Charbon (anthrax)

ParLarry M. Bush, MD, FACP, Charles E. Schmidt College of Medicine, Florida Atlantic University;
Maria T. Vazquez-Pertejo, MD, FACP, Wellington Regional Medical Center
Reviewed ByBrenda L. Tesini, MD, University of Rochester School of Medicine and Dentistry
Vérifié/Révisé Modifié sept. 2025
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Le charbon (anthrax) est dû à Bacillus anthracis, un bacille gram-positif, qui est un microrganisme anaérobie facultatif encapsulé producteur de toxines. Le charbon (anthrax), une maladie souvent mortelle chez les animaux, est transmis à l'homme par contact avec des animaux infectés ou des produits animaux. Chez l'homme, l'infection est habituellement contractée via la peau. L'infection par inhalation est moins fréquente; les infections des voies oropharyngées et gastro-intestinales et des méninges sont rares. Dans les infections par inhalation et les infections gastro-intestinales, des symptômes locaux non spécifiques sont habituellement suivis en quelques jours d'atteintes généralisées sévères, d'un état de choc et souvent de la mort. Le traitement empirique repose sur les fluoroquinolones ou la doxycycline. Un vaccin est disponible.

Étiologie du charbon (anthrax)

Le charbon (anthrax) est une maladie importante chez les animaux domestiques, survenant chez la chèvre, les bovins, le mouton et le cheval; il existe également chez les animaux sauvages, tels que l'hippopotame, l'éléphant et le buffle du Cap.

Le charbon est enzootique (une maladie qui affecte régulièrement les animaux dans une zone particulière) mais non endémique aux États-Unis. Par conséquent, les vétérinaires recommandent la vaccination annuelle du bétail dans les zones où les animaux ont été atteints de charbon par le passé. Par conséquent, il est rare chez l'homme aux États-Unis (1). L'anthrax survient principalement dans les pays qui n'interdisent pas l'exposition industrielle ou agricole aux animaux ou à leurs produits infectés (p. ex., peaux, carcasses, poils). (Voir aussi Anthrax in Animals.)

Cependant, l'utilisation potentielle du charbon (anthrax) comme arme biologique est source de crainte vis-à-vis de ce pathogène. Les spores ont été préparées sous une forme de poudre très fine et ont été adaptées comme arme pour être utilisées comme agents de guerre et de bioterrorisme (2); lors des attaques bioterroristes au charbon de 2001, les spores ont été propagées dans des enveloppes par l'United States Postal Service (3).

Le charbon est considéré comme une maladie à déclaration obligatoire. Une notification immédiate aux services de santé local doit être transmise, et le département de santé local doit ensuite informer les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) lorsque la source de l'infection est inconnue, est suspectée d'être une exposition liée au bioterrorisme, ou lorsque le cas implique une maladie grave résultant d'un charbon d'origine naturelle (4).

Références pour l'étiologie

  1. 1. Centers for Disease Control and Prevention (CDC): About Anthrax. April 2, 2025. Accessed April 22, 2025.

  2. 2. Bush LM, Abrams BH, Beall A, Johnson CC. Index case of fatal inhalational anthrax due to bioterrorism in the United States. N Engl J Med. 2001;345(22):1607-1610. doi:10.1056/NEJMoa012948

  3. 3. Centers for Disease Control and Prevention: Bioterrorism and Anthrax: The Threat. April 3, 2025. Accessed August 1, 2025.

  4. 4. CDC: Anthrax Case Definition, Reporting, and Surveillance. December 3, 2024. Accessed April 22, 2025.

Physiopathologie du charbon (anthrax)

Bacillus anthracis forme des spores en situations défavorables à la croissance (p. ex., environnement sec). Les spores résistent à la destruction et peuvent rester viables dans le sol, la laine et les poils d'animaux et reste caché pendant des décennies. Les spores germent et commencent à se multiplier rapidement lorsqu'elles pénètrent dans un environnement riche en acides aminés et en glucose (p. ex., dans les tissus et le sang).

