Démence

(Trouble neurocognitif)

ParJuebin Huang, MD, PhD, Department of Neurology, University of Mississippi Medical Center
Vérifié/Révisé févr. 2023
Voir l’éducation des patients

La démence est une détérioration chronique globale de la cognition, habituellement irréversible. Le diagnostic est clinique; les examens de laboratoire et d'imagerie sont habituellement indiqués pour rechercher une cause curable. Le traitement est un traitement de support. Les inhibiteurs de la cholinestérase peuvent parfois améliorer temporairement l'état cognitif.

(Voir aussi Revue générale des syndromes confusionnels et des démences.)

La démence peut survenir à tout âge, mais touche principalement les personnes âgées. Elle est responsable de plus de la moitié des institutionnalisations en centre de long séjour.

La classification des démences peut se faire selon plusieurs critères; l'une de ces méthodes est la suivante:

  • Type Alzheimer ou non Alzheimer

  • Corticale ou sous-corticale

  • Irréversible ou potentiellement réversible

  • Fréquentes ou rares

La démence ne doit pas être confondue avec le syndrome confusionnel, bien que des troubles de la cognition soient présents dans les deux cas. Ce qui suit permet de les distinguer:

  • La démence affecte principalement la mémoire, est provoquée par des lésions anatomiques du cerveau, s'installe de manière progressive et est généralement irréversible.

  • Le syndrome confusionnel affecte principalement l'attention, est habituellement en rapport avec une maladie aiguë ou avec une intoxication médicamenteuse (mettant parfois en jeu le pronostic vital) et est souvent réversible.

D'autres critères spécifiques aident aussi à faire la distinction entre les 2 troubles (voir tableau Différences entre confusion mentale et démence).

Étiologie de la démence

La démence peut résulter de maladies primitives du cerveau ou d'autres pathologies (voir tableau Classification de certaines démences).

Les types les plus fréquents de démence sont les suivantes

Une démence peut également être observée chez les patients atteints de maladie de Parkinson, de maladie de Huntington, de paralysie supranucléaire progressive, de maladie de Creutzfeldt-Jakob, de syndrome de Gerstmann-Sträussler-Scheinker, d'autres troubles à prions, de neurosyphilis, de lésions cérébrales traumatiques (p. ex., encéphalopathie traumatique chronique), ou de certaines tumeurs cérébrales situées dans les zones cérébrales corticales ou sous-corticales impliquées dans la cognition. Les patients peuvent présenter > 1 sorte de démences associées (démence mixte). La démence mixte la plus fréquente est la maladie d'Alzheimer associée à des troubles cognitifs vasculaires et à la démence.

Certains troubles cérébraux structurels (p. ex., hydrocéphalie à pression normale, hématome sous-dural), les troubles métaboliques (p. ex., hypothyroïdie, carence en vitamine B12) et certaines toxines (p. ex., plomb) provoquent une lente détérioration des capacités intellectuelles, qui peut être réversible avec le traitement de la cause. Ce trouble est parfois appelé démence réversible, mais certains experts réservent le terme démence à la détérioration cognitive irréversible.

La dépression peut simuler une démence (anciennement nommée pseudo-démence); les 2 troubles coexistent souvent. La dépression peut cependant être le premier signe de démence.

Les troubles de la mémoire liés à l'âge correspondent aux modifications de la cognition qui surviennent avec l'âge. Les personnes âgées ont une difficulté relative dans le rappel, et particulièrement dans la vitesse de rappel, si l'on compare leurs capacités mnésiques avec celles qu'elles avaient étant jeunes. Ces changements n'affectent pas le fonctionnement quotidien et n'indiquent donc pas une démence. Cependant, les premières manifestations de la démence sont très similaires.

Un déclin cognitif léger provoque plus de perte de mémoire que les troubles de la mémoire liés à l'âge; la mémoire et parfois d'autres fonctions cognitives sont plus altérées chez le patient atteint de ce trouble que les sujets contrôles appariés pour l'âge, mais le fonctionnement quotidien n'est typiquement pas affecté. En revanche, la démence affecte le fonctionnement quotidien. Jusqu'à 50% des patients qui présentent un déclin cognitif léger développent une démence dans les 3 ans.

