L’amnésie dissociative est une amnésie (perte de mémoire) provoquée par un traumatisme ou un stress, résultant en une incapacité à se souvenir d’informations personnelles importantes.
Les personnes ont des trous de mémoire, qui peuvent s’étendre de quelques minutes à plusieurs décennies.
Le médecin diagnostique le trouble en se fondant sur les symptômes, après avoir réalisé des tests visant à exclure les autres causes possibles.
Des techniques de récupération de la mémoire, telles que l’hypnose ou des entretiens facilités par l’administration de médicaments, sont utilisées afin de combler les trous de mémoire.
La psychothérapie est nécessaire afin d’aider les personnes à gérer les expériences qui ont déclenché le trouble.
(Voir aussi Perte de mémoire.)
L’amnésie consiste en une incapacité totale ou partielle de se remémorer des expériences récentes ou éloignées dans le passé. Lorsque l’amnésie est induite par une perturbation psychologique plutôt qu’un trouble médical général, on parle d’amnésie dissociative.
Dans l’amnésie dissociative, la perte de mémoire concerne des informations qui font normalement partie de la conscience des activités routinières ou de la mémoire autobiographique :
Qui l’on est
Où l’on a été
À qui l’on a parlé
Ce que l’on a fait, dit, pensé et ressenti
Souvent, la perte de mémoire concerne des informations relatives à des événements traumatisants ou stressants, tels qu’une maltraitance durant l’enfance. Il arrive que les informations, bien qu’oubliées, continuent à influer sur le comportement. Par exemple, une femme qui a été violée dans un ascenseur peut être incapable de se souvenir des détails de l’agression, et néanmoins éviter les ascenseurs et refuser de les utiliser.
L’amnésie dissociative est probablement sous-déclarée, de sorte que des statistiques précises sur sa prévalence ne sont pas disponibles. Cependant, elle semble plus fréquente chez les femmes que chez les hommes, et affecte généralement des personnes qui ont vécu ou ont été témoins d’événements traumatiques, tels que des maltraitances physiques ou sexuelles, des viols, des guerres, des génocides, des accidents, des catastrophes naturelles ou le décès d’un être cher. Elle peut aussi résulter de préoccupations concernant de graves problèmes financiers ou d’importants conflits internes (tels que des sentiments de culpabilité concernant certaines impulsions ou actions, des problèmes interpersonnels apparemment insolubles ou des crimes commis).
L’amnésie dissociative peut persister quelque temps suite à un événement traumatique. Parfois, des personnes semblent retrouver spontanément leurs souvenirs.
À moins qu’ils ne soient confirmés par une autre personne ou que des preuves existent, on ne sait souvent pas très bien si ces souvenirs retrouvés reflètent effectivement des événements réels du passé.
Symptômes de l’amnésie dissociative
La perte de mémoire peut concerner les événements suivants :
Un ou plusieurs événements ou une période spécifique, par exemple les mois ou les années de maltraitance durant l’enfance ou les jours passés dans des combats violents (amnésie localisée)
Seulement certains aspects d’un événement ou seulement certains événements au cours d’une période donnée (amnésie sélective)
L’identité personnelle et l’histoire entière de la vie de la personne atteinte, avec parfois des compétences apprises et des informations sur le monde environnant (amnésie généralisée)
Informations d’une catégorie particulière, par exemple les informations concernant une personne donnée ou sur sa famille (amnésie systématique)
Chaque nouvel événement à mesure qu’il se produit (amnésie continue)
L’amnésie généralisée est rare. Elle est plus fréquente chez les anciens combattants, les victimes d’agression sexuelle, et les personnes en situation de stress extrême ou de conflit. Elle commence généralement de façon soudaine.
L’amnésie peut ne pas apparaître immédiatement après un événement traumatique ou stressant. Elle peut prendre des heures, des jours, voire plus avant d’apparaître.
Peu après la perte de mémoire, certaines personnes semblent confuses. Certaines sont très angoissées. D’autres sont étrangement indifférentes.
La plupart des personnes atteintes d’amnésie dissociative présentent un ou plusieurs trous de mémoire. Ceux-ci s’étendent généralement de quelques minutes à quelques heures ou jours, mais peuvent concerner plusieurs années, décennies voire toute une vie. En général, les personnes atteintes ne sont pas conscientes ou sont seulement en partie conscientes d’avoir des trous de mémoire. Elles n’en prennent conscience qu’après, lorsque leurs souvenirs réapparaissent ou qu’elles sont confrontées à la preuve de choses qu’elles ont faites mais dont elles ne se souviennent pas.
Les personnes atteintes ont des difficultés à établir et maintenir des relations personnelles.
Certaines d’entre elles ont des flashbacks, comme dans le trouble de stress post-traumatique (TSPT). Autrement dit, elles revivent des événements comme s’ils se produisaient vraiment, et elles n’ont pas conscience de leur vécu personnel ultérieur, par exemple, du fait qu’elles ont survécu au traumatisme. Les flashbacks peuvent alterner avec l’amnésie de ce qui s’est passé au cours du flashback. Certaines personnes atteintes d’amnésie dissociative développent ensuite un TSPT, en particulier lorsqu’elles prennent conscience des événements traumatiques ou stressants qui ont déclenché leur amnésie.
Les personnes peuvent aussi être atteintes de symptômes vagues, tels que la fatigue, la faiblesse, ou des problèmes de sommeil. La dépression, le suicide, et d’autres comportements autodestructeurs (tels que l’usage abusif de certaines substances et les comportements sexuels à risque) sont fréquents. Le risque de comportements suicidaires peut augmenter lorsque l’amnésie disparaît brusquement et que la personne se trouve accablée par les souvenirs traumatiques.
Dans de rares cas, il arrive que des personnes atteintes d’une forme extrême d’amnésie dissociative quittent brusquement leur domicile pendant un certain temps. Durant cette période, elles ne se souviennent que d’une partie de leur vie passée, voire elles ne se souviennent de rien, pas même de qui elles sont (leur identité). Ces épisodes portent le nom de fugues dissociatives.
Diagnostic de l’amnésie dissociative
Examen clinique, sur la base de critères spécifiques du diagnostic psychiatrique
Parfois, tests visant à exclure les autres causes possibles
Le médecin diagnostique l’amnésie dissociative à partir des symptômes de la personne :
Les personnes ne peuvent pas se souvenir d’informations personnelles importantes (habituellement liées au traumatisme ou au stress) qui ne seraient généralement pas oubliées.
Elles sont très perturbées par leurs symptômes, ou leurs symptômes les rendent incapables de fonctionner dans des situations sociales ou au travail.
Les médecins procèdent aussi à un examen clinique afin d’écarter des causes neurologiques de l’amnésie, comme la démence.
Des tests sont parfois nécessaires pour exclure d’autres causes d’amnésie. La liste des tests figure ci-dessous :
Imagerie par résonance magnétique (IRM) ou tomodensitométrie (TDM) pour exclure les tumeurs cérébrales et autres troubles cérébraux structurels, tels qu’une réduction du volume dans l’hippocampe
Électroencéphalographie (EEG) pour exclure un trouble convulsif
Analyses de sang ou d’urine à la recherche de toxines et de drogues
Un examen psychologique est également réalisé. Des tests psychologiques particuliers aident souvent le médecin à mieux caractériser et comprendre les expériences dissociatives d’une personne, et ainsi à élaborer un plan de traitement.
Traitement de l’amnésie dissociative
Un environnement favorable
Parfois, techniques de récupération de la mémoire (telles que l’hypnose)
Psychothérapie
Environnement favorable
Le médecin commence le traitement en aidant la personne à se sentir en sécurité, par exemple en l’aidant à éviter de nouveaux traumatismes. Si la personne n’a pas de raison apparente urgente de se remémorer un événement douloureux, ce traitement de soutien peut être suffisant. Les souvenirs manquants peuvent revenir progressivement. Lorsqu’un environnement favorable ne permet pas d’améliorer la situation ou lorsque le besoin de retrouver des souvenirs est urgent, les médecins peuvent avoir recours à l’hypnose ou à des entretiens facilités par des médicaments.
Techniques de récupération de la mémoire
Si les souvenirs manquants ne reviennent pas ou si le besoin de retrouver des souvenirs est impérieux, les techniques de récupération de la mémoire sont souvent efficaces. À savoir :
Hypnose
Entretiens facilités par l’administration de médicaments (entretiens menés après administration par voie intraveineuse d’un sédatif, tel qu’un barbiturique ou une benzodiazépine)
Le médecin utilise l’hypnose et les entretiens facilités par l’administration de médicaments pour réduire l’anxiété associée à la période sur laquelle porte l’amnésie et pour pénétrer ou contourner les défenses que la personne a mises en place pour se protéger du souvenir d’expériences ou de conflits douloureux.
Les médecins doivent toutefois faire attention à ne pas suggérer ce qui doit être remémoré (créant ainsi possiblement un faux souvenir) ni à causer d’anxiété extrême. Il est souvent très bouleversant de se souvenir des circonstances traumatiques qui ont stimulé la perte de mémoire.
En outre, les souvenirs remémorés grâce à ce type de techniques ne sont pas toujours précis et peuvent nécessiter la confirmation d’une autre personne ou source. Dès lors, avant d’entreprendre une hypnose ou un entretien facilité par l’administration de médicaments, le médecin informe la personne que les souvenirs récupérés par ces techniques peuvent être plus ou moins précis et doit obtenir son accord pour poursuivre.
Les médecins essaient aussi de rassurer les personnes atteintes d’amnésie dissociative quant au fait qu’ils souhaitent les aider. Les personnes qui ont été maltraitées, en particulier pendant l’enfance, se méfient parfois des thérapeutes et peuvent s’attendre à ce que le thérapeute les exploite ou les abuse, et leur impose des souvenirs inconfortables, plutôt que de les aider à retrouver de vrais souvenirs.
Combler le plus possible les trous de mémoire aide à rétablir la continuité de l’identité de la personne et à augmenter le sens de soi et le pouvoir d’action.
Psychothérapie
Une fois l’amnésie résolue, la poursuite de la psychothérapie aide la personne à :
Comprendre le traumatisme ou les conflits qui ont provoqué le trouble
Trouver des moyens de résoudre les traumatismes ou les conflits et la culpabilité qu’ils ont causés
Éviter de futurs traumatismes si possible
Revenir à un fonctionnement normal
Pronostic de l’amnésie dissociative
Parfois, la mémoire revient rapidement, comme cela peut être le cas lorsque la personne ne se trouve plus en situation traumatique ou stressante (tel que les combats). Dans d’autres cas, l’amnésie, en particulier chez les personnes atteintes de fugue dissociative, persiste longtemps. Les symptômes peuvent s’atténuer à mesure que les personnes vieillissent.
La plupart des personnes récupèrent ce qui semble être leurs souvenirs perdus et résolvent les conflits à l’origine de l’amnésie. Cependant, certaines personnes ne brisent jamais les barrières qui les empêchent de reconstituer le passé qui leur manque.
Fugue dissociative
Une fugue dissociative est un type spécifique d’amnésie dissociative qu’un médecin peut suspecter quand une personne semble confuse à propos de son identité, reste perplexe quant à son passé, ou quand des vérifications factuelles contredisent son identité nouvelle ou son absence d’identité. Dans le cadre de la fugue dissociative, la personne perd une partie ou la totalité de ses souvenirs, oublie son identité personnelle et quitte typiquement les lieux qu’elle fréquente habituellement, ainsi que sa famille et son travail. (Le mot « fugue » vient du mot latin qui signifie « fuite ».)
La fugue dissociative est une forme rare d’amnésie dissociative.
La personne souffrant de fugue dissociative peut sembler et agir normalement, mais lorsque la fugue se termine, la personne se retrouve dans une nouvelle situation sans se souvenir comment elle y est parvenue ou de ce qu’elle faisait jusqu’alors.
Le diagnostic de fugue dissociative est généralement posé de façon rétrospective, lorsqu’un médecin se penche sur les antécédents de la personne et recueille des informations qui suggèrent une vie parallèle.
Un environnement favorable et une psychothérapie peuvent aider une personne qui a vécu une fugue dissociative.
