(Voir aussi Équilibre hydrique et sodé et Revue générale des troubles volémiques.)
L'eau traversant les membranes plasmiques de l'organisme par osmose passive, la perte du principal cation extracellulaire (Na) induit également rapidement un efflux d'eau hors du liquide extra-cellulaire. Ainsi, la perte sodée induit toujours une perte d'eau. Cependant, en fonction de nombreux facteurs, la natrémie peut être élevée, basse ou normale chez des patients hypovolémiques (malgré une diminution sodium corporel total). Le volume du liquide extra-cellulaire est lié au volume circulant efficace. Une diminution du liquide extra-cellulaire (hypovolémie) entraîne généralement une diminution du volume circulant efficace, qui entraîne une diminution de la perfusion des organes et des séquelles cliniques. Les causes les plus fréquentes de déplétion volémique sont listées dans le tableau Causes fréquentes de déplétion volémique.
Causes fréquentes de déplétion volémique
Type |
Exemples |
Extrarénales |
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Saignements |
Traumatisme |
Dialyse |
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Gastrointestinal |
Aspiration nasogastrique |
Peau |
Transpiration excessive Desquamation |
Perte dans un 3e secteur |
Lumière intestinale Intrapéritonéale Rétropéritonéale |
Rénale, surrénale et hypophysaire |
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Phase diurétique de récupération |
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Troubles surrénaliens |
Insuffisance surrénalienne (provoquant une carence en stéroïdes surrénaliens), dont la maladie d'Addison Hypoaldostéronisme |
Troubles génétiques entraînant une perte rénale de sodium et de potassium |
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Troubles hypothalamiques ou hypophysaires provoquant une carence en vasopressine (antidiuretic hormone, ADH) |
Diabète insipide central (p. ex., dû à un traumatisme, une tumeur, une infection) |
Diurèse osmotique |
Diabète sucré avec glucosurie extrême |
Diurétiques |
Diurétiques de l'anse Diurétiques thiazidiques |
Maladie rénale avec perte de sel |
Pyélonéphrite chronique (occasionnellement) Néphrite interstitielle Maladie kystique médullaire Myélome (parfois) |
Symptomatologie
Si la perte liquidienne est <> du volume du liquide extra-cellulaire (déplétion volémique modérée), le seul signe clinique peut être une diminution de l'élasticité cutanée (au mieux appréciée au niveau de la partie supérieure du thorax). L'élasticité de la peau peut être diminuée chez les patients âgés quel que soit le statut volémique. Les patients peuvent se plaindre de soif. La sécheresse des muqueuses n'est pas toujours corrélée à la déplétion volémique, en particulier chez les patients âgés ou chez les sujets qui respirent par la bouche. L'oligurie est typique.
Quand le volume de liquide extra-cellulaire est diminué de 5 à 10% (déplétion volumique modérée), une tachycardie et/ou une hypotension orthostatique sont habituelles, bien que non systématiquement présentes. De même, des troubles orthostatiques peuvent survenir sans déplétion volémique du liquide extra-cellulaire, en particulier chez les patients déconditionnés ou alités. La turgescence cutanée peut diminuer ultérieurement.
Lorsque la perte liquidienne est > 10% du volume de liquide extra-cellulaire (déplétion volémique sévère), des signes de choc peuvent survenir (p. ex., tachypnée, tachycardie, hypotension, confusion, mauvaise recoloration capillaire).
Diagnostic
Une déplétion volémique est suspectée chez les patients à risque, en général des patients présentant un apport liquidien inadéquat (en particulier les patients comateux ou désorientés), une augmentation des pertes hydriques, un traitement diurétique, et des troubles rénaux ou surrénaliens.
Le diagnostic est habituellement clinique. Si les poids exacts des patients immédiatement avant et après la perte de liquide sont connus, leur différence permet une estimation précise de la perte de volume; p. ex., le poids avant et après l'entraînement sont parfois utilisés pour surveiller la déshydratation chez les athlètes.