Le déclin cognitif subjectif est défini comme un déclin persistant auto-ressenti de la capacité cognitive mais une performance normale aux tests cognitifs standardisés utilisés pour classer les troubles cognitifs légers (1). Le risque de troubles cognitifs légers et de démence est augmenté en cas de déclin cognitif subjectif.

Diverses maladies peuvent aggraver les troubles cognitifs chez les patients déments. Un syndrome confusionnel est fréquent chez les patients déments.

Les médicaments, en particulier les benzodiazépines et les anticholinergiques (p. ex., certains antidépresseurs tricycliques, les antihistaminiques, les antipsychotiques, la benzatropine), peuvent transitoirement provoquer ou aggraver les symptômes de la démence, de même que l'alcool et les drogues récréatives, même en quantités modérées. La survenue d'une insuffisance rénale ou hépatique aiguë ou chronique peut entraîner une réduction de la clairance du médicament et provoquer une intoxication médicamenteuse même après des années de posologie stable (p. ex., cas du propranolol).

Des mécanismes de propagation de type prions semblent impliqués dans quasiment tous les troubles neurodégénératifs qui se manifestent initialement chez la personne âgée. Une protéine cellulaire normale (ou du fait d'une mutation héréditaire) prend sporadiquement une conformation anormale et devient une forme pathogène ou prion. Le prion agit alors en tant que matrice qui provoque un repliement anormal d'autres protéines. Ce processus se produit au cours des années et dans de nombreuses parties du système nerveux central. Nombre de ces prions deviennent insolubles et, comme l'amyloïde, ne peuvent pas être éliminés par la cellule. Des preuves impliquent des prions ou mécanismes similaires à ceux de la maladie d'Alzheimer (fortement), ainsi que dans la maladie de Parkinson, la maladie de Huntington, la démence frontotemporale et la sclérose latérale amyotrophique. Ces prions ne sont pas aussi infectieux que ceux de la maladie de Creutzfeld-Jakob, mais ils peuvent être transmis.

La démence à progression rapide est un groupe de troubles cognitifs hétérogènes qui progressent plus rapidement que les autres syndromes de démence, généralement en 1 à 2 ans (2). La présentation la plus importante est le déclin cognitif (p. ex., perte de mémoire, déficits visuo-spatiaux et du langage, dysfonctionnement exécutif). Cependant, d'autres symptômes neuropsychiatriques (p. ex., troubles du comportement, changement de personnalité, troubles de l'humeur, psychose, troubles du sommeil, altération de la vigilance et/ou de la conscience, mouvements involontaires tels que des tremblements et des myoclonies, des troubles de la marche, des activités assimilables à des convulsions, une ataxie, des signes parkinsoniens) sont également observés. Les maladies à prions sont la cause la plus fréquente de démence à progression rapide. D'autres causes fréquentes comprennent l'encéphalite auto-immune et paranéoplasique. Parfois, la progression d'autres démences est atypiquement rapide; elles comprennent la maladie d'Alzheimer, la démence à corps de Lewy, la démence frontotemporale et la démence due à des causes potentiellement réversibles (p. ex., infectieuses, toxiques/métaboliques, neurovasculaires, psychiatriques).

Tableau

Références pour l'étiologie

  1. 1. Jessen F, Amariglio RE, Buckley RF, et al: The characterisation of subjective cognitive decline. Lancet Neurol 19 (3):271–278, 2020. doi: 10.1016/S1474-4422(19)30368-0

  2. 2. Hermann P, Zen I: Rapidly progressive dementias — aetiologies, diagnosis and management. Nat Rev Neurol 18 (6):363–376, 2022. doi: 10.1038/s41582-022-00659-0

Symptomatologie de la démence

(Voir aussi Symptômes comportementaux et psychologiques de la démence.)

La démence altère la cognition de manière globale. L'apparition est progressive, bien que les membres de la famille puissent signaler un début soudain (p. ex., lorsque le fonctionnement quotidien est perturbé). Souvent, l'atteinte de la mémoire à court terme est le premier signe. Au départ, les premiers symptômes peuvent ne pas être distingués de ceux des troubles de la mémoire associés à l'âge ou de la déficience cognitive légère, mais avec la progression ils deviennent apparents.

