Maladie de Crohn

(Entérite régionale; iléite ou iléocolite granulomateuse)

ParAaron E. Walfish, MD, Mount Sinai Medical Center;
Rafael Antonio Ching Companioni, MD, HCA Florida Gulf Coast Hospital
Vérifié/Révisé nov. 2023
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La maladie de Crohn est une maladie intestinale inflammatoire chronique transmurale, affectant habituellement l'iléon distal et le côlon, mais pouvant survenir à un niveau quelconque du tube digestif. Les symptômes comprennent des diarrhées et des douleurs abdominales. Des abcès, des fistules internes et externes et une obstruction de l'intestin peuvent se produire. Une symptomatologie extra-intestinale, notamment une arthrite, peut survenir. Le diagnostic repose sur l'imagerie. Le traitement repose sur l'acide 5-aminosalicylique, les corticostéroïdes, les immunomodulateurs, les anticytokines, certains antibiotiques et souvent la chirurgie.

(Voir aussi Revue générale des maladies intestinales inflammatoires chroniques.)

Physiopathologie de la maladie de Crohn

La maladie de Crohn débute par une inflammation et des abcès cryptiques, qui se transforment en petits ulcères focaux aphtoïdes. Ces lésions muqueuses peuvent évoluer en ulcérations longitudinales et transversales profondes avec un œdème muqueux entre les ulcérations, donnant à l'intestin un aspect pavimenteux caractéristique.

L'extension transmurale de l'inflammation entraîne un lymphœdème et un épaississement de la paroi intestinale et du mésentère. La graisse mésentérique s'étend de façon caractéristique sur la séreuse intestinale. Les ganglions mésentériques augmentent souvent de volume. Une inflammation étendue peut entraîner une hypertrophie de la musculaire muqueuse, une sclérose et la formation d'une sténose, pouvant aboutir à une occlusion intestinale.

Les abcès sont fréquents et les fistules pénètrent souvent dans les structures voisines, comme d'autres segments du tube digestif, la vessie ou le psoas. Les fistules peuvent même s'étendre à la peau au niveau de la paroi antérieure de l'abdomen ou des flancs. Indépendamment de l'activité de la maladie intra-abdominale, les fistules et les abcès péri-anaux surviennent dans 25 à 33% des cas; ces complications sont fréquemment les aspects les plus problématiques de la maladie de Crohn.

Des granulomes non caséeux peuvent être observés dans des ganglions, le péritoine, le foie et toutes les couches de la paroi intestinale. Bien qu'ils soient pathognomoniques lorsqu'ils sont présents, les granulomes ne sont pas observés chez environ la moitié des patients atteints de maladie de Crohn. Leur présence ne semble pas en relation avec l'évolution clinique.

Les parties de l'intestin malade sont clairement séparées des parties saines adjacentes de l'intestin (appelées lésions en saut), d'où le nom d'entérite régionale (1).

  • Environ 30% des cas de maladie de Crohn touchent l'iléon seul (iléite).

  • Environ 40% touchent l'iléon et le côlon (iléocolite), avec une prédilection pour le côté droit du côlon.

  • Environ 30% touchent le côlon seul (colite granulomateuse), dont la plupart, à la différence de la rectocolite ulcéro-hémorragique épargne le rectum.

Iléite de Crohn
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L'iléon est enflammé dans environ 80% des cas de maladie de Crohn.
Image provided by David M. Martin, MD.

Parfois, l'intestin grêle est atteint (jéjuno-iléite). Les atteintes de l'estomac, du duodénum ou de l'œsophage n'ont que rarement une traduction clinique, bien qu'une atteinte microscopique de la maladie soit souvent détectable dans l'antre gastrique, en particulier chez les patients les plus jeunes. En l'absence de traitement chirurgical, la maladie ne s'étend presque jamais dans des segments de l'intestin grêle non touchés au moment du diagnostic initial.

Classification

La maladie de Crohn est classée en 3 phénotypes: (1) inflammatoire, qui évolue fréquemment après plusieurs années (2) vers un phénotype sténosant (3) ou un phénotype pénétrant ou fistulisé.

Ces différentes présentations cliniques entraînent des conduites thérapeutiques différentes. Certaines études génétiques suggèrent l'existence d'une base moléculaire à cette classification.

Complications

On observe une augmentation du risque de cancer dans les segments atteints de l'intestin grêle. Les patients qui ont une atteinte colique présentent un risque à long terme de cancer colorectal équivalent à celui observé dans la rectocolite ulcéro-hémorragique, à extension et durée de la maladie comparables.

La malabsorption chronique peut provoquer des carences nutritionnelles, notamment en vitamines D et B12.

La colite toxique est une complication rare de la maladie de Crohn. C'est un syndrome clinique de l'iléus accompagné d'une preuve radiographique de dilatation colique; de nombreux cas doivent être traités de manière agressive par une intervention chirurgicale.

Référence pour la physiopathologie

  1. 1. Dulai PS, Singh S, Vande Casteele N, et al: Should we divide Crohn's disease into ileum-dominant and isolated colonic diseases? Clin Gastroenterol Hepatol 17(13):2634-2643, 2019. doi: 10.1016/j.cgh.2019.04.040

Symptomatologie de la maladie de Crohn

Les manifestations initiales les plus fréquentes de la maladie de Crohn sont les suivantes

  • Diarrhée chronique avec des douleurs abdominales, de la fièvre, une anorexie et une perte de poids

  • Abdomen douloureux et masse ou une distension pouvant être palpables.

Une hémorragie digestive basse brutale est inhabituelle sauf en cas de maladie isolée du côlon, qui peut se présenter comme une rectocolite ulcéro-hémorragique. Certains patients sont vus initialement avec un tableau d'abdomen aigu simulant une appendicite aiguë ou une occlusion intestinale. Près du 33% des patients ont une atteinte péri-anale (en particulier des fissures et des fistules), qui représente parfois la plainte principale ou même la forme de début de la maladie.

Chez l'enfant, les signes extra-intestinaux sont souvent prédominants par rapport aux signes intestinaux; une arthrite, une fièvre d'origine inconnue, une anémie ou un retard de croissance peuvent être les symptômes motivant la consultation alors que la douleur abdominale ou la diarrhée peuvent être absentes.

Lors de la récidive de la maladie, les symptômes varient. La douleur est le symptôme le plus fréquent et apparaît en cas de simple récidive ou de formation d'un abcès. Les patients qui présentent une poussée sévère ou un abcès ont souvent une douleur avec une défense abdominale, une douleur à la décompression, ainsi que des manifestations générales toxiques. Les zones sténosées peuvent entraîner une occlusion intestinale avec des douleurs à type de coliques, une distension abdominale, une constipation et des vomissements. Des adhérences secondaires à une intervention chirurgicale peuvent également entraîner une occlusion intestinale, qui débute rapidement, sans les prodromes de fièvre, de douleurs ou de sensation de malaise caractéristiques de l'obstruction due à une poussée de maladie de Crohn. Une fistule entérovésicale peut entraîner l'émission urinaire de bulles d'air (pneumaturie). Des fistules cutanées avec écoulement peuvent survenir. La perforation en péritoine libre est inhabituelle.

Cette maladie chronique entraîne des symptômes systémiques variés, dont une fièvre, une perte de poids, une dénutrition et d'autres manifestations extra-intestinales de maladies inflammatoires intestinales.

Diagnostic de la maladie de Crohn

  • Rx barytée de l'intestin grêle

  • TDM abdominale (conventionnelle ou entéro-TDM)

  • Parfois lavement baryté, entérographie par résonance magnétique (IRM), endoscopie digestive haute, coloscopie et/ou endoscopie par vidéo capsule

La maladie de Crohn doit être suspectée chez tout patient présentant des symptômes occlusifs ou inflammatoires et, en l'absence de symptomatologie digestive particulière, en cas de fistules ou d'abcès péri-anaux ou encore d'arthrite, d'érythème noueux, de fièvre, d'anémie ou (chez l'enfant) de retard de croissance inexpliqués. Des antécédents familiaux de maladie de Crohn renforcent la suspicion de cette maladie.

Une symptomatologie similaire (p. ex., douleurs abdominales, diarrhée) peut être provoquée par d'autres affections gastro-intestinales, en particulier la rectocolite ulcéro-hémorragique. Le diagnostic différentiel avec la rectocolite ulcéro-hémorragique peut être difficile chez les 20% de maladies de Crohn localisées au côlon. Cependant, le traitement étant similaire, cette distinction n'est capitale que lorsque la chirurgie ou un traitement expérimental sont envisagés.

Les patients qui présentent un abdomen aigu (initialement ou lors d'une rechute) doivent subir une TDM abdominale. Ces examens peuvent montrer une occlusion, des abcès ou des fistules et d'autres causes possibles d'abdomen aigu (p. ex., appendicite). L'échographie peut mieux différencier une pathologie gynécologique chez une femme présentant une douleur abdominale basse ou pelvienne.

Si la présentation initiale est moins aiguë, des rx de la partie haute du tube digestif avec opacification de tout l'intestin grêle et des clichés centrés sur l'iléon terminal peuvent être préférées à la TDM conventionnelle. Cependant, de nouvelles techniques d'entérographie TDM ou IRM, combinant la TDM à haute résolution ou l'IRM avec ingestion de produit de contraste, constituent les procédures de choix dans certains centres. Ces examens d'imagerie permettent pratiquement le diagnostic si elles montrent des sténoses ou des fistules caractéristiques avec refoulement des anses intestinales.

Transit de l'intestin grêle dans la maladie de Crohn montrant une st...
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L'image de gauche montre le spasme oblitérant l'aspect pavé de l'iléon terminal, qui est mieux vu en double contraste sur l'image de droite.
© Springer Science+Business Media

Si les résultats sont douteux, l'entéroclyse-TDM ou la vidéo-endoscopie par capsule peuvent montrer des ulcères superficiels aphtoïdes et linéaires. Le lavement baryté avec reflux de la baryte dans l'iléon terminal peut être utilisé si les symptômes semblent préférentiellement coliques (p. ex., diarrhée) et peut montrer une sténose iléale avec une paroi raide, irrégulière, rigide et nodulaire. Le diagnostic différentiel radiologique comprend le cancer du caecum, le carcinoïde iléal, le lymphome, les vascularites systémiques, l'entérite radique, la tuberculose iléo-caecale et l'amœbome.

Ulcère de l'iléon dans la maladie de Crohn
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Cette photo montre une vidéo-endoscopie par capsule d'un ulcère aphteux caractéristique de la maladie de Crohn. L'ulcère (flèche) est une petite dépression blanche centrale avec une bordure légèrement surélevée et érythémateuse.
Photo courtesy of Drs. Aaron E. Walfish et Rafael A. Ching Companioni.

Dans les cas atypiques (p. ex., diarrhée prédominante avec douleurs minimes), le bilan est similaire à celui en cas de suspicion de rectocolite ulcéro-hémorragique avec une coloscopie (comprenant des biopsies, des prélèvements à la recherche d'entéropathogènes, et, si possible, la visualisation de l'iléon terminal). L'endoscopie du tube digestif supérieur peut mettre en évidence une localisation gastroduodénale même en l'absence de symptômes digestifs hauts.

Examens complémentaires

Des examens biologiques doivent être effectués pour dépister une anémie, une hypoalbuminémie et des troubles hydro-électrolytiques. Un bilan hépatique doit être pratiqué; une élévation des phosphatases alcalines et des taux de gamma–glutamyl transpeptidase en cas d'atteinte colique étendue font évoquer une cholangite sclérosante primitive. Une hyperleucocytose ou une augmentation des taux des marqueurs inflammatoires de phase aiguë (p. ex., VS, protéine C réactive) ne sont pas spécifiques mais peuvent être utilisées de manière répétée pour surveiller l'activité de la maladie.

Pour détecter les carences nutritionnelles, les taux de vitamine D et B12 doivent être vérifiés tous les 1 à 2 ans. Des dosages supplémentaires, tels que les taux de vitamines hydrosolubles (acide folique et niacine), de vitamines liposolubles (A, D, E et K), et de minéraux (zinc, sélénium et cuivre) peuvent être effectués lorsque des déficits sont suspectés.

Un contrôle de la densité osseuse habituellement par absorptiométrie biphotonique par rayons X (DXA scan) doit être effectué en cas de maladie intestinale inflammatoire, que les patients soient de sexe masculin ou féminin, jeunes ou âgés.

Des anticorps anticytoplasme de neutrophiles (ANCA) sont présents chez 60 à 70% patients qui présentent une rectocolite ulcéro-hémorragique et chez seulement 5 à 20% des patients atteints de maladie de Crohn. Les anticorps anti–Saccharomyces cerevisiae sont relativement spécifiques de la maladie de Crohn. Cependant, ces examens ne permettent pas de séparer les 2 maladies de façon fiable et ils ne sont pas recommandés pour un diagnostic de routine. Des anticorps supplémentaires tels que les anti-OmpC et les anti-CBir1 sont à présent disponibles, mais l'intérêt clinique de ces examens supplémentaires n'est pas avéré; certaines études suggèrent que des taux élevés de ces anticorps ont des implications pronostiques négatives.

Traitement de la maladie de Crohn

  • Lopéramide ou antispasmodiques pour soulager les symptômes

  • Acide 5-aminosalicylique (5-ASA) ou antibiotiques

  • Autres médicaments en fonction des symptômes et de la gravité (p. ex., médicaments immunomodulateurs, agents biologiques et petites molécules)

  • Parfois, intervention chirurgicale

Les détails du choix et de la posologie des médicaments sont décrits dans Médicaments des maladies inflammatoires intestinales.

(Voir aussi the American College of Gastroenterology's 2018 guidelines for the management of Crohn disease in adults.)

Mesures de prise en charge générale

Les crampes abdominales et la diarrhée peuvent être soulagées par l'administration orale de 2 à 4 mg de lopéramide ou des médicaments antispasmodiques jusqu'à 4 fois/jour (idéalement avant les repas). Ce type de traitement symptomatique est sans risque, sauf dans les colites aiguës graves de la maladie de Crohn, qui peuvent évoluer vers un colite toxique, comme dans la rectocolite ulcéro-hémorragique. Les mucilages hydrophiles (p. ex., préparations à base de psyllium ou de méthylcellulose) permettent parfois d'éviter les irritations anales en augmentant la consistance des selles. Les aliments riches en fibres doivent être évités en cas de sténose ou d'inflammation active du côlon.

Les mesures de médecine préventive de routine (p. ex., vaccinations, dépistage du cancer) doivent être considérées comme importantes.

Maladie modérée

Cette catégorie comprend le patient ambulatoire qui tolère l'alimentation orale et n'a pas de signes toxiques, de défense abdominale, de masse ou d'obstruction.

Le budésonide oral à enrobage entérique est couramment utilisé comme traitement de première intention pour induire une rémission en cas de maladie bénigne chez les patients à faible risque qui ont une maladie de Crohn de l'iléon et du côlon droit. Le budésonide est débuté à 9 mg/jour pendant 4 à 8 semaines, puis diminué de 3 mg toutes les 2 à 4 semaines sur un total de 2 à 3 mois. Le maintien de la rémission est alors initié par de la thiopurine ou un biologique. Le budésonide est également disponible sous forme de lavement.

Le 5-ASA (mésalamine) est rarement utilisé en première intention dans la maladie de Crohn. Le Pentasa® est privilégié dans la maladie de l'intestin grêle et l'Asacol® HD est privilégié dans la maladie de l'iléon distal et du côlon. Cependant, les effets positifs d'un médicament 5-ASA dans la maladie de Crohn sont modestes et de nombreux experts préconisent de ne pas l'utiliser dans la maladie de Crohn.

Les antibiotiques sont considérés comme un traitement de première intention par certains ou peuvent être réservés au patient ne répondant pas à 4 semaines de 5‑ASA; leur utilisation est strictement empirique. Avec ces médicaments, de 8 à 16 semaines de traitement peuvent être nécessaires.

Poussée modérée à sévère

Le patient qui n'a pas de fistules ou d'abcès mais qui a des douleurs importantes, de la fièvre ou des vomissements ou qui n'a pas réagi au traitement d'une poussée légère, a souvent une amélioration rapide des symptômes lorsqu'il reçoit des corticostéroïdes oraux ou parentéraux. La prednisone ou la prednisolone orale peuvent agir plus rapidement et plus constamment que le budésonide oral, mais ce dernier a moins d'effets indésirables et est considéré comme le corticostéroïde de choix dans de nombreux centres, en particulier en Europe.