L'infection humaine peut être contractée par les voies suivantes:

  • Contact cutané (le plus fréquent)

  • Ingestion

  • Inhalation

  • Injection

L'infection cutanée est la forme la plus fréquente et représente > 95% des cas (1). Elle est habituellement contractée par contact avec des animaux infectés, des produits animaux contaminés par des spores ou des sols contenant des spores. Les plaies ouvertes ou les abrasions augmentent la sensibilité à l'infection qui peut néanmoins survenir même lorsque la peau est intacte. Le charbon cutané n'est généralement pas contagieux, mais, dans de très rares cas, l'infection cutanée peut être transmise de personne à personne par contact direct ou par des fomites (p. ex., serviettes, literie partagée).

Une infection gastro-intestinale (y compris oropharyngée) (anthrax par ingestion) peut survenir après ingestion de viande mal cuisinée contenant des formes végétatives du microrganisme, habituellement lorsqu'une lésion de la muqueuse pharyngée ou intestinale favorise l'invasion (1). L'ingestion d'anthrax peut provoquer des lésions de la cavité buccale juqu'au caecum. La toxine libérée provoque des ulcères hémorragiques et nécrotiques dans la lumière gastro-intestinale et une lymphadénite mésentérique qui peut induire une hémorragie, une occlusion ou une perforation intestinale. Le charbon gastro-intestinal n'est pas transmis de personne à personne.

L'infection pulmonaire (le charbon [anthrax] par inhalation), provoqué par l'inhalation de spores, est presque toujours due à une exposition professionnelle à des produits d'origine animale contaminés (p. ex., peaux animales) et est souvent mortelle. Un acte de bioterrorisme manifeste ou occulte doit être envisagé chaque fois que le charbon par inhalation est diagnostiqué ou suspecté. Le charbon (anthrax) par inhalation n'est pas transmis de manière interhumaine.

Le charbon par injection est rare. On suspecte qu'il résulte de l'usage récréatif d'héroïne contaminée par des spores de B. anthracis ou du partage des aiguilles. Il conduit à des infections graves des tissus mous, incluant celles compliquées par une septicémie et une infection systémique disséminée. Aucun cas n'a été rapporté chez les personnes qui ne reçoivent pas d'héroïne par injection.

Le charbon du soudeur est une forme rare qui a été observée chez plusieurs personnes qui étaient soudeurs ou métallurgistes (2). Il est généralement contracté par inhalation et est caractérisé par une pneumonie professionnelle causée par des bactéries du groupe B. cereus qui produisent la toxine charbonneuse.

Après avoir pénétré dans le corps, les spores germent dans les macrophages, qui migrent dans les ganglions lymphatiques régionaux où les bactéries se multiplient. En cas de charbon (anthrax) d'inhalation, les spores se déposent dans des espaces alvéolaires, où elles sont ingérées par les macrophages, qui migrent dans les ganglions lymphatiques médiastinaux, entraînant habituellement une médiastinite hémorragique.

Une bactériémie peut survenir dans toutes les formes de charbon (anthrax) et est observée dans presque tous les cas mortels; une atteinte méningée est fréquente.

Facteurs de virulence

La virulence de B. anthracis est due à sa:

  • Capsule antiphagocytaire extracellulaire

  • Toxines (facteurs)

  • Capacité de réplication rapide

Les toxines prédominantes sont la toxine œdémateuse et la toxine mortelle. Une protéine qui se lie aux cellules, appelée antigène protecteur (PA), se lie aux cellules cibles et favorise l'entrée cellulaire de la toxine œdémateuse et de la toxine mortelle. La toxine œdémateuse est à l'origine d'importants œdèmes locaux. La toxine mortelle déclenche une libération massive de cytokines par les macrophages, responsable de la mort subite fréquente en cas d'infections charbonneuses (anthrax). La toxine létale est aussi supposée causer l'apoptose des cellules endothéliales dans le système vasculaire et contribuer à l'hémorragie. La capsule antiphagocytaire d'acide poly-D-gamma-glutamique de la bactérie, codée sur le plasmide pX02, aide à protéger contre la phagocytose.

