver leur mobilité, même chez les personnes malades.

Marcher régulièrement ou maintenir un mode de vie actif est essentiel pour continuer à marcher normalement. Les effets indésirables de l’inactivité sont extrêmement importants. Un programme de marche régulière de 30 minutes par jour est la meilleure activité pour conserver sa mobilité. Cependant, la marche sur terrain plat ne permet pas d’augmenter la force d’une personne faible. Inclure des surfaces inclinées, telles que des côtes, permet de maintenir la force des jambes. L’utilisation de cannes ou de bâtons de marche ajustables peut permettre aux personnes âgées de se sentir plus confiantes et plus en sécurité.

Les mesures de prévention comprennent également de la musculation et un travail de l’équilibre.

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