Un agent biologique (infliximab, adalimumab, certolizumab pegol, vedolizumab, ustekinumab, risankizumab), avec ou sans antimétabolites (azathioprine, 6-mercaptopurine, ou méthotrexate) peut être utilisé comme traitement de 1ère ligne, et même avant une corticothérapie. En cas d'échec de ce traitement, des médicaments d'une classe de médicaments différente peuvent être utilisés. L'upadacitinib peut être envisagé en cas de réponse inadéquate ou d'intolérance à un ou plusieurs anti-TNF. Dans certaines situations, la chirurgie est également appropriée.

Une occlusion est traitée initialement par aspiration nasogastrique et apport hydroélectrolytique IV. Une occlusion due à la maladie de Crohn non compliquée doit se résoudre en quelques jours et ne nécessite donc pas de traitement anti-inflammatoire spécifique ni de nutrition parentérale; cependant, une absence de réaction rapide est le signe d'une complication ou d'une autre étiologie et exige une intervention chirurgicale immédiate.

Maladie fulminante ou abcès

Le patient qui présente des manifestations toxiques, une fièvre élevée, des vomissements persistants, une douleur à la décompression, ou une masse palpable douloureuse doit être hospitalisé afin de recevoir un apport IV et des antibiotiques. Les abcès doivent être drainés par voie percutanée ou chirurgicale. Une corticothérapie IV ou des agents biologiques doivent être administrés, mais uniquement lorsqu'une infection a été éliminée ou est contrôlée. En cas d'absence de réponse à la corticothérapie et aux antibiotiques dans les 5 à 7 jours, la chirurgie est habituellement indiquée.

Fistules

Les fistules périanales sont initialement traitées par le métronidazole et la ciprofloxacine. Le patient qui ne répond pas en 3 à 4 semaines peut recevoir un immunomodulateur (p. ex., azathioprine, 6-mercaptopurine), avec ou sans protocole d'induction par infliximab pour une réponse plus rapide. Une thérapie anti-TNF (infliximab ou adalimumab) peut également être utilisée seule. La cyclosporine ou le tacrolimus sont des alternatives, mais les fistules récidivent souvent après le traitement.

L'utilisation de colle de fibrine déposée par endoscopie guidée par échographie, ou l'utilisation d'un drain de seton (du matériel de suture temporairement laissé dans la fistule pour permettre de la vider) peut être utile dans le cas de certaines fistules périanales plus complexes ou réfractaires. Des fistules péri-anales complexes réfractaires peuvent nécessiter une colostomie de dérivation temporaire mais récidivent presque toujours après rétablissement du circuit digestif; la diversion fécale est donc plus à considérer comme un geste de préparation à une chirurgie définitive ou en appoint d'un traitement par infliximab ou adalimumab que comme le traitement principal.

Traitement d'entretien

Le patient qui n'a besoin que de 5-ASA ou d'un antibiotique pour obtenir la rémission de la maladie de Crohn peut poursuivre ce médicament. Le patient nécessitant un traitement par corticostéroïdes ou des agents anti-TNF en phase aiguë nécessitent typiquement de l'azathioprine, de la 6-mercaptopurine, du méthotrexate ou un traitement d'association en entretien. De nombreux, sinon la plupart des patients, mis en rémission par un agent anti-TNF, auront besoin d'une augmentation de la dose ou d'un raccourcissement des intervalles de traitement au cours de l'année ou des deux années suivantes. Les corticostéroïdes systémiques ne sont ni sûrs ni efficaces en entretien à long terme, bien qu'il ait été démontré que le budésonide retardait les rechutes avec moins d'effets indésirables. Le patient qui répond au traitement anti-TNF en cas de maladie aiguë mais qui n'est pas en rémission sous antimétabolites peut rester en rémission avec des perfusions répétées d'anti-TNF.