Dans le charbon du soudeur, les spores de certaines espèces de B cereus contiennent des gènes de virulence pXO1, qui sont responsables de la production des toxines du charbon.

La réplication rapide de B. anthracis et B. cereus contribue significativement à leur virulence. La charge bactérienne élevée résultant de la multiplication rapide peut rapidement submerger les défenses immunitaires de l'hôte.

Références pour la physiopathologie

  1. 1. Bower WA, Yu Y, Person MK, et al. CDC Guidelines for the Prevention and Treatment of Anthrax, 2023. MMWR Recomm Rep. 2023;72(6):1-47. Published 2023 Nov 17. doi:10.15585/mmwr.rr7206a1

  2. 2. de Perio MA, Hendricks KA, Dowell CH, et al. Welder's Anthrax: A Review of an Occupational Disease. Pathogens. 2022;11(4):402. doi:10.3390/pathogens11040402

Symptomatologie de l'anthrax

La plupart des patients qui présentent un charbon (anthrax) se présentent dans les 1 à 7 jours suivant l'exposition, mais dans le cas du charbon (anthrax) par inhalation, la période d'incubation peut aller jusqu'à 60 jours ou plus, si la quantité exposée de spores est très faible.

La forme cutanée du charbon (anthrax) débute par une papule rouge-brun, indolore, prurigineuse, apparaissant entre 1 et 12 jours après l'exposition aux spores infectieuses (1). La papule augmente de volume et est entourée d'une zone d'érythème dure et d'un œdème important. On observe une vésiculation et une induration. Une ulcération centrale apparaît ensuite, avec exsudat sérohématique et formation d'une escarre noire (la pustule maligne). Une adénopathie locale est fréquente et s'accompagne parfois d'une sensation de malaise, de myalgies, de céphalées, de fièvre, de nausées et de vomissements. Plusieurs semaines peuvent être nécessaires pour que la blessure guérisse et que l'œdème disparaisse.

Le charbon (anthrax) gastro-intestinal (par ingestion) se présente sous des formes de gravités variables, d'asymptomatiques à fatales. Il se développe habituellement 1 à 7 jours après avoir mangé de la viande contaminée. Une fièvre, des nausées, des vomissements, des douleurs abdominales et une diarrhée hémorragique sont fréquentes. Une ascite peut être présente. Une nécrose intestinale et une septicémie avec choc toxique létal peuvent s'ensuivre. Le charbon (anthrax) oropharyngé se manifeste sous la forme de lésions œdémateuses dont le centre est ulcéré et nécrotique situées sur l'amygdale, la paroi postérieure du pharynx ou le palais dur. L'œdème des tissus mous au niveau du cou est important et les ganglions lymphatiques cervicaux sont augmentés de volume. Les symptômes incluent une voix rauque, des maux de gorge, de la fièvre et une dysphagie. Une obstruction des voies respiratoires peut survenir.

Le charbon par inhalation a la période d'incubation la plus longue de tous les sous-types d'infections charbonneuses (jusqu'à 2 mois). Il commence insidieusement comme une maladie pseudo-grippale, et se développe au cours de la semaine suivant l'exposition. En quelques jours, la fièvre s'aggrave et une douleur thoracique et une grave détresse respiratoire se développent, suivies d'une cyanose, d'un choc et d'un coma. Une importante lymphadénite nécrosante hémorragique se développe et s'étend aux structures médiastinales adjacentes. On observe un transsudat sérohématique accompagné d'un œdème du poumon et d'épanchement pleural. On n'observe aucune bronchopneumonie caractéristique. Une méningo-encéphalite hémorragique ou des symptômes de charbon par ingestion peuvent se développer.

Le charbon du soudeur est caractérisé par de fortes fièvres et des symptômes pulmonaires, incluant une pneumonie grave marquée par une détresse respiratoire rapide, une toux persistante, et des douleurs thoraciques. Lorsqu'une atteinte parenchymateuse significative survient, les patients peuvent aussi avoir une dyspnée et une hypoxie, nécessitant une ventilation mécanique. Dans les cas graves, une infection systémique et une septicémie peuvent se développer, conduisant à des décès.

Référence pour la symptomatologie

  1. 1. Stevens DL, Bisno AL, Chambers HF, et al: Practice guidelines for the diagnosis and management of skin and soft tissue infections: 2014 update by the Infectious Diseases Society of America. Clin Infect Dis 59(2):e10-e52, 2014. doi:10.1093/cid/ciu444

Diagnostic du charbon (anthrax)

  • Coloration de Gram et culture

  • Examen en immunofluorescence directe

  • PCR (Polymerase chain reaction)

  • Test de la toxine du facteur létal du charbon (anthrax)

  • Parfois, des tests pour infection localisée, comme l'imagerie (radiographies thoraciques ou TDM pour le charbon par inhalation) ou la ponction lombaire (pour le charbon méningé), sont nécessaires.

L'anamnèse portant sur les activités professionnelles et la notion d'exposition sont importantes. Le charbon doit être évoqué dans le diagnostic différentiel chez les voyageurs qui ont des fièvres inexpliquées ou de nouvelles lésions cutanées qui reviennent de zones d'endémie du charbon.

Des cultures et une coloration de Gram des prélèvements provenant de sites cliniquement identifiés, y compris des lésions cutanées ou muqueuses, du sang, du liquide pleural, du liquide céphalorachidien, du liquide d'ascite ou des selles, doivent être effectués. Un examen et une coloration de Gram de l'expectoration sont peu susceptibles d'identifier une inhalation par charbon (anthrax), en raison de l'absence fréquente de la maladie au niveau des voies respiratoires.

Un test par PCR et des méthodes immunohistochimiques (p. ex., test d'immunofluorescence directe) peuvent aider à établir un diagnostic plus rapide.

Le test du facteur létal du charbon implique la détection et la quantification de la toxine facteur létal (LF) produite par Bacillus anthracis, typiquement par des dosages basés sur la spectrométrie de masse qui mesurent soit sa quantité soit sa fonction (c'est-à-dire, l'activité enzymatique de la toxine). L'évaluation de la toxine LF est hautement spécifique et un outil diagnostique rapide (1).

Un test ELISA (enzyme-linked immunosorbent assay) peut détecter les anticorps dans le sérum, mais la confirmation nécessite une multiplication par 4 des titres des anticorps entre les prélèvements de phase aiguë et de convalescence.

Un prélèvement nasal par écouvillon pour déceler des spores chez le patient potentiellement exposé au charbon (anthrax) par inhalation n'est pas recommandé, car la valeur prédictive négative est inconnue. Bien qu'une culture positive sur écouvillon nasal indique une exposition, un écouvillon nasal négatif ne signifie pas que l'exposition n'a pas eu lieu.

Bacillus anthracis
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De bacilles Gram positifs caractéristiques de B. anthracis sont montrés.

Image courtoisie de the Public Health Image Library of the Centers for Disease Control and Prevention.

Pièges à éviter

  • Un examen et une coloration de Gram de l'expectoration sont peu susceptibles d'identifier une inhalation par charbon (anthrax), en raison de l'absence fréquente de la maladie au niveau des voies respiratoires.

Une radiographie de thorax (ou une TDM) doit être effectuée si des symptômes pulmonaires sont présents. Elle montre habituellement un élargissement du médiastin (du fait d'une augmentation de volume des ganglions lymphatiques hémorragiques) et un épanchement pleural. Les infiltrats pulmonaires sont peu fréquents.

Charbon (anthrax) (inhalation)
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Les signes typiques du charbon (anthrax) par inhalation sur la radiographie thoracique comprennent un médiastin élargi dû à une lymphadénite médiastinale nécrosante hémorragique et des épanchements pleuraux bilatéraux. Les infiltrats pulmonaires sont peu fréquents.

Image courtoisie de the Public Health Image Library of the Centers for Disease Control and Prevention.

