Drépanocytose

(Hémoglobinose Hb S)

ParEvan M. Braunstein, MD, PhD, Johns Hopkins University School of Medicine
Vérifié/Révisé juin 2022
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La drépanocytose (une hémoglobinopathie) entraîne une anémie hémolytique chronique survenant presque exclusivement chez les sujets d'ascendance africaine. Elle est provoquée par l'hérédité homozygote des gènes de l'hémoglobine (Hb) S. Les globules rouges en forme de drépanocyte provoquent une vaso-occlusion et sont sujets à l'hémolyse, entraînant des crises douloureuses sévères, une ischémie d'organe et d'autres complications systémiques. Des aggravations aiguës (crises) peuvent survenir fréquemment. Une infection, une aplasie médullaire ou une atteinte pulmonaire (syndrome thoracique aigu) peuvent se développer brutalement et être fatales. L'anémie est présente et les cellules falciformes sont généralement évidentes sur le frottis périphérique. Le diagnostic repose sur l'électrophorèse de l'hémoglobine. Les crises douloureuses sont traitées au moyen d'antalgiques et par d'autres mesures de support. Les transfusions sont parfois nécessaires. Les vaccins contre les infections bactériennes, les antibioprophylaxies et un traitement agressif des infections prolongent la survie. L'hydroxyurée peut diminuer la fréquence des crises et le syndrome thoracique aigu.

Les hémoglobinopathies sont des troubles génétiques affectant la molécule d'hémoglobine. L'hémoglobine S a été la première hémoglobine anormale à être identifiée. Les homozygotes (environ 0,3% des personnes d'ascendance africaine aux États-Unis) ont une drépanocytose; les hétérozygotes (8 à 13% des personnes d'ascendance africaine aux États-Unis) ne sont généralement pas anémiques mais présentent un risque d'autres complications.

Physiopathologie de la drépanocytose

Les molécules d'hémoglobine (Hb) consistent en des chaînes polypeptidiques dont la structure chimique est génétiquement contrôlée. La molécule d'hémoglobine normale de l'adulte (Hb A) est formée de 2 paires de chaînes appelées alpha et bêta. Le sang adulte normal contient également 2,5% d'Hb A2 (composée de chaînes alpha et delta) et < 1,4% d'hémoglobine F (hémoglobine fœtale), qui a des chaînes gamma à la place des chaînes bêta (voir aussi Hémoglobinopathies au cours de la grossesse). L'hémoglobine F prédomine pendant la vie intra-utérine et diminue progressivement, en particulier pendant les premiers mois de vie; sa concentration augmente dans certains troubles de la synthèse de l'hémoglobine et dans l'aplasie médullaire, dans d'autres troubles d'insuffisance médullaire et les néoplasies myéloprolifératives.

Certaines hémoglobinopathies entraînent des anémies graves chez les homozygotes mais modérées chez les hétérozygotes. Certains patients sont des hétérozygotes pour 2 hémoglobinopathies différentes et présentent une anémie de sévérité variable.

Les différentes hémoglobines distinguées par leur mobilité électrophorétique, sont désignées alphabétiquement par ordre de découverte (p. ex., A, B, C), bien que la première hémoglobine anormale, l'hémoglobine de la cellule drépanocyte, ait été désignée Hb S. Pour les hémoglobine qui ont la même mobilité électrophorétique mais sont de structure différente, on ajoute le nom de la ville ou du lieu de leur découverte (p. ex., Hb S Memphis, Hb C Harlem). La description standard d'une composition de l'hémoglobine d'un patient donne en première position l'hémoglobine à la plus forte concentration (p. ex., AS dans la drépanocytose).

Aux États-Unis, des anémies fréquentes comprennnent celles causées par des mutations génétiques entraînant une Hb S ou une Hb C et les thalassémies. L'immigration aux États-Unis de personnes d'ascendance sud-asiatique a augmenté la fréquence de l'Hb E.