Bien que les symptômes de démence se développent selon un continuum, ils peuvent être classés en

  • Précoces

  • Intermédiaires

  • Tardifs

Les changements de personnalité et les troubles du comportement peuvent se développer précocement ou tardivement. Les troubles neurologiques moteurs et les autres déficits neurologiques focaux surviennent à différents stades, selon le type de démence; ils apparaissent précocement dans la démence vasculaire et tardivement dans la maladie d'Alzheimer. L'incidence des crises comitiales est discrètement augmentée à tous les stades.

Une psychose, hallucinations, idées délirantes ou paranoïa, survient chez près de 10% des patients souffrant de démence, bien qu'un pourcentage plus élevé puisse ressentir ces symptômes de manière transitoire.

De nombreux troubles, en particulier pendant les exacerbations, peuvent aggraver les symptômes de démence. Ces troubles comprennent le diabète, la bronchite chronique, l'emphysème, les infections, la maladie rénale chronique, les troubles hépatiques et l'insuffisance cardiaque.

L'alcool, même en quantité modérée, peut également aggraver les symptômes de la démence et contribuer à sa progression (p. ex., en réduisant le volume cérébral) et la plupart des experts recommandent que les patients atteints de démence cessent de boire de l'alcool.

Symptômes (légers) de démence précoce

La mémoire des faits récents est altérée; apprendre et retenir de nouvelles informations devient difficile. Des troubles du langage (en particulier un manque du mot), des changements d'humeur et des modifications de la personnalité se développent. Les patients peuvent présenter des difficultés croissantes dans leurs activités quotidiennes (p. ex., gérer leur chéquier, retrouver leur chemin, se souvenir où ils ont placé leurs affaires). La pensée abstraite, le discernement ou le jugement peuvent être altérés. Les patients peuvent réagir à leur perte d'autonomie et à leurs troubles mnésiques par de l'irritabilité, de l'hostilité et de l'agitation.

Les capacités fonctionnelles peuvent être limitées par les troubles suivants:

  • Agnosie: altération de la capacité à identifier des objets malgré des fonctions sensorielles intactes

  • Apraxie: altération de la capacité à effectuer des activités motrices apprises antérieurement malgré une fonction motrice intacte

  • Aphasie: altération de la capacité de comprendre ou d'utiliser le langage

Bien que les démences débutantes puissent ne pas compromettre totalement la sociabilité, les membres de la famille peuvent rapporter un comportement étrange et une labilité émotionnelle.

Symptômes (modérés) de démence

Les patients deviennent incapables d'acquérir et de se rappeler des informations nouvelles. La mémoire des événements anciens est altérée, mais pas totalement perdue. Les patients peuvent nécessiter une aide pour des activités élémentaires de la vie tous les jours (p. ex., se laver, manger, s'habiller, faire ses besoins).

Les modifications de la personnalité peuvent s'accentuer. Les patients peuvent devenir plus irritables, anxieux, égocentriques, inflexibles ou colériques. Ils peuvent devenir passifs, avec un affect plat; ils peuvent développer une dépression, devenir indécis, perdre leur spontanéité ou généralement s'exclure des situations sociales. Les traits de personnalité ou les habitudes peuvent s'exacerber (p. ex., le souci de l'argent en devient obsessionnel).

Des troubles du comportement peuvent se développer: les patients peuvent errer ou devenir, de façon brutale et inappropriée, agités, hostiles, opposants ou physiquement agressifs.

À ce stade, les patients ont perdu toute notion du temps et de l'espace, car ils ne sont plus en mesure d'exploiter efficacement les indices environnementaux et sociaux. Les patients se perdent souvent; ils deviennent incapables de retrouver leur propre chambre ou la salle de bains. Ils restent capables de marcher, mais risquent de chuter ou de se blesser en raison de leur désorientation.

Les sensations ou les perceptions déformées peuvent évoluer en une psychose avec hallucinations et délires paranoïdes et de persécution.

Le sommeil est souvent désorganisé.