La surveillance pendant la rémission repose sur la clinique et les examens sanguins et ne nécessite pas de rx ou de coloscopie systématique (autre que pour la recherche de la dysplasie effectuée régulièrement après 7 ou 8 ans d'évolution de la maladie).

Chirurgie

Bien que près de 70% des patients nécessitent en fin de compte une intervention chirurgicale, la chirurgie dans la maladie de Crohn est souvent effectuée à contrecœur. Il vaut mieux la réserver aux cas d'occlusion intestinale récidivante ou d'abcès et fistules rebelles au traitement médical. La résection de l'intestin atteint peut améliorer les symptômes mais ne permet pas la guérison, car la maladie de Crohn est susceptible de récidiver même après la résection de toutes les lésions cliniquement apparentes.

Une méta-analyse des récidives endoscopiques sévères après chirurgie chez des sujets qui ne prenaient pas de médicaments pour des maladies intestinales inflammatoires a révélé que le taux était de 50% (1).

En fin de compte, une nouvelle intervention chirurgicale est nécessaire dans près de 35% des cas dans les 10 ans (2). Cependant, les taux de récidive semblent pouvoir être réduits par une prophylaxie post-opératoire précoce par la 6-mercaptopurine ou l'azathioprine, le métronidazole ou l'infliximab. En outre, quand la chirurgie est effectuée avec de bonnes indications, presque tous les patients ont une amélioration de leur qualité de vie.

Le tabagisme augmente le risque de récidive, en particulier chez les femmes, le sevrage tabagique doit être encouragé.

Références pour le traitement

  1. 1. Renna S, Cammà C, Modesto I, et al: Meta-analysis of the placebo rates of clinical relapse and severe endoscopic recurrence in postoperative Crohn's disease. Gastroenterology 135(5):1500-1509, 2008. doi: 10.1053/j.gastro.2008.07.066

  2. 2. Fumery M, Dulai PS, Meirick P, et al: Systematic review with meta-analysis: recurrence of Crohn's disease after total colectomy with permanent ileostomy. Aliment Pharmacol Ther 45(3):381-390, 2017. doi: 10.1111/apt.13886

Pronostic de la maladie de Crohn

La maladie de Crohn n'est que rarement guérie et est caractérisée par des poussées et des rémissions à répétition. Certains souffrent d'atteinte sévère avec des épisodes de douleurs fréquentes et invalidantes. Cependant, avec un traitement médical adapté, et chirurgical si nécessaire, la majorité des patients vivent normalement et s'adaptent à leur maladie. La mortalité en rapport direct avec la maladie est très basse. Les cancers digestifs, comprenant les cancers du côlon et de l'intestin grêle, sont les causes principales des décès imputables à la maladie de Crohn. Des complications thromboemboliques (en particulier en cas de maladie de Crohn colique active) peuvent également provoquer le décès. Environ 10% des personnes sont handicapées par la maladie de Crohn et les complications qu'elle entraîne.

Points clés

  • La maladie de Crohn affecte généralement l'iléon et/ou le côlon mais épargne le rectum (qui est toujours affecté dans la rectocolite ulcéro-hémorragique).

  • Les parties de l'intestin malade sont clairement séparées des parties saines adjacentes de l'intestin (appelées lésions en saut).

  • Les symptômes consistent principalement en une diarrhée et des douleurs abdominales épisodiques; les hémorragies gastro-intestinales sont rares.

  • Les complications comprennent les abcès abdominaux et les fistules entérocutanées.

  • Traiter la maladie légère par de l'acide 5-aminosalicylique et/ou des antibiotiques (p. ex., métronidazole, ciprofloxacine, rifaximine).

  • Traiter la maladie modérée à grave par des corticostéroïdes et parfois des immunomodulateurs (p. ex., azathioprine) ou des produits biologiques (p. ex., infliximab, védolizumab, ustékinumab, risankizumab).

  • Environ 70% des patients doivent finalement être opérés, typiquement en cas d'occlusion intestinale récidivante, d'abcès et de fistules rebelles au traitement médical.

Plus d'information

La source d'information suivante en anglais peut être utile. S'il vous plaît, notez que LE MANUEL n'est pas responsable du contenu de cette ressource.

  1. American College of Gastroenterology: Guidelines for the management of Crohn disease in adults (2018)

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