Il faut effectuer une ponction lombaire si les patients présentent des signes méningés ou une modification du statut psychique. Si une ponction lombaire ne peut être pratiquée, une imagerie du système nerveux central par TDM avec contraste ou IRM avec contraste doit être effectuée à la place afin de documenter le rehaussement méningé caractéristique de la méningite et d'identifier les lésions parenchymateuses hémorragiques caractéristiques de la méningo-encéphalite charbonneuse.

Le département de santé de l'État ou les services de santé locaux doivent être informés de tout cas possible de charbon et apporteront leur aide pour les tests diagnostiques (2). Les échantillons doivent être manipulés, emballés et expédiés de manière appropriée afin d'éviter une exposition accidentelle à la maladie du charbon.

Références pour le diagnostic

  1. 1. Boyer AE, Quinn CP, Woolfitt AR, et al. Detection and quantification of anthrax lethal factor in serum by mass spectrometry. Anal Chem 2007;79(22):8463-8470. doi:10.1021/ac701741s

  2. 2. Centers for Disease Control and Prevention: Health Department Directories. May 15, 2024. Accessed July 15, 2025.

Traitement du charbon (anthrax)

  • Antibiotiques

  • Autres médicaments

  • Drainage du liquide pleural

Si le traitement du charbon (anthrax) est retardé (habituellement parce que le diagnostic est manqué), le risque de décès augmente est accru. Un traitement antibiotique empirique doit être initié immédiatement et un suivi des résultats de sensibilité aux antibiotiques (antibiogramme) est nécessaire pour ajuster le choix de l'agent si besoin. Les glucocorticoïdes, les anticorps monoclonaux et les IVIG sont des traitements adjuvants qui peuvent améliorer les résultats cliniques.

Antibiotiques

Charbon (anthrax) cutané

Le charbon cutané sans œdème important, sans symptômes systémiques ou de suspicion de méningite est traité par un seul antibiotique pendant 7 à 10 jours. En cas de risque d'exposition par inhalation, les antibiotiques doivent être poursuivis pendant 60 jours pour compléter la prophylaxie post-exposition (1). Les suivants sont des agents empiriques de première ligne:

  • Ciprofloxacine

  • Lévofloxacine

  • Minocycline

  • Doxycycline

L'amoxicilline ou la pénicilline V peuvent être utilisées si la souche est sensible à la pénicilline.

La mortalité est rare sous traitement, mais la lésion cutanée peut évoluer en escarre.

Les femmes enceintes ou allaitantes et les enfants doivent tout de même recevoir un agent de traitement de première ligne, même si ces agents sont par ailleurs généralement contre-indiqués. En raison du besoin critique d'utiliser les agents antimicrobiens les plus efficaces, l'évitement habituel des quinolones et des tétracyclines chez les enfants et pendant la grossesse est surmonté. Une fois le profil de sensibilité de la souche d'anthrax déterminé et l'amélioration clinique démontrée, des modifications du régime peuvent être apportées pour diminuer la toxicité. L'ordre décroissant de préférence est la doxycycline, la ciprofloxacine, et la lévofloxacine, et la minocycline.

Anthrax par inhalation et autres formes d'anthrax

Le charbon (anthrax) par inhalation et les autres formes d'anthrax, dont l'anthrax cutané avec œdème important ou des symptômes systémiques, nécessitent un traitement initial par 3 antibiotiques. Le traitement antibiotique doit comprendre ≥ 2 antibiotiques de différentes classes d'antibiotiques à activité bactéricide et ≥ 1 doit être un inhibiteur de la synthèse des protéines ou de l'ARN, qui peut bloquer la production de la toxine. Si la souche de B. anthracis est sensible à la pénicilline, la pénicilline G est considérée comme équivalente à une fluoroquinolone.

Le traitement doit être administré par voie intraveineuse pendant ≥ 2 semaines ou jusqu'à ce que le patient soit cliniquement stable, en adoptant la période la plus longue des deux. Une fois que le traitement d'association IV terminé, le traitement doit être poursuivi avec un seul antibiotique oral administré pendant 60 jours pour éviter la rechute résultant de spores non germées dans les poumons.

