Poliomyélite

(Paralysie infantile; poliomyélite antérieure aiguë; polio)

ParBrenda L. Tesini, MD, University of Rochester School of Medicine and Dentistry
Vérifié/Révisé juin 2023
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La poliomyélite est une infection aiguë due à un poliovirus (un entérovirus). Ses manifestations comprennent une forme bénigne non spécifique (poliomyélite abortive), parfois une méningite aseptique sans paralysie (poliomyélite non paralytique), et moins souvent, une paralysie flasque de différents groupes musculaires (poliomyélite paralytique). Le diagnostic est clinique, bien que le diagnostic de laboratoire soit possible. Le traitement est un traitement de support.

Il existe 3 sérotypes de poliovirus. Le type 1 est le plus virulent et était la cause la plus fréquente des épidémies. L'homme est le seul hôte naturel. L'infection est très transmissible par contact direct. Les infections asymptomatiques ou bénignes (poliomyélite abortive) sont plus fréquentes que les infections paralytiques ou non paralytiques de 60:1 et constituent la principale source de propagation du virus. (Voir aussi Revue générale des infections à entérovirus.)

La vaccination extensive a quasiment éradiqué la maladie au niveau mondial. En 2022, le poliovirus sauvage de type 1 ne circulait que dans 2 pays (Afghanistan, 2 cas paralytiques; Pakistan, 20 cas). En revanche, des épidémies de poliovirus d'origine vaccinale ont été signalées dans 31 autres pays, dont les États-Unis, le Royaume-Uni, Israël, le Malawi, le Tchad, la République démocratique du Congo et le Yémen. (Voir aussi the Polio Eradication Initiative.)

Aux États-Unis, un cas de polio paralytique d'origine vaccinale a été identifié chez une personne non vaccinée qui l'a contractée dans l'État de New York en juillet 2022 (1). Aucun autre cas n'a été identifié aux États-Unis, mais la surveillance des eaux usées a détecté le virus dans des échantillons de plusieurs comtés de New York, indiquant une transmission locale (2; voir aussi New York State Department of Health: Wastewater Surveillance). Le dernier cas de poliovirus sauvage acquis aux États-Unis remonte à 1979.

Références

  1. 1. Link-Gelles R, Lutterloh E, Schnabel Ruppert P, et al: Public Health Response to a Case of Paralytic Poliomyelitis in an Unvaccinated Person and Detection of Poliovirus in Wastewater - New York, June-August 2022. MMWR Morb Mortal Wkly Rep 71(33):1065-1068, 2022. Publié le 19 aout 2022. doi:10.15585/mmwr.mm7133e2

  2. 2. Ryerson AB, Lang D, Alazawi MA, et al: Wastewater Testing and Detection of Poliovirus Type 2 Genetically Linked to Virus Isolated from a Paralytic Polio Case - New York, March 9-October 11, 2022. MMWR Morb Mortal Wkly Rep. 71(44):1418-1424, 2022. Publié le 4 novembre 2022. doi:10.15585/mmwr.mm7144e2

Physiopathologie de la poliomyélite

Le virus pénètre par voie fécale-orale ou respiratoire, puis se multiplie dans la muqueuse oropharyngée et celle du tractus gastro-intestinal inférieur. Le virus est sécrété dans la salive et les selles, à partir desquelles il peut être transmis à d'autres personnes. Le virus pénètre ensuite dans les ganglions cervicaux et mésentériques. Une virémie primaire (mineure) survient avec la propagation du virus dans le système réticuloendothélial. L'infection peut s'arrêter à ce stade ou le virus peut se multiplier et provoquer une virémie secondaire de plusieurs jours, durant laquelle le développement des anticorps et les symptômes sont maximaux.