Symptômes de démence tardifs (sévères)

Les patients ne peuvent plus marcher, se nourrir ou effectuer de manière autonome toute autre activité quotidienne; ils peuvent devenir incontinents. La mémoire des faits récents et anciens est totalement perdue. Les patients peuvent développer des troubles de la déglutition. Ils sont soumis à un risque de dénutrition, de pneumonie (due en particulier à des inhalations) et d'ulcères de pression. Ils deviennent totalement dépendants et le placement dans un établissement de long séjour devient souvent nécessaire. Finalement, les patients deviennent mutiques.

Ces patients n'étant plus en mesure d'exprimer leurs symptômes au médecin et les personnes âgées n'ayant que rarement de la fièvre ou une réaction leucocytaire en cas d'infection, le médecin devra se baser sur son expérience et sur son intuition lorsque le patient paraît malade.

Le stade terminal de la démence aboutit au coma et au décès, habituellement consécutif à une infection.

Diagnostic de démence

  • La distinction entre confusion mentale et démence s'effectue principalement par l'anamnèse et l'examen neurologique (dont l'état mental)

  • Par l'identification des causes médicalement curables et par des examens de laboratoire et de neuro-imagerie

  • Parfois, des tests neuropsychologiques formels

Les recommandations sur le diagnostic de démence ont été établies par American Academy of Neurology (voir aussi The diagnosis of dementia due to Alzheimer’s disease).

Distinguer la cause de la démence peut s'avérer difficile; le diagnostic de certitude nécessite souvent l'examen anatomopathologique post-mortem du tissu cérébral. Ainsi, le diagnostic clinique doit s'attacher à distinguer la démence du syndrome confusionnel et d'autres troubles, à identifier les régions cérébrales atteintes ainsi que les causes potentiellement réversibles.

La démence doit être distinguée des troubles suivants:

  • Confusion mentale: la distinction entre démence et confusion mentale est primordiale (la confusion étant habituellement réversible avec le traitement) mais peut être délicate. L'attention est évaluée en premier. Si un patient a des troubles attentionnels importants, le diagnostic s'oriente plutôt vers un syndrome confusionnel, même si une démence avancée peut également provoquer des troubles sévères de l'attention. Les autres signes qui évoquent un syndrome confusionnel plutôt qu'une démence (p. ex., durée des troubles cognitifs) sont déterminés par l'anamnèse, l'examen clinique et les examens complémentaires pour mettre en évidence des causes spécifiques.

  • Troubles de la mémoire liés à l'âge: ce trouble n'affecte pas le fonctionnement au quotidien. Si on accorde aux sujets suffisamment de temps pour apprendre de nouvelles informations, leurs performances intellectuelles sont correctes.

  • Altération cognitive bénigne: la mémoire et/ou d'autres fonctions cognitives sont altérées, mais l'altération n'est pas suffisamment grave pour perturber les activités quotidiennes.

  • Symptômes cognitifs liés à la dépression: cette atteinte cognitive régresse totalement sous l'effet du traitement antidépresseur. Les patients âgés déprimés peuvent présenter un déclin cognitif, mais contrairement aux patients souffrant d'une authentique démence, ils ont tendance à exagérer leur perte de mémoire et oublient rarement les événements actuels importants ou leurs problèmes personnels. L'examen neurologique est normal, à l'exception d'un ralentissement psychomoteur. Lors des tests, les patients souffrant de dépression font peu d'effort pour répondre, alors que ceux souffrant de démence s'y efforcent, bien que leurs réponses soient incorrectes. Lorsque la dépression et la démence coexistent, le traitement de la dépression ne corrige pas complètement la cognition.

Critères cliniques

Les lignes directrices diagnostiques du National Institute on Aging–Alzheimer's Association diagnostic guidelines précisent qu'un diagnostic général de démence nécessite tous les éléments suivants:

  • Les symptômes cognitifs ou comportementaux (neuropsychiatriques) interfèrent avec la capacité de fonctionner au travail ou d'effectuer les activités quotidiennes habituelles.

  • Ces symptômes représentent une diminution par rapport aux niveaux précédents de fonctionnement.

  • Ces symptômes ne sont pas expliqués par la confusion ou un trouble psychiatrique majeur.