Si la cause est évidente et facilement curable (p. ex., gastro-entérite aiguë chez un patient par ailleurs en bonne santé), les examens complémentaires sont inutiles; sinon, un ionogramme sanguin, avec dosage de l'urée et de la créatinine sériques est effectué. L'osmolalité plasmatique, le sodium, la créatinine et l'osmolalité urinaires sont dosés en cas de suspicion d'anomalie électrolytique cliniquement significative non évidente sur les examens sériques et en cas de maladie cardiaque ou rénale. En cas d'alcalose métabolique, le Cl urinaire est également mesuré.
La pression veineuse centrale et la pression d'occlusion de l'artère pulmonaire sont diminuées en cas de déplétion volémique, mais leur mesure est rarement nécessaire. Cette mesure, qui nécessite une procédure invasive, est parfois nécessaire chez les patients chez qui même de petites quantités de volume ajoutées peuvent être préjudiciables comme en cas d'insuffisance cardiaque instable, ou de maladie rénale chronique sévère.
Les notions suivantes sont utiles pour interpréter les valeurs des électrolytes et de l'osmolalité urinaires:
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En cas de déplétion volémique, des reins fonctionnant normalement sont en mesure de conserver le sodium. Ainsi, la concentration urinaire de sodium est généralement < 15 mEq/L (< 15 mmol/L); la fraction d'excrétion du sodium (Na urinaire/Na sérique divisé par la créatinine urinaire/créatininémie) est habituellement < 1%; de même, l'osmolalité urinaire est souvent > 450 mOsm/kg (> 450 mmol/kg).
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Lorsque l'alcalose métabolique est associée à une déplétion volémique, la concentration urinaire de sodium peut être élevée, car de grandes quantités de HCO3 sont déversées dans les urines, ce qui entraîne l'excrétion obligatoire de sodium pour maintenir la neutralité électrique. Dans ce cas, une concentration urinaire de Cl < 10 mEq/L (< 10 mmol/L) indique de façon plus fiable une déplétion volémique.
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Un sodium urinaire élevé (généralement > 20 mEq/L [> 20 mmol/L]) ou une osmolalité urinaire basse peuvent aussi être observés en cas de pertes rénales de sodium secondaires à une néphropathie, à la prise de diurétiques ou à une insuffisance surrénalienne.
Une déplétion volémique augmente fréquemment les taux d'urée et de créatinine sériques; un rapport urée/créatinine est souvent > 20:1. Des valeurs telles que l'hématocrite augmentent souvent en cas de déplétion volémique mais sont difficiles à interpréter à moins que les valeurs de base ne soient connues.
Traitement
La cause de la déplétion volémique est corrigée et des liquides sont administrés pour remplacer les déficits volémiques existants ainsi que toute perte de liquide en cours et pour satisfaire les besoins hydriques quotidiens.
Une déshydratation extracellulaire légère à modérée peut être traitée en augmentant l'administration orale de sodium et d'eau si le patient est conscient et n'a pas de vomissement sévère; les protocoles de réhydratation orale chez les enfants sont traités ailleurs. L'alimentation par sonde peut également être utilisée si la prise orale est limitée ou dangereuse pour une raison quelconque.
En cas de déficit volémique sévère ou lorsque la compensation des pertes liquidiennes par voie orale n'est pas réalisable, du sérum physiologique à 0,9% IV ou une solution électrolytique tamponnée (p. ex., le Ringer lactate) est administrée. Tous deux sont bien tolérés et sûrs, mais le Ringer lactate et d'autres solutions tamponnées ont des concentrations de chlorure inférieures et peuvent réduire le développement de l'acidose métabolique hyperchlorémique. Des preuves récentes semblent en faveur de l'utilisation du lactate de Ringer par rapport à la solution physiologique, mais le problème n'est pas définitivement réglé. Ces deux solutions se répartissant uniformément dans le milieu extracellulaire, il faut administrer trois à quatre fois le déficit en volume intravasculaire. Les protocoles IV typiques sont décrits ailleurs.