Dans l'hémoglobine de type HbS, une valine remplace l'acide glutamique au niveau du 6e acide aminé de la chaîne bêta. L'hémoglobine S oxygénée est beaucoup moins soluble que l'hémoglobine A oxygénée; elle forme un gel semi-solide qui provoque une déformation en forme de faucille des globules rouges au niveau des sites pauvres en PO2. Les globules rouges, déformés et rigides, adhèrent à l'endothélium vasculaire et obstruent les petites artérioles et les capillaires, entraînant des infarctus. La vaso-occlusion provoque également des lésions endothéliales, ce qui entraîne une inflammation et peut conduire à des thromboses. Comme les drépanocytes sont fragiles, les contraintes mécaniques circulatoires déclenchent une hémolyse (voir Revue générale des anémies hémolytiques). L'hyperactivité médullaire chronique compensatrice déforme les os.

Aggravations aiguës

Des poussées aiguës (crises) surviennent par intermittence, souvent pour une raison inconnue. Dans certains cas, la crise semble être déclenchée par

  • Fièvre

  • Infection virale

  • Traumatisme local

La crise vaso-occlusive est la plus fréquente; elle est provoquée par une hypoxie tissulaire et aboutit à une ischémie et à un infarctus tissulaire, typiquement de l'os, mais aussi de la rate, du poumon, ou du rein.

Les crises aplasiques apparaissent lorsque l'érythropoïèse médullaire diminue au cours d'infections aiguës par le parvovirus humain pendant lesquelles une érythroblastopénie sévère peut apparaître.

Le syndrome thoracique aigu résulte d'un embole microvasculaire et est une cause fréquente de mort, avec une mortalité pouvant atteindre 10%. Il est observé dans toutes les classes d'âge, mais plus fréquemment dans l'enfance. La répétition des épisodes prédispose à l'hypertension artérielle pulmonaire chronique.

La crise de séquestration survient généralement chez l'enfant, dont la rate n'est pas encore devenue fibreuse du fait d'infarctus spléniques répétés. Une séquestration aiguë de drépanocytes dans la rate peut se produire, aggravant l'anémie.

La séquestration hépatique peut survenir chez l'enfant ou l'adulte, qui provoque une douleur de l'hypochondre droit. Une hypertrophie d'évolution rapide du foie peut survenir et s'accompagner d'une cholestase intrahépatique et d'une insuffisance rénale.

Le priapisme, une complication sérieuse qui peut entraîner des troubles de l'érection, est fréquent chez l'homme jeune.

Complications

Une lésion splénique chronique peut aboutir à un auto-infarctus et augmente la susceptibilité aux infections, en particulier aux infections pneumococciques et à Salmonella (dont l'ostéomyélite à Salmonella). Ces infections sont particulièrement fréquentes pendant la petite enfance et peuvent être mortelles.

L'ischémie récurrente et l'infarctus peuvent causer un dysfonctionnement chronique de plusieurs systèmes d'organes différents. Les complications comprennent des accidents vasculaires cérébraux ischémiques, des convulsions, des nécroses avasculaires de hanche, des troubles de concentration urinaire rénale, une nécrose papillaire rénale, une maladie rénale chronique, une insuffisance cardiaque et une hypertension pulmonaire, une fibrose pulmonaire et une rétinopathie.

Hétérozygotes

Les hétérozygotes (Hb AS) ne font pas d'hémolyse ou de crises douloureuses. Cependant, ils ont un risque accru de maladie rénale chronique et d'embolie pulmonaire. En outre, une rhabdomyolyse et une mort subite peuvent survenir pendant un exercice physique intense et prolongé. La diminution de la capacité de concentration des urines (hyposthénurie) est fréquente. Une hématurie unilatérale (de mécanisme inconnu et habituellement du rein gauche) peut survenir, mais est spontanément résolutive. Des nécroses papillaires rénales caractéristiques peuvent apparaître, mais sont plus fréquentes chez les homozygotes et il existe une association avec l'extrêmement rare carcinome médullaire du rein.

Symptomatologie de la drépanocytose

La plupart des symptômes ne surviennent que chez les homozygotes et sont dus à

  • Anémie

  • Aux événements vaso-occlusifs entraînant une ischémie tissulaire et un infarctus

L'anémie est habituellement grave mais varie selon les patients et elle est généralement compensée; un léger ictère et une pâleur sont fréquents.

L'hépatosplénomégalie est fréquente chez l'enfant, mais du fait des infarctus spléniques répétés suivis de fibrose (splénectomie naturelle), la rate est généralement atrophiée chez l'adulte. La cardiomégalie et un souffle aortique (flux) fonctionnel sont fréquents. La lithiase biliaire et les ulcérations cutanées chroniques périmalléolaires sont fréquentes.

