Pneumonie associée aux respirateurs artificiels

ParSanjay Sethi, MD, University at Buffalo, Jacobs School of Medicine and Biomedical Sciences
Vérifié/Révisé févr. 2024
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La pneumonie sous ventilation assistée se développe au moins 48 heures après l'intubation endotrachéale. Les agents pathogènes les plus fréquents sont des bacilles Gram négatifs et Staphylococcus aureus; les microrganismes résistants aux antibiotiques représentent un problème important. Chez les patients ventilés, la pneumonie se manifeste habituellement par de la fièvre, une augmentation du nombre de globules blancs, une aggravation du niveau d'oxygénation et une augmentation des sécrétions trachéales qui peuvent être purulentes. Le diagnostic est suspecté sur la présentation clinique et la rx thorax et est parfois confirmé par une hémoculture positive pour le même agent pathogène trouvé dans les sécrétions respiratoires ou dans un prélèvement bronchoscopique des voies respiratoires inférieures avec coloration de Gram quantitative et cultures. Le traitement repose sur les antibiotiques. Le pronostic global est défavorable en partie du fait des facteurs de comorbidité.

(Voir aussi Revue générale des pneumonies.)

La pneumonie sous ventilation assistée est une pneumonie qui se développe au moins 48 heures après une intubation endotrachéale ou dans les 48 heures de l'extubation. la pneumonie sous ventilation assistée est un sous-ensemble des pneumonies nosocomiales qui comprend la pneumonie chez les patients hospitalisés qui ne reçoivent pas de ventilation mécanique. La pneumonie sous ventilation assistée implique souvent des agents pathogènes plus résistants et des résultats moins bons que les autres formes de pneumonie nosocomiale.

Étiologie de la pneumonie sous ventilation assistée

La cause la plus fréquente de pneumonie sous ventilation assistée est la micro-inhalation de bactéries qui colonisent l'oropharynx et les voies respiratoires supérieures chez le patient gravement malade.

Facteurs de risque

L'intubation endotrachéale est le principal facteur de risque de pneumonie sous ventilation assistée. L'intubation endotrachéale affaiblit les défenses des voies respiratoires, altère la toux et la clairance mucociliaire et favorise la micro-inhalation des sécrétions chargées en bactéries qui s'accumulent au-dessus de la partie gonflée de la sonde endotrachéale. En outre, les bactéries forment un film biologique sur et dans la sonde endotrachéale qui les protège des antibiotiques et des défenses de l'hôte. Le risque de la pneumonie sous ventilateur est au plus haut pendant les 10 premiers jours après l'intubation. Une pneumonie sous ventilation assistée est observée chez 9 à 27% des patients sous ventilation mécanique (1).

Pathogènes

Les agents pathogènes et la nature des résistances aux antibiotiques varient significativement d'un établissement de soins à un autre et peuvent varier au sein d'institutions sur de courtes périodes (p. ex., de mois en mois). Les antibiogrammes locaux au niveau institutionnel qui sont régulièrement mis à jour sont essentiels pour déterminer l'antibiothérapie empirique appropriée. En général, les agents pathogènes les plus importants sont

  • Pseudomonas aeruginosa

  • Staphylococcus aureus sensible à la méthicilline

  • S. aureus résistant à la méthicilline (SARM)

D'autres agents pathogènes entériques importants comprennent les bactéries à Gram négatif (principalement Enterobacter spp, Klebsiella pneumoniae, Escherichia coli, Serratia marcescens, Proteus spp et Acinetobacter spp).

S. aureus sensible à la méthicilline, Streptococcus pneumoniae, et Haemophilus influenzae sont le plus souvent en cause dans les pneumonies qui se développent dans les 4 à 7 jours après l'hospitalisation, alors que P. aeruginosa, SARM, et les microrganismes entériques à Gram négatif deviennent plus fréquents plus la durée de l'intubation ou de l'hospitalisation est longue.

Un traitement antibiotique IV antérieur (dans les 90 jours précédents) augmente considérablement la probabilité de résistance des microrganismes aux antibiotiques, en particulier d'infection par SARM et par Pseudomonas dans les pneumonies sous ventilateur et les pneumonies nosocomiales (2). Une infection par un microrganisme résistant augmente significativement la mortalité et la morbidité. D'autres facteurs de risque de microrganismes résistants aux antibiotiques spécifiques aux pneumonies sous ventilateur sont

  • Choc septique au moment de la pneumonie sous ventilateur

  • Syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) précédant une pneumonie sous ventilateur

  • Hospitalisation pendant ≥ 5 jours avant l'apparition de la pneumonie sous ventilateur

  • Un traitement de suppléance rénale aigu avant le début de la pneumonie sous ventilateur

Les corticostéroïdes à haute dose augmentent le risque d'infections à Legionella et à Pseudomonas. Les maladies pulmonaires suppurées chroniques telles que la mucoviscidose et la bronchectasie augmentent le risque de pathogènes à Gram négatif, dont des souches résistantes aux antibiotiques.