Une fugue dissociative peut durer des heures à des mois, parfois même plus longtemps. Si la fugue est brève, la personne peut simplement paraître avoir manqué quelques heures de travail ou rentrer tard chez elle. Si la fugue dure plusieurs jours voire plus, la personne peut s’éloigner beaucoup de chez elle, se forger une nouvelle identité, et débuter un nouveau travail, inconsciente des changements opérés dans sa vie.
Au cours de la fugue, la personne peut sembler normale et agir normalement ou ne paraître que légèrement confuse et n’attirer aucune attention. Toutefois, lorsque la fugue se termine, la personne se retrouve dans une nouvelle situation sans souvenir de comment elle y est parvenue ou de ce qu’elle faisait jusqu’alors. À ce stade, la personne se sent généralement honteuse et contrariée de ne pas pouvoir se souvenir de ce qui s’est passé. Certaines personnes prennent peur. Si elles se sentent confuses, elles peuvent attirer l’attention du corps médical ou des autorités judiciaires.
Une fois la fugue terminée, de nombreuses personnes se souviennent de leur identité passée et de leur vie jusqu’au début de la fugue. Pour d’autres, toutefois, les souvenirs pendront plus longtemps à revenir et le processus sera plus progressif. Certaines personnes ne se souviennent jamais de portions de leur passé. Dans de très rares cas, la personne ne se souvient de rien, ou n’a pratiquement aucun souvenir de son passé pour le restant de sa vie.
Parfois, la fugue dissociative ne peut être diagnostiquée tant que la personne n’a pas retrouvé subitement son identité antérieure et ressenti un sentiment d’angoisse en se retrouvant dans des circonstances inhabituelles. Le diagnostic de fugue dissociative est généralement posé de façon rétrospective, en réexaminant l’histoire de la personne et en recueillant des informations sur les circonstances précédant la fugue, la fugue elle-même et l’installation dans la nouvelle vie.
De nombreuses fugues semblent correspondre à l’accomplissement déguisé d’un souhait ou la seule façon permise d’échapper à une situation de détresse ou de gêne profonde. Par exemple, un cadre traversant des difficultés financières quitte sa vie chaotique de citadin pour une vie d’ouvrier agricole à la campagne.
De ce fait, la fugue dissociative est souvent prise à tort pour de la simulation (simuler des symptômes physiques ou psychologiques pour en retirer un bénéfice), car ces deux pathologies peuvent constituer une excuse pour échapper à ses responsabilités (telles qu’un mariage non acceptable), éviter de répondre de ses actes ou réduire son exposition à un danger connu, tel qu’une bataille. Cependant, contrairement à la simulation, la fugue dissociative survient de façon spontanée et n’est pas feinte. Le médecin peut généralement faire la distinction entre les deux parce que les simulateurs, la plupart du temps, exagèrent et dramatisent leurs symptômes ; et ils ont des raisons évidentes financières, juridiques, ou personnelles (par exemple, s’absenter du travail) de simuler une perte de mémoire, tandis que les personnes en fugue dissociative peuvent avoir quitté une situation personnelle difficile, mais pas de manière intentionnelle.
Traitement de la fugue dissociative
En cas de perte de mémoire sur une période très courte, il peut suffire de fournir un environnement favorable à la personne. Cela est particulièrement vrai lorsqu’il n’est pas nécessaire de récupérer la mémoire d’un événement douloureux. Si l’environnement de soutien n’est pas suffisant ou s’il est nécessaire de récupérer des souvenirs traumatiques, d’autres traitements sont nécessaires.
Lorsqu’une personne a connu une fugue dissociative, la psychothérapie, parfois associée à l’hypnose ou à des entretiens facilités par des médicaments (entretiens menés après l’administration intraveineuse d’un sédatif), peut être utilisée pour tenter d’aider la personne à se souvenir des événements de la période de fugue. Cependant, ces efforts ne sont pas toujours couronnés de succès.
Malgré tout, un psychothérapeute peut aider la personne à découvrir comment elle gère le type de situations, conflits, et émotions qui a déclenché la fugue et à trouver de meilleurs moyens de réagir dans le futur. Cette méthode peut permettre d’éviter que les fugues ne se reproduisent.