La crise hyperalgique vaso-occlusives déclenche une douleur intense au niveau des os longs, des mains et des pieds, du dos et des articulations. Une douleur de la hanche peut résulter d'une nécrose avasculaire de la tête fémorale. Des douleurs abdominales sévères qui peuvent être due à une thrombose de la veine hépatique, peuvent se développer avec ou sans vomissement et sont habituellement accompagnées par des douleurs dorsales et articulaires.

Le syndrome thoracique aigu est caractérisé par l'apparition soudaine de fièvre, des douleurs thoraciques et d'infiltrats pulmonaires à la rx. Il peut faire suite à une pneumopathie bactérienne. Une hypoxémie peut se développer rapidement, provoquant une dyspnée.

Diagnostic de la drépanocytose

  • Tests ADN (diagnostic prénatal)

  • Frottis de sang périphérique

  • Tests de solubilité

  • Électrophorèse de l'hémoglobine (ou focalisation en couche mince isoélectrique)

Le type de tests effectués dépend de l'âge du patient. La recherche de la mutation au niveau de l'ADN peut être utilisée pour le diagnostic prénatal ou pour confirmer le génotype de l'anémie falciforme. Le dépistage des nouveau-nés est disponible dans la plupart des États et comprend l'électrophorèse de l'hémoglobine. Le dépistage et le diagnostic chez l'enfant et les adultes nécessitent l'examen du frottis périphérique, des tests de solubilité de l'hémoglobine et une électrophorèse de l'Hb.

Dépistage prénatal

La sensibilité du diagnostic prénatal s'est nettement améliorée depuis la mise au point de la technologie PCR. Il est recommandé pour les familles à risque de la drépanocytose (p. ex., couples ayant des antécédents médicaux ou familiaux d'anémie ou d'origine ethnique évocatrice). Les prélèvements d'ADN peuvent être obtenus par prélèvement de villosités choriales de la 10e à la 12e semaine de grossesse. Le liquide amniotique peut également être testé entre 14 et 16 semaines. Le diagnostic est important pour le conseil génétique.

Dépistage chez le nouveau-né

Le dépistage universel est actuellement recommandé et est souvent l'un des batteries de tests de dépistage néonatal. Pour distinguer les hémoglobines (Hb) F, S, A et C, les tests recommandés sont l'électrophorèse de l'hémoglobine utilisant l'acétate de cellulose ou de la gélose citratée acide, la focalisation isoélectrique en couche mince ou le fractionnement de l'hémoglobine par chromatographie liquide haute performance (HPLC). Les tests doivent être répétés à l'âge de 3 à 6 mois pour confirmation. Les tests de solubilité de l'hémoglobine S sont peu fiables pendant les premiers mois de la vie.

Dépistage et diagnostic chez les enfants et les adultes

Les patients qui présentent des antécédents familiaux de drépanocytose ou de trait drépanocytaire doivent être testés par un frottis périphérique, un test de solubilité de l'hémoglobine, et une électrophorèse de l'hémoglobine.

En présence d'une symptomatologie évoquant la maladie ou ses complications (p. ex., faible croissance, douleur osseuse aiguë et inexpliquée, en particulier au niveau des doigts, nécrose aseptique de la tête fémorale, hématurie inexpliquée) et des patients d'origine africaine souffrant d'anémie normocytaire (en particulier en présence d'une hémolyse), des examens doivent être effectués à la recherche d'une anémie hémolytique, ainsi qu'une électrophorèse de l'hémoglobine et des tests de falciformation des globules rouges. Dans la drépanocytose, la numération des globules rouges est habituellement comprise entre 2 et 3 millions/microL (2 et 3 x 1012/L) avec une hémoglobine réduite proportionnellement; les cellules sont normocytaires (une microcytose suggère une alpha- ou une bêta-thalassémie concomitante). Des globules rouges nucléés apparaissent fréquemment dans le sang périphérique et une réticulocytose 10% est fréquente. Les frottis sanguins, après coloration, peuvent ne montrer que peu de drépanocytes (globules rouges en forme de croissant, aux extrémités souvent allongées ou pointues).

