Bien que les granulomes hépatiques puissent ne pas avoir de retentissement clinique, le plus souvent ils témoignent d'une maladie cliniquement manifeste. Le terme "hépatite granulomateuse" est souvent utilisé pour décrire l'atteinte granulomateuse, mais il ne s'agit pas d'une vraie hépatite et la présence de granulomes n'est pas nécessairement un marqueur d'inflammation hépatique.
Étiologie
Les granulomes hépatiques ont de nombreuses étiologies (voir tableau Causes des granulomes hépatiques); les médicaments et troubles systémiques (souvent des infections) sont des causes plus fréquentes que les troubles hépatiques primitifs. Les infections doivent être identifiées car elles nécessitent des traitements spécifiques. La tuberculose et la bilharziose (schistosomiase) sont les causes infectieuses les plus répandues dans le monde; les causes fongiques et virales sont moins fréquentes. La sarcoïdose est la cause non infectieuse la plus fréquente; le foie est touché chez environ 2/3 des patients et parfois les manifestations cliniques de la sarcoïdose sont principalement hépatiques.
Causes des granulomes hépatiques
Cause |
Exemples |
Médicaments |
Allopurinol, phénylbutazone, quinidine, sulfamides |
Infections bactériennes |
Actinomycose, brucellose, maladie des griffes du chat, syphilis, tuberculose*, autres infections mycobactériennes, tularémie, fièvre Q |
Infections, mycosiques |
Blastomycose, cryptococcose, histoplasmose |
Infections, parasitaires |
Schistosomiase (bilharziose)*, toxoplasmose, larva migrans viscérale |
Infections, virales |
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Troubles hépatiques |
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Troubles systémiques |
Lymphome d'Hodgkin, pseudo-polyarthrite rhizomélique, autres troubles du tissu conjonctif, sarcoïdose* |
*Causes les plus fréquentes. |
Les granulomes sont beaucoup moins fréquents dans les troubles primitifs du foie; la cholangite biliaire primitive (précédemment appelée cirrhose biliaire primitive) est la seule cause importante. De petits granulomes sont parfois observés dans d'autres troubles du foie, sans retentissement clinique.
L'hépatite granulomateuse idiopathique est un syndrome rare comportant des granulomes hépatiques associés à une fièvre récurrente, des myalgies, une fatigue et d'autres signes généraux qui évoluent souvent de façon intermittente sur une période de plusieurs années. Elle est considérée comme une variante de la sarcoïdose par certains experts.
Physiopathologie
Un granulome est une lésion localisée regroupant des cellules d'inflammation chronique, des cellules épithélioïdes et des cellules multinucléées géantes. Une nécrose caséeuse ou un corps étranger (p. ex., œufs de schistosome) peuvent être présents. La plupart des granulomes se situent dans le parenchyme, mais dans la cholangite biliaire primitive, des granulomes peuvent apparaître dans les triades hépatiques.
Le mécanisme de la formation des granulomes est mal connu. Le développement de granulomes peut être dû à une exposition à des produits irritants exogènes ou endogènes faiblement solubles. Des mécanismes immunologiques sont impliqués.
Les granulomes hépatiques ont rarement un retentissement sur la fonction hépatocellulaire. Cependant, lorsque les granulomes apparaissent dans le cadre d'une atteinte inflammatoire du foie (p. ex., hépatite médicamenteuse, mononucléose infectieuse), un dysfonctionnement hépatocellulaire peut apparaître. Parfois, l'inflammation peut être responsable d'une fibrose hépatique progressive et d'une hypertension portale, surtout dans la schistosomiase (bilharziose) et parfois en cas d'infiltration sarcoïdosique étendue.
Symptomatologie
Les granulomes eux-mêmes sont typiquement asymptomatiques; même une infiltration étendue ne provoque généralement qu'une hépatomégalie mineure et peu ou pas d'ictère. Les symptômes, s'ils surviennent, reflètent la cause sous-jacente (p. ex., symptômes caractéristiques des infections, hépatosplénomégalie en cas de schistosomiase [bilharziose]).
Diagnostic
Les granulomes hépatiques sont suspectés en cas de
En cas de suspicion de granulomes hépatiques, un bilan hépatique est généralement réalisé, mais les résultats ne sont pas spécifiques et sont rarement utiles au diagnostic. Les phosphatases alcalines (et la gamma-glutamyl transférase) ne sont, le plus fréquemment, que modérément élevées mais elles peuvent parfois atteindre des taux importants. D'autres dosages peuvent être normaux ou peuvent révéler une atteinte hépatique surajoutée (p. ex., inflammation hépatique diffuse réactionnelle à un médicament). Habituellement, l'imagerie, comme l'échographie, la TDM ou l'IRM, ne permet pas le diagnostic; elle peut montrer des calcifications (si les granulomes sont anciens) ou des anomalies de remplissage, en particulier en cas de lésions confluentes. Dans la sarcoïdose, les granulomes apparaissent hypodenses sur l'imagerie en coupe et peuvent donc être diagnostiqués à tort comme des métastases hépatiques.
Le diagnostic repose sur la biopsie hépatique. Cependant, la biopsie n'est habituellement utile que pour diagnostiquer les causes curables (p. ex., infections) ou éliminer un trouble non granulomateux (p. ex., hépatite virale chronique). La biopsie peut parfois révéler une étiologie spécifique (p. ex., œufs de schistosomes, nécrose caséeuse de la tuberculose, microrganismes mycosiques). Cependant, des examens supplémentaires (p. ex., cultures, tests cutanés, examens de biologie, imagerie, autres prélèvements tissulaires) sont souvent nécessaires.
En cas de symptômes constitutionnels ou évocateurs d'infection (p. ex., fièvre d'origine inconnue), des techniques spécifiques sont souvent nécessaires pour augmenter la sensibilité de la recherche de certains pathogènes en cas de biopsie; p. ex., une partie de l'échantillon frais biopsié est cultivée, ou des colorations spéciales pour les bacilles acido-résistants, les champignons et autres microrganismes sont utilisées. Souvent, aucune cause n'est retrouvée.
Pronostic
Les granulomes hépatiques d'origine infectieuse ou médicamenteuse régressent complètement après traitement. Les granulomes de la sarcoïdose peuvent totalement régresser ou persister pendant plusieurs années, habituellement sans manifestation clinique significative. Le développement d'une fibrose évolutive et d'une hypertension portale est rare (cirrhose sarcoïdosique).
Dans la schistosomiase (bilharziose), une cicatrisation portale progressive (fibrose en tuyau de pipe) est typique; la fonction hépatique est habituellement conservée, mais une splénomégalie importante et une hémorragie par rupture de varices peuvent être observées.
Traitement
Le traitement est celui du trouble sous-jacent. Lorsque la cause est inconnue, l'abstention thérapeutique est habituelle et un suivi est instauré avec des bilans hépatiques périodiques. