Septicémie et choc infectieux

ParJoseph D Forrester, MD, MSc, Stanford University
Revue/Révision complète mars 2023
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Les faits en bref

La septicémie est une réaction grave de l’ensemble du corps à une bactériémie ou à une autre infection plus un dysfonctionnement ou une défaillance d’un système essentiel de l’organisme. Un choc septique est une tension artérielle faible menaçant le pronostic vital (choc) et une défaillance organique dues à une septicémie.

  • Habituellement, une septicémie est la conséquence de certaines infections bactériennes, parfois contractées à l’hôpital.

  • Certaines affections (telles qu’un déficit du système immunitaire), certaines pathologies chroniques, le port d’une prothèse articulaire ou de valve cardiaque, et certaines anomalies des valves cardiaques augmentent le risque.

  • Tout d’abord, apparaît chez le patient une température très élevée (ou parfois basse), accompagnée de frissons et d’une faiblesse.

  • Lors de l’aggravation de la septicémie, les battements du cœur s’accélèrent, la respiration devient plus rapide, une confusion mentale s’installe et la tension artérielle chute.

  • Au regard des symptômes, les médecins suspectent le diagnostic et le confirment par une recherche des bactéries dans des échantillons sanguins, urinaires ou dans tout autre matériel.

  • Des antibiotiques sont immédiatement administrés, ainsi qu’une oxygénothérapie et des solutés par voie intraveineuse, et parfois des médicaments afin d’augmenter la tension artérielle.

(Voir aussi Introduction à la bactériémie, à la septicémie et au choc septique.)

En général, la réponse de l’organisme à l’infection est limitée à la zone infectée, par exemple les symptômes d’une infection des voies urinaires sont souvent limités à la vessie. Mais dans la septicémie, la réponse à l’infection est une réponse généralisée de tout l’organisme appelée réponse systémique.

Cette réponse comprend généralement une élévation anormale de la température (fièvre) ou une diminution de la température (hypothermie) accompagnée d’un ou plusieurs des signes suivants :

Bien que de nombreuses infections soient à l’origine de ces symptômes partout dans l’organisme, dans la septicémie, les organes commencent à dysfonctionner et la circulation sanguine n’irrigue plus correctement certaines parties du corps.

Un choc septique est une septicémie qui est responsable d’une chute sévère de la tension artérielle (choc). Il en résulte un apport insuffisant de sang aux organes internes, comme les poumons, les reins, le cœur et le cerveau, ce qui provoque leur dysfonctionnement. Le diagnostic d’un choc septique est fait lorsque la tension artérielle reste faible malgré la mise en place d’un traitement intensif comprenant l’administration de liquides par voie intraveineuse. Un choc septique est une menace pour le pronostic vital.

Causes de la septicémie et du choc septique

Une septicémie apparaît lorsque des toxines produites par certaines bactéries sont responsables de la libération par les cellules de l’organisme de substances déclenchant une inflammation (cytokines). Bien que les cytokines soient des substances qui aident le système immunitaire à combattre les infections, elles peuvent avoir des effets nocifs :

  • Elles peuvent entraîner une augmentation de la taille des vaisseaux sanguins (dilatation), ce qui diminue la tension artérielle.

  • Elles peuvent être responsables de la formation d’un caillot au niveau des minuscules vaisseaux sanguins situés à l’intérieur des organes.

Le plus souvent, une septicémie est la conséquence d’une infection par certains types de bactéries. Rarement, des champignons, tels que les Candida, sont responsables d’une septicémie. Les infections susceptibles de provoquer une septicémie débutent la plupart du temps au niveau des poumons, de l’abdomen ou des voies urinaires. Chez la plupart des patients, ces infections n’aboutissent pas à une septicémie. Cependant, certaines bactéries se propagent dans la circulation sanguine (affection appelée bactériémie). Une septicémie peut alors se développer. S’il y a formation d’un abcès au cours de l’infection initiale, il y a une augmentation du risque de bactériémie et de septicémie. Parfois, par exemple en cas de syndrome de choc toxique, la septicémie est provoquée par des toxines sécrétées par des bactéries qui ne se sont pas propagées dans la circulation sanguine.

