(Voir aussi Principes généraux sur les intoxications.)
L'ingestion d'hydrocarbures, tels que des distillats de pétrole (p. ex., essence, kérosène, huile minérale, pétrole lampant, white-spirit utilisé pour diluer les peintures), entraîne des effets systémiques minimes, mais peut entraîner une pneumopathie d'inhalation sévère. Le potentiel toxique dépend principalement de la viscosité, mesurée en secondes universelles Saybolt (SSU). Les hydrocarbures liquides de faible viscosité (SSU < 60), tels que l'essence et l'huile minérale, peuvent rapidement se propager sur de grandes surfaces et sont plus à risque de provoquer une pneumopathie d'inhalation que les hydrocarbures ayant une SSU > 60, tels que le goudron. S'ils sont ingérés en grandes quantités, les hydrocarbures sont absorbés par voie systémique et entraînent une toxicité du système nerveux central ou hépatique, qui est plus probable avec les hydrocarbures halogénés (p. ex., tétrachlorure de carbone, trichloréthylène).
L'inhalation volontaire d'hydrocarbures halogénés (p. ex., colles, peintures, solvants, sprays de nettoyage, essence, fluorocarbones utilisés comme réfrigérant ou gaz propulseur dans les aérosols, voir Solvants volatils), appelée sniffage, est fréquente chez les adolescents. Elle peut entraîner une euphorie et une altération de l'état mental et peut sensibiliser le cœur aux catécholamines endogènes. Il peut en résulter des troubles du rythme ventriculaires mortels; ils se produisent habituellement sans palpitations préalables et sans autre symptôme annonciateur, souvent lorsque le patient est surpris ou poursuivi.
L'ingestion chronique de toluène peut être toxique pour le système nerveux central à long terme, caractérisée par une destruction périventriculaire, occipitale et thalamique.
Symptomatologie
Après l'ingestion, même d'une infime quantité d'un hydrocarbure liquide, le patient tousse, s'étouffe et peut vomir. Le jeune enfant peut présenter une cyanose, retenir son souffle et présenter une toux persistante. L'enfant plus âgé et l'adulte peuvent se plaindre de brûlures dans l'estomac.
La pneumopathie d'inhalation est responsable d'une hypoxie et de détresse respiratoire. La symptomatologie de la pneumonie peut apparaître quelques heures avant que les infiltrats ne soient visibles à la rx. Une absorption systémique significative, en particulier d'un hydrocarbure halogéné, peut entraîner des troubles de la conscience, un coma et des convulsions. Une pneumopathie non fatale évolue habituellement favorablement au bout de près de 1 semaine; l'ingestion de l'huile minérale ou lampante se résout habituellement en 5 à 6 semaines.
Les troubles du rythme cardiaque se produisent habituellement avant la prise en charge et sont peu susceptibles de récidiver après la présentation, sauf si le patient est excessivement agité.
Diagnostic
Si le patient est trop obnubilé pour fournir un historique, l'exposition à des hydrocarbures peut être suspectée si son haleine ou ses vêtements ont une odeur caractéristique ou si on trouve un récipient près de lui. Les résidus de peinture sur les mains ou autour de la bouche peuvent évoquer qu'il a récemment sniffé de la peinture.
Le diagnostic de la pneumopathie d'inhalation est posé sur la symptomatologie, ainsi que sur la rx thorax et l'oxymétrie, qui sont effectuées environ 6 heures après l'ingestion ou plus tôt en cas de symptômes sévères. En cas de suspicion de défaillance respiratoire, il faut doser les gaz du sang artériel.
L'atteinte du système nerveux central est diagnostiquée par un examen neurologique et une IRM.
Traitement
Tout vêtement contaminé est enlevé et la peau est lavée. (ATTENTION: le lavage gastrique, qui augmente le risque d'inhalation, est contre-indiqué.) L'administration de charbon n'est pas recommandée. Le patient ne présentant pas de pneumopathie d'inhalation ou d'autres symptômes au bout de 4 à 6 heures peut rentrer chez lui. Le patient symptomatique est hospitalisé et traité par des mesures de support; les antibiotiques et les corticostéroïdes ne sont pas indiqués.