Références pour l'étiologie

  1. 1. Reignier J, Mercier E, Le Gouge A, et al: Effect of not monitoring residual gastric volume on risk of ventilator-associated pneumonia in adults receiving mechanical ventilation and early enteral feeding: a randomized controlled trial. JAMA 309(3):249–256, 2013. doi:10.1001/jama.2012.196377

  2. 2. Kalil AC, Metersky ML, Klompas M, et al: Management of adults with hospital-acquired and ventilator-associated pneumonia: 2016 clinical practice guidelines by the Infectious Diseases Society of America and the American Thoracic Society. Clin Infect Dis 63(5):e61–111, 2016.

Symptomatologie de la pneumonie sous ventilation assistée

La pneumonie chez le patient en phase critique et ventilé mécaniquement induit généralement plus de fièvre et une augmentation de la fréquence respiratoire ou de la fréquence cardiaque ou des modifications des paramètres de la fonction respiratoire, telles qu'une augmentation des sécrétions purulentes ou une hypoxémie aggravée.

Diagnostic de la pneumonie associée aux respirateurs artificiels

  • Rx thorax et critères cliniques (précision limitée)

  • Parfois, bronchoscopie ou hémocultures

Le diagnostic est imparfait. En pratique, la pneumonie sous ventilation assistée est souvent suspectée sur l'aspect d'un nouvel infiltrat sur une rx thorax prise lors d'un bilan diagnostique d'une nouvelle symptomatologie (p. ex., fièvre, augmentation des sécrétions, hypoxémie qui s'aggrave) ou d'une hyperleucocytose. Cependant, aucun symptôme, signe ou cliché rx n'est un critère sensible ou spécifique de diagnostic, parce que tous peuvent être provoqués par une atélectasie, une embolie pulmonaire ou un œdème du poumon et peuvent faire partie des signes cliniques du syndrome de détresse respiratoire aigu.

Les cultures semi-quantitatives et les colorations de Gram des aspirations endotrachéales, bien que ne permettant pas une identification de certitude de l'infection, sont recommandées pour guider le traitement de la pneumonie sous ventilateur. Le prélèvement bronchoscopique de sécrétions des voies respiratoires inférieures pour mise en culture quantitative donne des échantillons plus fiables mais peut différencier colonisation et infection. L'information tirée de l'échantillonnage bronchoscopique réduit l'utilisation des antibiotiques et aide à passer d'une couverture étroite antibiotique large à une plus étroite. Cependant, il n'a pas montré qu'il améliorait les résultats.

La mesure des médiateurs inflammatoires dans le liquide de lavage bronchoalvéolaire ou le sérum n'a pas été démontrée fiable pour décider de l'administration d'antibiotiques. Le seul élément d'identification fiable à la fois de la pneumonie et du microrganisme responsable est une hémoculture ou la mise en culture d'un prélèvement de liquide pleural (obtenu par thoracentèse chez un patient présentant un épanchement pleural), positive pour un agent pathogène respiratoire donné.

Les hémocultures sont également relativement spécifiques si un pathogène respiratoire est identifié mais elles sont peu sensibles.

Traitement de la pneumonie sous ventilation assistée

  • Antibiotiques choisis empiriquement contre les microrganismes résistants

Si une pneumonie sous ventilation assistée est suspectée, le traitement repose sur les antibiotiques, choisis empiriquement en fonction de

  • Profils de sensibilité locaux

  • Facteurs de risque du patient d'agents pathogènes résistants aux antibiotiques

  • Microbiologie antérieure de prélèvements de patients montrant une colonisation par des agents pathogènes résistants aux antibiotiques

Dans les lignes directrices de 2007 de l'Infectious Diseases Society of America et de l'American Thoracic Society, on utilisait des critères très larges pour définir la population à risque d'infection par des agents pathogènes résistants aux antibiotiques, ce qui entraînait que la majorité des patients qui avaient une pneumonie nosocomiale nécessitaient une antibiothérapie à large spectre pour le SARM et Pseudomonas résistant. Les lignes directrices de 2016 de l'Infectious Diseases Society of America et de l'American Thoracic Society mettent l'accent sur l'utilisation d'antibiotiques empiriques à spectre plus étroit lorsque cela est possible (1). Le traitement empirique de la pneumonie sous ventilateur sans facteurs de risque de microrganismes résistants aux antibiotiques, à mortalité élevée (ventilation mécanique pour pneumonie ou choc septique), survenant dans un établissement où l'incidence du SARM est < 10 à 20% (d'isolats de S. aureus) avec une résistance aux antibiotiques antipseudomonaux empiriques couramment utilisés de P. aeruginosa< 10%, pourrait comprendre l'un des traitements suivants:

  • Pipéracilline/tazobactam

  • Céfépime

  • Lévofloxacine

  • Imipénème

  • Méropénème

Dans les environnements de traitement où les taux de SARM sont > 10 à 20%, il faut ajouter de la vancomycine ou du linézolide. Chez les patients à haut risque de mortalité, ou présentant des facteurs de risque pour les microrganismes résistants aux antibiotiques, ou en l'absence d'antibiogrammes locaux fiables, les recommandations comprennent une triple thérapie par 2 médicaments ayant une activité contre Pseudomonas et 1 médicament ayant une activité contre le SARM:

  • Une céphalosporine antipseudomonas (céfépime ou ceftazidime) ou un carbapénème antipseudomonas (imipénème, méropénème) ou une bêta-lactamine/inhibiteur de bêta-lactamase (pipéracilline/tazobactam)

  • Une fluoroquinolone antipseudomonale (ciprofloxacine ou lévofloxacine) ou un aminoside (amikacine, gentamicine, tobramycine)

  • Linézolide ou vancomycine

Alors que la prise incontrôlée d'antibiotiques est la principale cause de développement de la résistance antimicrobienne, le caractère approprié de l'antibiothérapie empirique initiale est un déterminant majeur des résultats favorables. Par conséquent, le traitement doit commencer par l'utilisation initiale de médicaments à large spectre. Les patients doivent être réévalués 2 à 3 jours après le début du traitement, et les antibiotiques sont ensuite modifiés selon le spectre le plus étroit possible en fonction de la réponse clinique et des résultats des cultures et des antibiogrammes.

Référence pour le traitement

  1. 1. Kalil AC, Metersky ML, Klompas M, et al: Management of adults with hospital-acquired and ventilator-associated pneumonia: 2016 clinical practice guidelines by the Infectious Diseases Society of America and the American Thoracic Society. Clin Infect Dis 63(5):e61–111, 2016.

Pronostic de la pneumonie sous ventilation assistée

La mortalité de la pneumonie sous ventilation assistée est élevée malgré la disponibilité d'antibiotiques efficaces. Cependant, tous les décès ne sont pas imputables à la pneumonie elle-même; la plupart des décès sont liés à une comorbidité. L'adéquation de la thérapie antimicrobienne initiale améliore nettement le pronostic. Une infection par des bactéries résistantes aux antibiotiques aggrave le pronostic.

Prévention de la pneumonie sous ventilation assistée

Il existe un certain nombre de mesures qui peuvent permettre de prévenir la pneumonie sous ventilation assistée. La position mi-allongée ou debout réduit le risque d'inhalation et de pneumonie par rapport à la position couchée et représente la méthode préventive la plus efficace. Une ventilation non invasive par ventilation en pression positive continue ou ventilation à deux niveaux de pression expiratoire positive ([bilevel positive airway pressure], BPAP) bloque le passage au travers des défenses des voies respiratoires qui se produit lors d'une intubation endotrachéale et élimine la nécessité de l'intubation chez certains patients, et a été associée à une incidence réduite de pneumonie sous ventilation assistée.

L'aspiration continue des sécrétions sous-glottiques via une sonde endotrachéale spécialement conçue reliée à un dispositif d'aspiration réduit le risque d'inhalation et l'incidence de la pneumonie sous ventilateur; cependant, les résultats cliniques globaux ne sont pas modifiés. Les sondes endotrachéales argentées réduisent la formation du biofilm et l'incidence des pneumonies sous ventilation assistée, cependant, les résultats cliniques globaux ne sont pas modifiés.

La décontamination sélective de l'oropharynx (par l'utilisation topique de gentamicine, de colistine et de chlorhexidine, de crème à la vancomycine, ou de leur association) ou de la totalité du tube digestif (par l'utilisation de polymyxine B, d'un aminoside ou d'une quinolone et de nystatine ou d'amphotéricine B) est controversée en raison de préoccupations au sujet de souches résistantes et parce que la décontamination, même si elle diminue l'incidence des pneumonies sous ventilateur, n'a pas démontré qu'elle diminuait la mortalité.

Les mises en culture à visée préventive et le changement systématique des ventilateurs ou des sondes endotrachéales n'ont pas montré de diminution de la fréquence des pneumonies sous ventilateur artificiel.

Points clés

  • La pneumonie sous ventilation assistée est une pneumonie qui se développe au moins 48 heures après l'intubation endotrachéale.

  • Les pathogènes probables diffèrent de ceux des pneumonies contractées en ville et souvent nécessitent une antibiothérapie empirique initiale active contre les microrganismes résistants aux antibiotiques.

  • Le diagnostic est difficile, la culture d'un agent pathogène potentiel à partir du liquide pleural ou du sang étant le signe le plus spécifique.

  • Réévaluer les patients 2-3 jours après le début du traitement, et modifier les antibiotiques en fonction des données de la culture et des données cliniques disponibles.

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