Dans les infections paralytiques, le poliovirus pénètre dans le système nerveux central, par virémie secondaire ou par migration par les nerfs périphériques, mais ceci est mal connu. Des lésions importantes n'atteignent que la moelle épinière et le cerveau, en particulier les nerfs moteurs de contrôle et le système végétatif. L'inflammation aggrave les lésions provoquées par l'envahissement viral primitif. Les facteurs prédisposant aux lésions neurologiques graves comprennent

  • Vieillissement (tout au long de la vie)

  • Amygdalectomie ou injection intramusculaire récentes

  • Grossesse

  • Anomalies de la fonction des cellules B

  • Épuisement physique concomitant au début de la phase affectant le système nerveux central

Le poliovirus est présent dans la gorge et les fèces pendant la période d'incubation et, après le début des symptômes, il persiste 1 à 2 semaines dans la gorge et 3 à 6 semaines dans les selles.

Pièges à éviter

  • La plupart des infections par le poliovirus n'atteignent pas le système nerveux central ni ne provoque de paralysie.

Symptomatologie de la poliomyélite

La plupart (70 à 75%) des infections à poliovirus ne provoque aucun symptôme (voir Centers for Disease Control and Prevention: Epidemiology and Prevention of Vaccine-Preventable Diseases, Poliomyelitis). La maladie symptomatique est classée comme

  • Poliomyélite abortive

  • Poliomyélite paralytique ou non paralytique

Poliomyélite abortive

La plupart des infections symptomatiques, en particulier chez le jeune enfant, sont mineures, avec pendant 1 à 3 jours une fièvre modérée, une sensation de malaise, des céphalées, une angine et des vomissements qui apparaissent 3 à 5 jours après l'exposition au virus. Il n'y a pas de symptômes ou de signes neurologiques et l'examen clinique n'est pas informatif, excepté la fièvre.

Poliomyélite paralytique et poliomyélite non paralytique

Environ 1-5% des patients qui ont une infection à poliovirus développent une atteinte du système nerveux central non paralytique avec une méningite aseptique (voir Centers for Disease Control and Prevention: Epidemiology and Prevention of Vaccine-Preventable Diseases, Poliomyelitis). Les patients présentent généralement une raideur de la nuque et/ou du dos et des céphalées qui apparaissent après plusieurs jours de prodrome similaires à eux d'une poliomyélite abortive. Les manifestations durent de 2 à 10 jours.

La poliomyélite paralytique survient dans < 1% des infections à poliovirus. Elle peut se manifester comme une maladie biphasique chez les nourrissons et les jeunes enfants avec une phase paralytique survenant plusieurs jours après la disparition des symptômes de la poliomyélite abortive. L'incubation dure habituellement de 7 à 21 jours.

Les manifestations fréquentes possibles de la poliomyélite paralytique en plus de la méningite aseptique sont des douleurs musculaires profondes, des hyperesthésies, des paresthésies et, dans la myélite active, une rétention urinaire et des spasmes musculaires. Une paralysie flasque asymétrique peut se développer et progresser en 2 à 3 jours. Des signes d'encéphalite sont parfois prédominants.

Une dysphagie, une régurgitation nasale et une voix nasonnée sont généralement les signes précoces de l'atteinte bulbaire mais certains patients ont une paralysie pharyngée et ne peuvent contrôler leurs sécrétions orales. Comme pour la paralysie des muscles squelettiques, l'atteinte bulbaire peut empirer en 2 à 3 jours et, chez certains patients, affecte les centres respiratoires et circulatoires du tronc cérébral, et provoque des troubles respiratoires. Rarement, une insuffisance respiratoire se développe lorsque les muscles du diaphragme ou des muscles intercostaux sont affectés.

Certains patients développent un syndrome post-poliomyélitique des années ou des décennies après la poliomyélite paralytique. Ce syndrome se caractérise par une fatigue musculaire et une diminution de l'endurance souvent associées à une faiblesse, des fasciculations et une atrophie.

Diagnostic de la poliomyélite

  • Ponction lombaire

  • Culture virale (selles, gorge et liquide céphalorachidien)

  • Reverse Polymerase Chain Reaction (PCR) du sang ou du liquide céphalorachidien

  • Tests sérologiques pour sérotypes des poliovirus, d'autres entérovirus et du virus West Nile (virus du Nil occidental)

En l'absence de manifestations du système nerveux central, la poliomyélite symptomatique (poliomyélite abortive) ressemble à d'autres infections virales systémiques et n'est habituellement pas évoquée ni diagnostiquée sauf au cours d'une épidémie.