Les antibiotiques de première intention appropriés avec activité bactéricide comprennent :

  • Une fluoroquinolone (ciprofloxacine ou lévofloxacine)

  • Un carbapénème (méropénème ou imipénème/cilastatine)

  • Pour les souches sensibles à la pénicilline, pénicilline G ou ampicilline

Les antibiotiques de première intention appropriés qui inhibent la synthèse des protéines comprennent la minocycline, la doxycycline ou la clindamycine.

L'inhibiteur de synthèse d'ARN recommandé est la rifampicine.

En cas de suspicion de méningite, le méropénème doit être utilisé associé à d'autres antibiotiques car il pénètre bien dans le système nerveux central. Si le méropénème n'est pas disponible, l'imipénème/cilastatine est une alternative équivalente.

Autres médicaments

Les glucocorticoides peuvent être utiles pour traiter une méningite ou un œdème sévère du médiastin, mais leur efficacité n'a pas été suffisamment évaluée.

Le raxibacumab et l'obiltoxaximab sont des anticorps monoclonaux qui agissent en empêchant la liaison de l'antigène protecteur de la toxine de l'anthrax à ses récepteurs dans les cellules hôtes, bloquant ainsi les effets délétères de la toxine et doivent être utilisés lorsqu'ils sont disponibles en association avec des antibiotiques pour traiter l'anthrax par inhalation (2). Ces anticorps monoclonaux ont prouvé leur efficacité dans des modèles animaux de charbon par inhalation, en particulier lorsqu'il est administré précocement.

Les immunoglobulines humaines de l'anthrax IV préparées à partir du plasma de donneurs qui ont été vaccinés contre l'anthrax peuvent être utilisées en association avec des antibiotiques pour traiter l'anthrax par inhalation si les anticorps monoclonaux ne sont pas disponibles.

Résistance médicamenteuse

La résistance aux médicaments est une préoccupation. Bien que normalement sensible à la pénicilline, B. anthracis produit des bêta-lactamases inductibles (1), si bien qu'une monothérapie par pénicilline ou une céphalosporine n'est pas généralement recommandée.

Drainage du liquide pleural

Les patients atteints d'anthrax par inhalation nécessitent des soins de soutien et parfois une ventilation mécanique. Un drainage rapide et continu du liquide pleural par un drain thoracique est essentiel.

Références pour le traitement

  1. 1. Bower WA, Yu Y, Person MK, et al. CDC Guidelines for the Prevention and Treatment of Anthrax, 2023 [published correction appears in MMWR Morb Mortal Wkly Rep. 2024 Aug 08;73(31):689. doi: 10.15585/mmwr.mm7331a4]. MMWR Recomm Rep 2023;72(6):1-47. Published 2023 Nov 17. doi:10.15585/mmwr.rr7206a1

  2. 2. Slay RM, Cook R, Hendricks K, Boucher D, Merchlinsky M. Pre- and Postlicensure Animal Efficacy Studies Comparing Anthrax Antitoxins. Clin Infect Dis. 2022;75(Suppl 3):S441-S450. doi:10.1093/cid/ciac593

Pronostic du charbon (anthrax)

Les taux de mortalité approximatifs dans le charbon (anthrax) non traité varient suivant le type d'infection (1, 2, 3, 4) :

  • Charbon (anthrax) par inhalation et méningé: 90%

  • Charbon (anthrax) cutané: 20%

  • Charbon (anthrax) gastro-intestinal: 40%

  • Charbon (anthrax) oropharyngien: 12 à 50%

  • Anthrax par injection: 30%

  • Sidérose pulmonaire (Anthrax) du soudeur: > 50%

Grâce à un diagnostic, un traitement et à des soins intensifs précoces, dont une ventilation mécanique, une réanimation hydroélectrolytique et des vasopresseurs, la mortalité de l'anthrax par inhalation peut être réduite. La mortalité des soudeurs est élevée en raison de la lésion pulmonaire chronique associée à l'exposition prolongée aux vapeurs métalliques et aux hautes températures.

Références pour le pronostic

  1. 1. Person MK, Cook R, Bradley JS, et al: Systematic review of hospital treatment outcomes for naturally acquired and bioterrorism-related anthrax, 1880-2018. Clin Infect Dis 75(Suppl 3):S392–S401, 2022. doi: 10.1093/cid/ciac536

  2. 2. U.S. Food and Drug Administration: Vaccines: Anthrax. July 21, 2023. Accessed July 15, 2025.

  3. 3. Grunow R, Verbeek L, Jacob D, et al: Injection anthrax--a new outbreak in heroin users. Dtsch Arztebl Int 109(49):843–848, 2012. doi:10.3238/arztebl.2012.0843

  4. 4. Dawson P, Schrodt CA, Feldmann K, et al: Notes from the Field: Fatal Anthrax Pneumonia in Welders and Other Metalworkers Caused by Bacillus cereus Group Bacteria Containing Anthrax Toxin Genes - U.S. Gulf Coast States, 1994-2020. MMWR Morb Mortal Wkly Rep 70(41):1453–1454, 2021. doi:10.15585/mmwr.mm7041a4

Prévention de l'anthrax

L'anthrax cutané peut entraîner une immunité acquise; les infections subséquentes sont rarement signalées et tendent à être plus légères, ce qui implique un certain degré d'immunité acquise. L'anthrax par inhalation peut conférer une certaine protection contre une future infection à l'anthrax chez les patients qui survivent (1), mais cette idée est principalement soutenue par des preuves anecdotiques du développement d'une immunité humorale, reposant sur l'observation que les réinfections sont moins sévères.

Un vaccin contre l'anthrax, composé d'un filtrat de culture acellulaire contenant une protéine protectrice de l'antigène, est disponible pour la prophylaxie pré-exposition chez les adultes âgés de 18 à 65 ans à haut risque (p. ex., militaires, vétérinaires, techniciens de laboratoire, employés du textile traitant des poils de chèvre importés, employés manipulant des animaux ou des produits animaux, voyageant dans certaines parties du monde et soudant ou travaillant des métaux). Le vaccin ne contient aucune bactérie morte ou vivante et est administré en série intramusculaire de 5 doses (0,5 mL) à 0 et 4 semaines, suivie d'injections par la suite à 6, 12 et 18 mois, ainsi que de rappels annuels. Un vaccin vétérinaire est également disponible.

Une vaccination annuelle répétée avant l'exposition est nécessaire pour assurer une protection. Le vaccin contre l'anthrax serait efficace chez les personnes qui complètent la série primaire et maintiennent les vaccinations de rappel (2). On peut observer parfois des réactions locales au vaccin. Les femmes enceintes ne doivent pas être vaccinées contre l'anthrax à moins que les bénéfices potentiels de la vaccination n'aient été déterminés comme l'emportant sur le risque potentiel pour le fœtus. Les personnes qui ont une réaction allergique sérieuse ou sévère au vaccin contre l'anthrax ne doivent pas recevoir le vaccin avant l'exposition. Les personnes aux États-Unis qui anticipent une exposition à l'anthrax peuvent trouver des informations sur la disponibilité du vaccin auprès de leur département de santé d'Etat local (3).

Prophylaxie post-exposition

Les mesures post-exposition comprennent:

  • Antibiotiques

  • Vaccination

  • Anticorps monoclonaux

Les sujets asymptomatiques (y compris les femmes enceintes et les enfants) exposés au charbon (anthrax) par inhalation doivent recevoir une prophylaxie par un antibiotique oral, pendant 60 jours. La doxycycline, la ciprofloxacine ou la lévofloxacine sont des choix empiriques de première ligne et doivent être ajustés selon les résultats de tests de sensibilité aux antibiotiques du patient et l'état de grossesse (4). Les avantages des quinolones et des tétracyclines chez les enfants et les femmes enceintes l'emportent sur les risques potentiels. L'amoxicilline ou la pénicilline V potassique ne peuvent être utilisées que si l'isolat du patient est connu pour être sensible à la pénicilline. Les antibiotiques alternatifs incluent la minocycline, la moxifloxacine et la clindamycine.