La drépanocytose homozygote est différenciée des autres hémoglobinopathies à drépanocytes par l'électrophorèse qui ne montre que de l'hémoglobine S avec une quantité variable d'Hb F. Chez les hétérozygotes, l'électrophorèse montre la présence de plus d'Hb A que d'Hb S. L'hémoglobine S doit être distinguée des autres hémoglobines ayant un aspect électrophorétique similaire par la mise en évidence de la morphologie pathognomonique des globules rouges.

La biopsie ostéomédullaire n'est pas utilisée pour le diagnostic. Si elle est effectuée pour éliminer d'autres anémies, elle montre une hyperplasie, avec prédominance des érythroblastes; la moelle osseuse peut devenir aplasique au cours de périodes de falciformation ou d'infections sévères. La vitesse de sédimentation érythrocytaire, si elle est effectuée pour exclure d'autres troubles (p. ex., polyarthrite rhumatoïde juvénile causant des douleurs des mains et des pieds), est faible.

Des rx du squelette, si elles sont demandées pour une autre raison, peuvent montrer au niveau du crâne un élargissement du diploé et un aspect en "poils de brosse" des travées osseuses. Les os longs montrent souvent un amincissement des corticales, des irrégularités de densité et des signes de néoformation osseuse au niveau du canal médullaire.

Une hématurie inexpliquée, même chez le patient a priori non suspect de drépanocytose, doit immédiatement faire évoquer un trait drépanocytaire.

Évaluation des aggravations

Chez le drépanocytaire connu, qui a des poussées aiguës, avec des douleurs, une fièvre ou d'autres signes d'infection, il faut évoquer une crise aplasique et demander une numération formule sanguine et une numération des réticulocytes. Une numération des réticulocytes < 1% suggère une crise aplasique, en particulier lorsque l'hémoglobine diminue en dessous du taux habituel du patient. Au cours d'une crise douloureuse sans aplasie, la numération des globules blancs augmente, souvent avec une déviation vers la gauche du schéma cytologique, en particulier en cas d'infection bactérienne. La numération plaquettaire est habituellement augmentée, mais peut chuter en cas de syndrome thoracique aigu. La bilirubinémie est habituellement élevée (p. ex., 2 à 4 mg/dL [34 à 68 micromoles/L]) et l'urine peut contenir de l'urobilinogène.

En cas de douleurs thoraciques ou de difficultés respiratoires, il faut évoquer un syndrome thoracique aigu et une embolie pulmonaire; une rx thorax et une oxymétrie pulsée sont nécessaires. Le syndrome thoracique aigu étant la principale cause de décès dans la drépanocytose, sa reconnaissance précoce et son traitement sont critiques. Une hypoxémie ou des infiltrats parenchymateux pulmonaires sur la rx thorax évoquent un syndrome thoracique ou une pneumopathie aigus. Une hypoxémie sans infiltrat pulmonaire évoque une embolie pulmonaire.

En cas de fièvre, une infection et un syndrome thoracique aigus sont évoqués; des cultures, une rx thorax et d'autres tests diagnostiques appropriés sont effectués.

Pronostic de la drépanocytose

L'espérance de vie des patients homozygotes a régulièrement augmenté, jusqu'à > 50 ans actuellement. Les causes fréquentes de mort sont les syndromes thoraciques aigus, les infections intercurrentes, les embolies pulmonaires, les infarctus d'un organe vital, l'hypertension artérielle pulmonaire, et la une maladie rénale chronique.

Traitement de la drépanocytose

  • Antibiotiques à large spectre (dans les infections)

  • Antalgiques et hydratation IV (pour les crises de douleurs vaso-occlusives)

  • Oxygène (pour l'hypoxie)

  • Parfois, transfusions sanguines

  • Vaccinations, supplémentation en folate (acide folique) et hydroxyurée (pour l'entretien de la santé)

  • Greffe de cellules-souches (pour les complications avancées)

Le traitement comprend des mesures régulières d'entretien de la santé ainsi que des traitements spécifiques des complications qui se présentent. Les complications sont traitées de manière symptomatique. Il n'existe aucun médicament antifalciformation efficace in vivo. La splénectomie n'a pas d'intérêt.

Les indications d'hospitalisation sont les suspicions d'infections graves (dont les infections systémiques), les crises aplasiques, les syndromes thoraciques aigus et, souvent, la douleur rebelle ou la nécessité de transfusions. La fièvre à elle seule peut ne pas être une raison d'hospitaliser. Cependant, les patients qui paraissent gravement malades et dont la température est > 38° C doivent être hospitalisés afin que les cultures puissent être obtenues et des antibiotiques administrés en IV.

Antibiotiques

Le patient chez qui on suspecte une infection bactérienne grave ou un syndrome thoracique aigu requiert une antibiothérapie à large spectre immédiate.

Antalgiques

Les crises douloureuses sont traitées par des antalgiques à bonnes doses, habituellement des opiacés. La morphine IV (en continu ou en bolus) est efficace et sûre; la mépéridine est évitée. Pendant les crises, les douleurs et la fièvre peuvent persister jusqu'à 5 jours. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont souvent utiles pour réduire les besoins en opiacés; cependant, ils doivent être utilisés avec prudence en cas de maladie rénale.

Hydratation intraveineuse

Bien que la déshydratation contribue à la falciformation et puisse déclencher les crises, il n'est pas certain que l'hyperhydratation soit utile pendant les crises. Néanmoins, le maintien de la volémie à un niveau normal est une base du traitement.

Oxygène

De l'oxygène est administré si nécessaire pour traiter l'hypoxie.

Transfusion

Une transfusion est administrée dans de nombreuses situations dans lesquelles son efficacité n'a pas été démontrée. Cependant, le traitement à long terme par transfusions permet de prévenir les thromboses cérébrales récidivantes, en particulier chez l'enfant, dans le but de maintenir le pourcentage d'Hb S en-dessous de 30%.

En contexte aigu, les indications spécifiques de la transfusion comprennent

  • Séquestration splénique aiguë

  • Crises aplasiques

  • Symptômes ou signes cardiopulmonaires (p. ex., insuffisance cardiaque à haut débit, hypoxémie avec PO2 < 65 mmHg)

  • Utilisation pré-opératoire

  • Priapisme

  • Événements mettant en jeu le pronostic vital qui pourraient tirer profit d'une amélioration de l'apport en oxygène (p. ex., sepsis, infection sévère, syndrome thoracique aigu, accident vasculaire cérébral, ischémie aiguë d'organe)

  • Parfois, grossesse

La transfusion n'est pas indiquée en cas de crise douloureuse non compliquée.

Une transfusion simple peut être réalisée lorsque l'objectif est de corriger l'anémie, comme lors d'une crise aplasique ou d'une séquestration splénique ou hépatique. Une exsanguinotransfusion est effectuée au cours d'événements aigus graves tels que le syndrome thoracique aigu ou d'un accident vasculaire cérébral afin de diminuer le pourcentage d'Hb S et de prévenir l'ischémie. Elle peut être effectuée avec des machines de plasmaphérèse modernes. Si le taux d'hémoglobine est initialement bas (< 7 g/dL [< 70 g/L]), ce processus ne peut être initié avant la première transfusion de GR. L'exsanguinotransfusion partielle minimise l'accumulation de fer et l'hyperviscosité.

Traitements curateurs

La greffe de cellules-souches hématopoïétiques reste le seul traitement curatif de la drépanocytose. Compte tenu des risques associés à cette thérapie, elle est généralement limitée aux patients présentant des complications de la maladie à un stade avancé.

La thérapie génique ou les techniques de modification génétique qui réduisent la quantité d'Hb S font actuellement l'objet d'essais cliniques. Ce domaine évolue rapidement et l'utilisation de la thérapie par cellules souches pour traiter la drépanocytose se développera probablement dans un proche avenir.

Maintien de l'état de santé

Les interventions suivantes ont réduit la mortalité de la prise en charge à long terme, en particulier pendant l'enfance:

  • Les vaccins antipneumococcique, anti-Haemophilus influenzae, anti-influenza (inactivé, non vivant), et antiméningococcique

  • L'identification et le traitement rapides des infections bactériennes sérieuses

  • L'antibioprophylaxie, dont la prophylaxie continue par pénicilline administrée par voie orale de 4 mois à 6 ans, réduit la mortalité, en particulier la mortalité infantile

  • L'utilisation de la supplémentation en acide folique et l'hydroxyurée

Une supplémentation en folate (acide folique), 1 mg par voie orale 1 fois/jour, est habituellement prescrite.