La poliomyélite non paralytique ressemble à d'autres méningites virales. Chez ces patients, on effectue habituellement une ponction lombaire; les valeurs typiques du liquide céphalorachidien sont une glycorachie normale, des protéines légèrement élevées, et une numération cellulaire de 10 à 500/mcL (principalement des lymphocytes). La détection du virus dans la gorge, les selles ou le liquide céphalorachidien ou la mise en évidence d'une augmentation du titre d'anticorps spécifiques confirme l'infection par le poliovirus, mais n'est habituellement pas nécessaire chez les patients atteints de méningite aseptique simple.

La poliomyélite paralytique peut être suspectée chez les enfants ou les jeunes adultes non vaccinés qui présentent une paralysie flasque asymétrique des membres ou des paralysies bulbaires sans perte sensorielle au cours d'une maladie fébrile aiguë. Cependant, certains virus coxsackie des groupes A et B (en particulier l'A 7), plusieurs échovirus et l'entérovirus 71, peuvent entraîner des signes similaires. En outre, des cas de faiblesse localisée ou de paralysie des membres ont été identifiés après infection par l'entérovirus D68. L'infection par le virus West Nile (virus du Nil occidental) peut également entraîner une paralysie flasque aiguë, cliniquement indifférenciable de la poliomyélite paralytique due aux poliovirus. Le syndrome de Guillain-Barré provoque une paralysie flasque, mais il peut être reconnu grâce aux éléments suivants:

  • Il ne provoque généralement pas de fièvre.

  • La faiblesse musculaire est symétrique.

  • Des déficits sensoriels se produisent chez 70% des patients

  • La protéine du liquide céphalorachidien est habituellement élevée et la numération des cellules du liquide céphalorachidien est normale.

Indices épidémiologiques (p. ex., des antécédents de vaccination, un voyage récent, l'âge, la saison) peuvent suggérer la cause. L'identification du poliovirus ou d'un autre entérovirus comme cause de paralysie flasque aiguë étant importante pour des raisons de santé publique, les cas suspects doivent être signalés immédiatement au service de santé local ou de l'État pour faciliter les tests diagnostiques. Deux prélèvements de gorge et de selles entières doivent être prélevés à au moins 24 heures d'intervalle pour culture virale et RT-PCR. Des prélèvements de liquide céphalorachidien et de sang seront probablement également demandés. Des tests sérologiques spécifiques pour le poliovirus, d'autres entérovirus et le virus West Nile (virus du Nil occidental) doivent également être effectués.

Traitement de la poliomyélite

  • Soins de support

Le traitement standard de la poliomyélite est un traitement de support et comprend le repos, des antalgiques et des antipyrétiques. Un traitement antiviral spécifique n'est pas disponible.

Au cours de la myélite active, des précautions pour éviter les complications liées à l'alitement peuvent être nécessaires (p. ex., thrombose veineuse profonde, atélectasie, infections urinaires) ainsi qu'une immobilité prolongée (p. ex., des rétractions). Une insuffisance respiratoire peut nécessiter une ventilation mécanique. La ventilation mécanique ou la paralysie bulbaire nécessitent des mesures d'hygiène pulmonaires intensives.

Pronostic de la poliomyélite

Dans la poliomyélite non paralytique, la guérison est complète.

Dans la poliomyélite paralytique, environ 2/3 des patients présentent une asthénie résiduelle permanente. Une paralysie bulbaire a plus de chances de guérir qu'une paralysie périphérique. La mortalité est de 4 à 6%, mais elle peut s'élever à 10 à 20% chez l'adulte ou en cas d'atteinte bulbaire.