Des spores viables ont été détectées dans les poumons après l'exposition aux aérosols. Les sujets exposés aux spores de B. anthracis en aérosol étant présumés avoir inhalé de l'anthrax en raison de la persistance de spores non germées dans leurs poumons après l'exposition initiale, le traitement antibiotique est poursuivi pendant 60 jours pour éliminer les microrganismes en germination.

Le Centers for Disease Control and Prevention (CDC) recommande que le vaccin contre le charbon soit administré en association avec une antibiothérapie préventive appropriée aux patients exposés aux spores du charbon (5). Le Centers for Disease Control and Prevention (CDC) recommandent une série de vaccins à 3 doses administrés par voie sous-cutanée à 0, 2 et 4 semaines avec un traitement antimicrobien concomitant pendant au moins 60 jours. En cas d'urgence (p. ex., une attaque de bioterrorisme), les seuls sujets qui ne doivent pas recevoir le vaccin après une exposition sont ceux qui ont eu une réaction allergique grave à une dose antérieure de vaccin contre l'anthrax (6).

Le raxibacumab et l'obiltoxaximab sont des anticorps monoclonaux antitoxines indiqués en prophylaxie du charbon par inhalation lorsque des thérapies alternatives ne sont pas disponibles ou ne sont pas appropriées.

Références pour la prévention

  1. 1. Quinn CP, Dull PM, Semenova V, et al. Immune responses to Bacillus anthracis protective antigen in patients with bioterrorism-related cutaneous or inhalation anthrax. J Infect Dis. 2004;190(7):1228-1236. doi:10.1086/423937

  2. 2. Bower WA, Schiffer J, Atmar RL, et al. Use of Anthrax Vaccine in the United States: Recommendations of the Advisory Committee on Immunization Practices, 2019. MMWR Recomm Rep. 2019;68(4):1-14. Published 2019 Dec 13. doi:10.15585/mmwr.rr6804a1

  3. 3. Centers for Disease Control and Prevention: Health Department Directories. May 15, 2024. Accessed July 15, 2025.

  4. 4. Bower WA, Yu Y, Person MK, et al. CDC Guidelines for the Prevention and Treatment of Anthrax, 2023 [published correction appears in MMWR Morb Mortal Wkly Rep. 2024 Aug 08;73(31):689. doi: 10.15585/mmwr.mm7331a4]. MMWR Recomm Rep 2023;72(6):1-47. Published 2023 Nov 17. doi:10.15585/mmwr.rr7206a1

  5. 5. Centers for Disease Control and Prevention: Vaccines and Immunizations: Anthrax Vaccine VIS. January 8, 2020. Accessed July 15, 2025.

  6. 6. Centers for Disease Control and Prevention: Anthrax: Prevention. April 16, 2025. Accessed July 15, 2025.

Points clés

  • La fièvre charbonneuse est généralement contractée par contact avec des animaux infectés, et a été utilisée comme arme biologique.

  • Les toxines puissantes, dont la toxine de l'œdème et la toxine létale, sont responsables des manifestations les plus graves.

  • Les principales formes cliniques de fièvre charbonneuse sont la forme cutanée (la plus courante), par ingestion, par inhalation, et méningée (la plus mortelle).

  • Le charbon (anthrax) par inhalation et par ingestion n'est pas transmis de manière interhumaine.

  • Traiter par un protocole antibiotique approprié et parfois un anticorps monoclonal ou une immunoglobuline humaine anti-anthrax qui se lie à la composante de l'antigène protecteur de la toxine de B. anthracis.

  • Administrer une prophylaxie post-exposition par la ciprofloxacine, la lévofloxacine, la moxifloxacine, la doxycycline, la minocycline ou la clindamycine; le vaccin contre l'anthrax (charbon); et parfois des anticorps monoclonaux chez les sujets exposés à l'anthrax par inhalation.

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