En augmentant le taux d'Hb fœtale et en réduisant ainsi la falciformation, l'hydroxyurée diminue le nombre de crises hyperalgiques (de 50%), de syndromes thoraciques aigus, ainsi que les besoins transfusionnels. Elle est indiquée en cas de crises douloureuses récurrentes ou d'autres complications. La posologie de l'hydroxyurée est variable et doit être adaptée en fonction des numérations globulaires et des effets indésirables. L'hydroxyurée provoque une neutropénie et une thrombopénie. C'est également un agent tératogène et elle ne doit pas être administrée aux femmes en âge de procréer.

Trois autres médicaments sont disponibles pour traiter la drépanocytose. La L-glutamine et le crizanlizumab ciblent tous deux la vaso-occlusion et diminuent les crises douloureuses dans des études contrôlées et randomisées (1, 2). On estime que la L-glutamine réduit le stress oxydatif des érythrocytes drépanocytaires, alors que le crizanlizumab inhibe la P-sélectine, qui contribue à l'adhésion des érythrocytes falciformes à l'endothélium vasculaire. Le voxélotor inhibe la polymérisation de l'Hb S, stabilise l'hémoglobine oxygénée et augmente les taux d'hémoglobine dans un essai contrôlé randomisé (3). Bien que ces médicaments soient actuellement en cours d'incorporation dans les protocoles de traitement des patients drépanocytaires, les données sur leur efficacité restent limitées.

Les examens Doppler transcrâniens chez les enfants peuvent permettre de prédire le risque d'accident vasculaire cérébral, et de nombreux experts recommandent un dépistage annuel chez les enfants de 2 à 16 ans. Les enfants à risque élevé semblent tirer profit de transfusions prophylactiques, d'exsanguinotransfusions chroniques permettant de garder l'HbS à < 30% de l'hémoglobine totale; la surcharge en fer est fréquente et doit être recherchée et traitée.

En cas de transfusions fréquentes de globules rouges, un traitement chélateur doit être envisagé pour prévenir ou retarder les complications dues à une surcharge en fer.

Références pour le traitement

  1. 1. Ataga KI, Kutlar A, Kanter J, et al: Crizanlizumab for the prevention of pain crises in sickle cell disease. N Engl J Med 376(5):429–439, 2017. doi: 10.1056/NEJMoa1611770

  2. 2. Niihara Y, Miller ST, Kanter J, et al: A phase 3 trial of l-glutamine in sickle cell disease. N Engl J Med 379(3):226–235, 2018. doi: 10.1056/NEJMoa1715971

  3. 3. Vichinsky E, Hoppe CC, Ataga KI, et al: A phase 3 randomized trial of voxelotor in sickle cell disease. N Engl J Med 381(6):509–519, 2019. doi: 10.1056/NEJMoa1903212

Points clés

  • Les patients homozygotes pour l'hémoglobine S ont une chaîne bêta anormale, entraînant la formation de globules rouges relativement rigides et fragiles qui peuvent boucher les capillaires, provoquer un infarctus tissulaire, et qui sont sujets à l'hémolyse, provoquant ainsi une anémie.

  • Les patients présentent diverses exacerbations aiguës dont des crises douloureuses, des crises de séquestration, des crises aplasiques, et des syndromes thoraciques aigus.

  • Les conséquences à long terme comprennent une hypertension pulmonaire, une maladie rénale chronique, un accident vasculaire cérébral, une nécrose aseptique et un risque accru d'infection.

  • Diagnostic par électrophorèse de l'hémoglobine.

  • Pour les crises aiguës, administrer des analgésiques opiacés pour la douleur, vérifier l'absence d'aggravation de l'anémie (qui fait évoquer une crise aplasique ou une séquestration) et de signes de syndrome thoracique aigu ou d'infection, rétablir un volume intravasculaire normal en utilisant une solution physiologique à 0,9% puis administrer des liquides pour maintenir la volémie.

  • Prévenir l'infection par des vaccins et des antibiotiques prophylactiques; limiter les crises douloureuses et les risques complications de la maladie en administrant de l'hydroxyurée.

Plus d'information

Ce qui suit est une ressource en anglais qui peut être utile. S'il vous plaît, notez que LE MANUEL n'est pas responsable du contenu de cette ressource.

  1. Sickle Cell Disease Association of America: fournit une éducation complète des patients et un soutien, y compris le mentorat par les pairs, aux patients atteints de drépanocytose

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