Prévention de la poliomyélite

Tous les nourrissons et tous les enfants doivent être vaccinés par le vaccin contre la poliomyélite. L'American Academy of Pediatrics recommande la vaccination à 2 mois, 4 mois et entre 6 à 18 mois et un rappel entre et 4 et 6 ans (voir tableau Centers for Disease Control and Prevention: Routine Polio Vaccination). Une vaccination pendant l'enfance confère l'immunité chez > 95% des receveurs.

Le vaccin polio inactivé Salk (VPI) est préférable au vaccin Sabin oral vivant atténué (vaccin antipoliomyélitique oral). Le virus atténué dans le vaccin Sabin oral vivant atténué se réplique dans les intestins des receveurs et est transitoirement excrété dans les selles et peut donc se transmettre par voie fécale-orale à d'autres individus, ce qui pourrait vacciner certains qui n'ont pas reçu directement le vaccin. Cependant, le passage par de nombreux individus peut induire des mutations du virus vaccinal, très rarement vers une souche (poliovirus dérivé du vaccin) en mesure de provoquer une poliomyélite paralytique, ce qui se produit cependant dans environ 1 cas pour 2 400 000 doses de vaccin Sabin oral vivant atténué. Cette mutation se produit habituellement dans la composante poliovirus de type 2 du vaccin. Pour cette raison, le vaccin antipoliomyélitique oral n'est plus disponible aux États-Unis. En outre, le poliovirus de type 2 a été retiré du vaccin antipoliomyélitique oral en 2016 en raison d'épidémies d'infection par des virus dérivés des vaccins génétiquement divergents malgré l'éradication officielle du poliovirus sauvage de type 2. Le vaccin polio inactivé Salk (VPI) n'a été associé à aucun effet indésirable.

Les adultes ne sont pas vaccinés systématiquement. Les adultes non immunisés voyageant dans des zones d'endémies ou épidémiques doivent recevoir la vaccination primitive au vaccin polio inactivé Salk (VPI), dont 2 doses administrées à 4 à 8 semaines d'intervalle et une 3e administrée à 6 à 12 mois plus tard. Au moins 1 dose est administrée avant le voyage. Les adultes vaccinés qui voyagent dans des zones d'endémies ou épidémiques doivent recevoir 1 dose de vaccin polio inactivé Salk (VPI). Les résidents de New York dans les zones de détection répétée de poliovirus peuvent être plus à risque d'infection et doivent suivre les recommandations de vaccination mises à jour par le New York State Department of Health (voir New York State Department of Health: Polio Vaccine). Les patients immunodéprimés et leur entourage ne doivent pas recevoir le vaccin Sabin oral vivant atténué (vaccin antipoliomyélitique oral).

Points clés

  • La plupart des infections à poliovirus sont asymptomatiques ou causent une maladie mineure non spécifique ou une méningite aseptique, sans paralysie; < 1% des patients développent un syndrome classique de faiblesse flasque (poliomyélite paralytique).

  • La survenue d'une paralysie flasque asymétrique des membres ou de paralysies bulbaires sans déficit sensitif au cours d'un épisode fébrile aigu chez un enfant ou un jeune adulte non immunisé peut être le signe d'une poliomyélite paralytique.

  • Les services de santé locaux et de l'État doivent être immédiatement informés des cas suspects. Une culture virale des prélèvements de gorge, des selles et du liquide céphalorachidien et une réaction en chaîne de la reverse transcriptase Polymerase Chain Reaction (PCR) du liquide céphalorachidien et du sang doivent être effectuées en coordination avec les départements de santé publique.

  • Dans la poliomyélite paralytique, environ 2/3 des patients présentent une asthénie résiduelle permanente.

  • Tous les nourrissons et les enfants doivent être vaccinés, mais les adultes ne sont pas vaccinés systématiquement à moins qu'ils soient à risque accru (p. ex., en raison de voyage, pour des raisons professionnelles ou d'épidémies locales).

Plus d'information

La source d'information suivante en anglais peut être utile. S'il vous plaît, notez que LE MANUEL n'est pas responsable du contenu de cette ressource.

  1. Polio Eradication Initiative: Information about The Global Polio Eradication Initiative, which intends to eradicate polio worldwide through a public-private partnership

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