Les troubles cognitifs ou comportementaux doivent être diagnostiqués grâce à l'association de l'anamnèse recueillie auprès du patient et de quelqu'un qui le connaît, plus une évaluation des fonctions cognitives (examen de l'état mental ou, si le test au lit du malade n'est pas concluant, des tests neuropsychologiques formels). De plus, la déficience cognitive ou comportementale doit toucher ≥ 2 des domaines suivants:

  • La capacité d'acquérir et de mémoriser de nouvelles informations (p. ex., poser des questions répétitives, égarer fréquemment des objets ou oublier les rendez-vous)

  • Le raisonnement et la manipulation des tâches complexes et le manque de jugement (p. ex., être incapable de gérer un compte bancaire, prendre de mauvaises décisions financières)

  • Un trouble du langage (p. ex., difficulté à penser des mots communs, des erreurs de langue et/ou d'écriture)

  • Une dysfonction visuo-spatiale (p. ex., incapacité à reconnaître les visages ou les objets courants)

  • Une modification de la personnalité ou du comportement

Si l'atteinte cognitive est confirmée, les antécédents et l'examen clinique doivent alors se concentrer sur des signes d'affection curable pouvant entraîner une atteinte cognitive (p. ex., carence en vitamine B12, neurosyphilis, hypothyroïdie, dépression, voir tableau Causes de confusion).

Évaluation de la fonction cognitive

L'examen du Mini-Mental Status (voir encadré Examen de l'état mental) ou le Montreal Cognitive Assessment (MoCA) sont souvent utilisés comme test de dépistage au lit du malade. En l'absence de confusion, la présence de multiples déficits, en particulier chez les patients qui ont un niveau d'éducation moyen ou plus élevé, suggère une démence. Le meilleur test de dépistage de la mémoire porte sur la mémoire à court terme (p. ex., mémoriser 3 objets et s'en rappeler après 5 min); les patients qui ont une démence échouent à ce test. Un autre test de l'état mental évalue la capacité à citer des plusieurs objets par catégories (p. ex., listes d'animaux, de plantes ou de meubles). Les patients atteints de démence ont des difficultés pour en citer quelques-uns; ceux n'en souffrant pas les nomment facilement.

Les tests neuropsychologiques doivent être effectués quand l'anamnèse et les tests de l'état mental au lit du malade ne sont pas concluants. Il évalue l'humeur ainsi que de multiples domaines cognitifs. Il faut entre 1 et 3 heures pour les effectuer, et ce sous la supervision d'un neuropsychologue. Ces tests aident surtout à différencier les éléments suivants:

  • Troubles de la mémoire liée à l'âge, trouble cognitif léger et démence, en particulier lorsque la cognition n'est que légèrement altérée ou lorsque le patient ou les membres de la famille ont besoin d'être rassurés

  • Démence et syndromes focaux de troubles cognitifs (p. ex., amnésie, aphasie, apraxie, difficultés visio-spatiales, diminution de la fonction d'exécution) lorsque la distinction n'est pas cliniquement évidente

Le test peut également permettre de caractériser des déficits spécifiques dus à la démence, et ils peuvent détecter une dépression ou un trouble de la personnalité qui contribuent à une mauvaise performance cognitive.

Examens complémentaires

Le bilan doit comprendre une TSH et un dosage de la vitamine B12. Des NFS complètes, des tests de la fonction rénale et hépatique sont parfois recommandés, mais leur rendement est très faible.

Si l'examen clinique suggère un trouble spécifique, d'autres examens (p. ex., sérologie VIH, sérologie de la syphilis) sont indiqués. Une ponction lombaire doit être envisagée en cas de suspicion d'infection chronique ou de neurosyphilis ou en cas de suspicion de maladie à prions ou de maladie auto-immune en cas de démence rapidement évolutive. D'autres examens peuvent être nécessaires pour exclure d'autres causes de syndrome confusionnel.

Les biomarqueurs de la maladie d'Alzheimer peuvent être utiles en recherche, mais ils ne sont pas encore utilisés de façon systématique en clinique. Par exemple, dans le liquide céphalorachidien, le taux de la protéine tau augmente et celui de l'amyloïde bêta diminue à mesure que la maladie d'Alzheimer progresse. En outre, chez les sujets porteurs de deux allèles epsilon-4 du gène de l'apolipoprotéine E4, le risque de développer une maladie d'Alzheimer à l'âge de 75 ans est 10 à 30 fois plus élevé que celui des personnes non porteuses de l'allèle. Cependant, les tests génétiques de routine pour l'allèle E4 de l'apolipoprotéine (apo epsilon-4) ne sont pas recommandés, car l'allèle E4 n'est ni nécessaire ni suffisant pour provoquer la maladie d'Alzheimer et parce qu'à l'heure actuelle, aucun traitement ne peut prévenir ou ralentir la progression de la maladie d'Alzheimer.