Complications de la septicémie et du choc septique

La diminution de la tension artérielle et la formation de petits caillots entraînent une série de complications néfastes :

  • Le flux sanguin diminue au niveau des organes vitaux (comme les reins, les poumons, le cœur et le cerveau).

  • Le cœur essaie de compenser en augmentant son travail, c’est-à-dire en accélérant le rythme cardiaque et en augmentant la quantité de sang pompée. Finalement, le cœur s’affaiblit à cause des toxines bactériennes et de son augmentation de travail de pompage. Il en résulte une diminution de la quantité de sang pompée et donc une diminution de la quantité de sang arrivant aux organes.

  • Lorsque les organes ne reçoivent pas assez de sang, ils libèrent un excédent d’acide lactique (déchet de l’organisme) dans la circulation sanguine, ce qui acidifie le sang (acidose).

À cause de tous ces effets s’installe un cercle vicieux d’aggravation des défaillances des organes :

  • Les reins n’excrètent plus d’urines ou très peu et les déchets métaboliques (tels que l’urée) s’accumulent dans le sang.

  • Les parois des vaisseaux peuvent être lésées, permettant au liquide de sortir de la circulation et de pénétrer dans les tissus, ce qui provoque un œdème.

  • La fonction pulmonaire s’aggrave car les vaisseaux sanguins laissent échapper le liquide dans les poumons où il s’accumule, provoquant des difficultés respiratoires.

Comme les caillots sanguins microscopiques continuent à se former, ils consomment les protéines présentes dans le sang responsables de la coagulation (facteurs de coagulation). Puis, un saignement excessif (coagulation intravasculaire disséminée) peut se produire.

Facteurs de risque de septicémie et de choc septique

Le risque de septicémie est augmenté dans certaines situations qui réduisent les capacités de lutte contre les infections graves. À savoir :

  • Nouveau-né (voir Septicémie du nouveau-né)

  • Personne âgée

  • Femme enceinte

  • Être atteint(e) de certaines maladies chroniques comme le diabète ou la cirrhose

  • Présence d’un déficit du système immunitaire suite à un traitement par des médicaments qui affaiblissent le système immunitaire (comme une chimiothérapie ou des corticoïdes) ou dû à certains troubles (tels que cancer, SIDA et troubles immunitaires)

  • Avoir été traité(e) récemment avec des antibiotiques ou des corticoïdes

  • Avoir été hospitalisé(e) récemment (en particulier en unité de soins intensifs)

Le risque est également élevé chez les patients plus susceptibles d’avoir des bactéries dans le sang. Ces patients sont les porteurs de matériel médical (tel que cathéter intraveineux ou sonde urinaire, drain [tube de drainage] ou sonde d’intubation pulmonaire). Lors de la pose de ces matériels médicaux, il peut y avoir pénétration de bactéries dans l’organisme. Les bactéries peuvent également s’amasser à la surface de ces matériels, ce qui favorise l’apparition d’infections et de septicémies. Plus le matériel est laissé en place longtemps, plus le risque est grand.

Les autres situations augmentant le risque de septicémie sont :

  • Injection de drogues : les drogues et les aiguilles utilisées sont rarement stériles. Chaque injection peut être responsable d’une bactériémie plus ou moins importante. Les personnes utilisant ces drogues ont également un risque de pathologies qui peuvent affaiblir le système immunitaire (telles que le SIDA).

  • Port d’une prothèse articulaire (articulation artificielle) ou d’une prothèse valvulaire ou certaines anomalies des valves cardiaques : les bactéries ont tendance à se loger et à s’accumuler au niveau de ces structures. Les bactéries peuvent alors être libérées en continu ou de façon périodique dans la circulation sanguine.

  • Présence d’une infection persistante en dépit d’un traitement antibiotique : certaines bactéries responsables d’infections et de septicémies sont résistantes aux antibiotiques. Les antibiotiques ne peuvent pas éradiquer les bactéries résistantes. Par conséquent, si une infection persiste chez des patients traités par des antibiotiques, celle-ci est due fort probablement à une bactérie résistante aux antibiotiques et qui est peut-être responsable d’une septicémie.

Symptômes de la septicémie et du choc septique

La plupart des patients ont de la fièvre mais chez certains, il peut y avoir une diminution de la température corporelle. Ces patients peuvent avoir des frissons et se sentir faibles. D’autres symptômes peuvent également être présents selon le type et le site de l’infection initiale (par exemple, les personnes atteintes de pneumonie peuvent présenter une toux, une gêne thoracique et des difficultés respiratoires). Il peut y avoir une accélération de la respiration, du rythme cardiaque ou les deux.

Lors de l’aggravation d’une septicémie s’installent une confusion mentale et une baisse de la vigilance. La peau devient chaude et rouge. Les battements du pouls sont rapides et violents et la respiration est rapide. Les urines sont peu fréquentes et peu abondantes et la tension artérielle diminue. Plus tard, il y a souvent une chute de la température en dessous de la valeur normale, et la respiration devient très difficile. La peau peut se refroidir et prendre un aspect pâle et marbré ou une coloration bleue, suite à la diminution du flux sanguin. Cette diminution du flux sanguin peut provoquer la mort des tissus, y compris des tissus des organes vitaux (comme les intestins), ce qui aboutit à une gangrène.

Lors de l’apparition d’un choc septique, la tension artérielle est faible malgré le traitement. Certaines personnes meurent.

Diagnostic de la septicémie et du choc septique

  • Mise en culture d’un échantillon de sang

  • Analyses visant à déterminer la source de l’infection (les analyses comprennent généralement des radiographies du thorax et d’autres examens d’imagerie et la mise en culture d’échantillons de liquides ou de tissus)

Généralement, les médecins suspectent une septicémie lors de l’apparition soudaine d’une très haute ou très basse température, d’une accélération du rythme cardiaque ou de la fréquence respiratoire ou d’une diminution de la tension artérielle, chez une personne atteinte d’une infection.

Pour confirmer le diagnostic, les médecins recherchent dans la circulation sanguine la présence de bactéries (bactériémie), d’une autre infection qui pourrait être responsable d’une septicémie et d’un nombre anormal de globules blancs.

Les échantillons sanguins sont prélevés pour la mise en culture des bactéries au laboratoire (cette technique demande généralement 1 à 3 jours). Cependant, si les patients ont été traités par des antibiotiques pour l’infection initiale, les bactéries peuvent être présentes, mais ne pas proliférer lors d’une mise en culture. Quelquefois, on retire les cathéters, puis on coupe leurs extrémités pour les mettre en culture. La découverte de bactéries sur un cathéter qui est en contact avec la circulation sanguine indique la présence probable d’une bactérie dans le sang.

Pour vérifier la présence d’autres infections pouvant être à l’origine d’une septicémie, les médecins font des prélèvements de liquides biologiques ou de tissus tels qu’urine, liquide céphalorachidien, tissu au niveau de plaies ou expectorations expulsées par les poumons. Ces échantillons sont mis en culture pour y rechercher la présence de bactéries.

Des radiographies du thorax et d’autres examens d’imagerie, comme une échographie, une tomodensitométrie (TDM) et une imagerie par résonance magnétique (IRM), peuvent aussi être effectués à la recherche d’une source d’infection.

D’autres tests sont pratiqués pour mettre en évidence une insuffisance organique et d’autres complications de la septicémie. À savoir :

  • Dosages sanguins du taux d’acide lactique et d’autres déchets métaboliques, qui peuvent être élevés, numération des plaquettes (cellules contribuant à la coagulation sanguine) qui peut être basse

  • Tests sanguins ou pose d’un capteur au niveau d’un doigt (oxymétrie de pouls) afin de mesurer les taux d’oxygène dans le sang et donc d’évaluer le fonctionnement des poumons et des vaisseaux sanguins

  • Un électrocardiogramme (ECG) pour rechercher des anomalies du rythme cardiaque et donc pour vérifier si l’apport sanguin au niveau du cœur est adéquat

  • Autres tests pour déterminer l’origine du choc septique : septicémie ou autre problème

Traitement de la septicémie et du choc septique

  • Antibiotiques

  • Liquides intraveineux

  • Oxygène

  • Élimination de la source de l’infection

  • Parfois, des médicaments augmentant la tension artérielle

Les médecins traitent sans délai la septicémie et le choc septique en administrant des antibiotiques. Il n’attend pas que les résultats des analyses confirment le diagnostic, car les chances de survie sont considérablement diminuées par tout retard du traitement antibiotique. Le traitement a lieu à l’hôpital.