Neuro-imagerie

Une TDM ou une IRM doivent être effectuées lors de l'évaluation initiale de la démence et après tout changement inexpliqué de la cognition ou de l'état mental. L'imagerie cérébrale peut identifier des processus potentiellement réversibles (p. ex., hydrocéphalie à pression normale, tumeurs cérébrales, hématome sous-dural) et certaines maladies métaboliques (p. ex., neurodégénérescence associée [par déficit en] à la pantothénate kinase, [anciennement connue sous le nom de maladie d'Hallervorden-Spatz, maladie de Wilson) et des troubles irréversibles (p. ex., accident vasculaire cérébral, leucodystrophie, maladie de Creutzfeld-Jacob).

Un EEG est parfois utile (p. ex., afin d'évaluer des troubles transitoires de l'attention ou un comportement étrange).

La PET au déoxyglucose marqué au fluor-18 (18F) (fluorodésoxyglucose ou FDG) ou la tomographie à émission mono-photonique (single-photon emission CT [SPECT]) peuvent fournir des informations sur la perfusion cérébrale et aider au diagnostic différentiel (p. ex., en différenciant la maladie d'Alzheimer de la démence frontotemporale ou de la maladie avec corps de Lewy).

Des traceurs radioactifs de l'amyloïde qui se lient spécifiquement aux plaques bêta-amyloïdes (p. ex., fluor-18 [18F] florbetapir, [18F] flutémétamol, [18F] florbétaben) ont été utilisés en PET (positron emission tomography) pour visualiser des plaques amyloïdes chez des patients qui ont un déficit cognitif léger ou une démence. Ce test doit être utilisé lorsque la cause de la déficience cognitive (p. ex., déficience cognitive ou démence légères) est incertaine après une évaluation complète et quand la maladie d'Alzheimer est un diagnostic envisagé. La détermination de l'état de l'amyloïde par la PET devrait augmenter la certitude du diagnostic et de la prise en charge. La [18F] flortaucipir-PET, en utilisant un traceur tau radioactif, peut être utilisér pour estimer la densité et la distribution des enchevêtrements neurofibrillaires tau agrégés chez les adultes qui ont des troubles cognitifs et qui sont évalués pour la maladie d'Alzheimer (1).

Référence pour le diagnostic

  1. 1. Fleisher AS, Pontecorvo MJ, Devous Sr MD, et al: Positron emission tomography imaging with [18F] flortaucipir and postmortem assessment of Alzheimer disease neuropathologic changes. JAMANeurol. Publié online le 27 avril, 2020. doi:10.1001/jamaneurol.2020.0528

Traitement de la démence

  • Mesures pour assurer la sécurité

  • Fournir une stimulation adéquate, des activités et des repères pour s'orienter

  • Supprimer les médicaments ayant un effet sédatif ou anticholinergique

  • Éventuellement inhibiteurs de la cholinestérase et mémantine

  • Assistances aux aidants

  • Organisation des soins de fin de vie

Les recommandations sur le traitement de la démence sont disponibles à partir du National Institute for Health and Care Excellence. Des mesures visant à assurer la sécurité du patient et un environnement approprié sont essentielles au traitement, de même que l'assistance d'un aidant. Plusieurs médicaments sont disponibles.

Sécurité du malade

Les ergothérapeutes et les kinésithérapeutes peuvent évaluer la sécurité du lieu de vie du patient; les objectifs sont de

  • Prévenir les accidents (en particulier les chutes)

  • Prendre en charge les troubles du comportement

  • Planifier le changement à mesure que la démence progresse

La manière dont les patients se comportent dans diverses situations (c'est-à-dire, à la cuisine, en automobile) doit être évaluée en utilisant des simulations. Si les patients ont des déficits et restent dans le même environnement, des mesures de protection (p. ex., cacher les couteaux, débrancher le four, confisquer la voiture ou les clés de la voiture) peuvent être nécessaires. Certains États des États-Unis exigent que les médecins informent le Department of Motor Vehicles de ce que certains patients sont déments et qu'ils ne sont plus en mesure de conduire de manière sûre.

Si les patients s'égarent, des systèmes de suivi avec alarme peuvent être installés, ou un signalement peut-être effectué auprès des autorités. L'information est disponible auprès de l'Alzheimer’s Association.

Finalement, une assistance (p. ex., personnel de ménage, aides à domicile) ou un changement d'environnement (maison sans escaliers, résidence médicalisée, établissement avec soins infirmiers) peuvent être indiqués.

Mesures environnementales

Les patients qui présentent une démence légère à modérée s'adaptent habituellement bien dans un environnement familier.

Que ce soit à la maison ou en établissement de soins, l'environnement doit être conçu pour préserver le sentiment de contrôle de soi et la dignité de la personne en appliquant les mesures suivantes:

  • Aide à l'orientation

  • Ambiance familiale chaleureuse

  • Stimulations minimes et répétées

  • Activités régulières peu stressantes

L'orientation peut être améliorée en plaçant des calendriers et des pendules de grande taille dans la pièce et en établissant une routine pour les activités quotidiennes; le personnel médical peut porter de grands badges et se présenter régulièrement. Les modifications de l'environnement, des routines ou des personnes doivent être expliquées précisément et simplement aux patients, en omettant les informations accessoires. Les patients ont besoin de temps pour s'adapter et intégrer les changements. Informer les patients de ce qui va se passer (p. ex., lors du bain ou du repas) peut éviter l'opposition ou des réactions violentes. Des visites fréquentes des membres du personnel et de personnes familières encouragent les patients à rester sociables.

La chambre doit être bien éclairée et fournir des stimuli sensoriels (p. ex., une radio, une télévision, une veilleuse) pour aider le patient à rester orienté et à concentrer son attention. Les chambres particulières calmes et sombres, doivent être évitées.

Les activités peuvent aider les patients à être plus performants; celles en rapport avec les centres d'intérêt antérieurs du patient doivent être privilégiées. Les activités doivent être divertissantes, procurer une certaine stimulation, mais ne doivent pas offrir trop de choix ou de défis.

L'exercice physique afin de réduire l'agitation, améliorer l'équilibre et maintenir le tonus cardiovasculaire doit être pratiqué journellement. L'exercice peut également permettre d'améliorer le sommeil et de contrôler les troubles du comportement.

Les thérapies musicales et les thérapies occupationnelles (ergothérapie) aident au maintien de la motricité fine et fournissent des stimulations non verbales.

La thérapie de groupe (p. ex., thérapie de réminiscence, activités de socialisation) permet de maintenir les compétences en conversation et en relations interpersonnelles.

Médicaments

La réduction ou l'éviction des médicaments qui ont des effets sur le système nerveux central améliore souvent la cognition. Les médicaments anticholinergiques et sédatifs, qui tendent à aggraver la démence, doivent être évités.

Les inhibiteurs de la cholinestérase donépézil, rivastigmine et galantamine améliorent quelque peu la cognition dans la maladie d'Alzheimer ou la démence avec corps de Lewy et peuvent parfois être utiles dans d'autres formes de démence. Ces médicaments inhibent l'acétylcholinestérase, augmentant ainsi le taux d'acétylcholine dans le cerveau.

La mémantine, un antagoniste de la NMDA (N-méthyl-d-aspartate), permet de ralentir la perte de la fonction cognitive en cas de démence modérée à sévère et peut avoir un effet synergique lorsqu'elle est utilisée en association avec un inhibiteur de la cholinestérase.

Les médicaments pour contrôler les troubles du comportement (p. ex., neuroleptiques) ont été utilisés.

Patients atteints de démence et qui ont des signes de dépression doivent être traités par des antidépresseurs non anticholinergiques, de préférence des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine.

Assistance aux aidants

Les membres de la famille proche ont un rôle important dans la prise en charge du patient dément (voir Soins dispensés par la famille aux personnes âgées). Les infirmières et les assistants sociaux peuvent leur enseigner, ainsi qu'aux autres soignants, comment mieux satisfaire les besoins du patient (p. ex., comment gérer les soins journaliers et faire face aux problèmes financiers); cet enseignement doit être continu. D'autres ressources (p. ex., groupes de soutien, matériels éducatifs, sites Internet) sont disponibles.

Les aidants peuvent subir un stress important. Le stress peut être secondaire aux inquiétudes concernant la protection du patient ou à la frustration, l'épuisement, la colère et l'amertume de devoir fournir autant d'effort pour aider quelqu'un. Les professionnels de la santé doivent surveiller les premiers symptômes de stress et de surmenage et, si nécessaire, suggérer des services de soutien (p. ex., assistante sociale, nutritionniste, infirmière, aide-ménagère).

Si un patient dément présente un traumatisme inhabituel, la possibilité de maltraitance sur personne âgée doit être envisagée.

Pronostic de démence

La démence est habituellement progressive. Cependant, la rapidité d'évolution varie considérablement en fonction de l'étiologie. La démence diminue l'espérance de vie, mais les estimations de survie varient.

Problèmes de la fin de vie

La désignation d'un membre de la famille, d'un tuteur ou d'un avocat pour gérer les finances peut être nécessaire, en raison de la perte de discernement et de jugement des patients déments. Tôt dans l'évolution de la démence, avant que le patient ne soit handicapé, ses souhaits concernant la prise en charge doivent être clarifiés et les procédures financières et légales (p. ex., désignation à l'avance d'une personne de confiance, directives pour les soins) doivent être effectuées. Lorsque ces documents sont signés, les capacités du patient doivent être évaluées et les résultats de son bilan enregistrés. Les décisions concernant l'alimentation artificielle et le traitement des troubles aigus sont mieux prises lorsqu'elles sont anticipées.

Dans la démence avancée, des mesures palliatives peuvent être plus appropriées que des interventions très agressives ou des soins hospitaliers.

Points clés

  • La démence, contrairement à la perte de mémoire liée à l'âge et à la déficience cognitive légère, provoque des troubles cognitifs qui perturbent le fonctionnement quotidien.

  • Être conscient que les membres de la famille peuvent signaler l'apparition soudaine de symptômes seulement parce qu'ils ont reconnu de façon brutale des symptômes dont le développement a été progressif.

  • Évoquer les causes réversibles de déclin cognitif, tels que les troubles structurels du cerveau (p. ex., hydrocéphalie à pression normale, hématome sous-dural), troubles métaboliques (p. ex., hypothyroïdie, carence en vitamines B12), les médicaments, la dépression et les toxines (p. ex., plomb).

  • Effectuer des tests de l'état mental au lit du malade et, si nécessaire, des tests neuropsychologiques formels pour confirmer l'altération de la fonction cognitive dans ≥ 2 domaines.

  • Recommander ou organiser des mesures visant à maximiser la sécurité des patients, afin de fournir un environnement familier et confortable au patient, et fournir un soutien aux aidants naturels.

  • Envisager un traitement médicamenteux d'appoint et recommander des arrangements de fin de vie.

Plus d'information

Les sources d'information suivantes en anglais peuvent être utiles. S'il vous plaît, notez que LE MANUEL n'est pas responsable du contenu de ces ressources.

  1. Alzheimer’s Association: ce site web fournit des informations sur la maladie d'Alzheimer (p. ex., statistiques, causes, facteurs de risque et symptômes) et des ressources pour le soutien (p. ex., des informations sur les soins quotidiens des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et les soins pour les aidants).

  2. American Academy of Neurology: Practice parameter: Diagnosis of dementia (an evidence-based review): cette revue de 2001 fait des recommandations détaillées pour le diagnostic de la démence et l'identification de sa cause.

  3. Alzheimer’s Association: diagnostic de démence: ce site web fournit des liens vers des articles en accès libre contenant les dernières recherches sur les critères diagnostiques de la maladie d'Alzheimer et des informations sur le diagnostic différentiel, des vidéos montrant la divulgation du diagnostic aux patients et des informations à jour sur l'utilisation des imageries et biomarqueurs avancés dans le diagnostic de la maladie d'Alzheimer.

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