Les personnes présentant un choc septique ou qui sont très malades sont immédiatement admises en unité de soins intensifs afin d’y être traitées.

Antibiotiques

Lorsqu’ils choisissent les antibiotiques initiaux, les médecins prennent en compte les bactéries les plus probablement présentes, ce qui dépend du site de l’infection initiale. Par exemple, les bactéries qui provoquent une infection des voies urinaires sont généralement différentes des bactéries qui provoquent une infection cutanée. Par ailleurs, les médecins prennent en compte les bactéries les plus fréquemment impliquées dans les infections de la communauté du patient et dans leur hôpital. Deux ou trois antibiotiques sont souvent administrés conjointement pour augmenter la probabilité d’éliminer les bactéries, en particulier lorsque leur origine est inconnue. Ensuite, lorsque les résultats des tests sont disponibles, le médecin peut adapter le traitement en utilisant l’antibiotique le plus efficace contre les bactéries spécifiques à l’origine de l’infection.

Liquides intraveineux

Les personnes atteintes d’un choc septique sont placées sous perfusion intraveineuse (dans une veine) de solutés afin d’augmenter le volume de liquide dans la circulation sanguine et donc la tension artérielle. L’administration d’un volume trop faible de solutés est inefficace, mais un volume trop important peut entraîner une congestion pulmonaire sévère.

Oxygène

L’apport en oxygène se fait par un masque, des sondes nasales ou, si une sonde a été insérée dans la trachée pour faciliter la respiration, par l’intermédiaire de cette sonde (endotrachéale). Le cas échéant, un respirateur mécanique (machine qui aide l’air à entrer dans les poumons et à en sortir) est utilisé pour faciliter la respiration.

Élimination de la source de l’infection

Les abcès, s’ils sont présents, doivent être drainés. Les cathéters, les tubulures, et autres dispositifs médicaux susceptibles d’être à l’origine de l’infection sont retirés ou changés. Les tissus morts ou infectés peuvent être éliminés par un acte chirurgical.

Autres traitements

Si les solutés intraveineux n’augmentent pas la tension artérielle, le médecin peut administrer des médicaments, comme la noradrénaline (qui provoque le rétrécissement des vaisseaux sanguins), pour augmenter le flux sanguin vers le cerveau, le cœur et les autres organes. Cependant, comme ces médicaments sont susceptibles de rétrécir les vaisseaux sanguins des organes, ils diminuent parfois le flux sanguin qui traverse les organes.

Il arrive que les personnes qui souffrent de choc septique développent une hyperglycémie (taux de sucre élevé dans le sang). Comme l’hyperglycémie compromet la réponse du système immunitaire à une infection, le médecin administre de l’insuline par voie intraveineuse pour réduire la glycémie.

Des corticoïdes (comme l’hydrocortisone) peuvent être administrés par voie intraveineuse aux personnes dont la tension artérielle reste basse en dépit de l’administration de solutés et de médicaments pour augmenter la tension artérielle et de l’élimination de la source de l’infection.

Pronostic de la septicémie et du choc septique

Sans traitement, la plupart des personnes qui souffrent de choc septique meurent. Même avec un traitement, le risque de décès est significatif. En moyenne, environ 30 à 40 % des personnes atteintes de choc septique meurent. Cependant, le risque de décès varie considérablement en fonction de plusieurs facteurs, notamment la promptitude du traitement, le type de bactéries impliqué (en particulier si les bactéries sont résistantes aux antibiotiques) et l’état de santé sous-jacent de la personne.

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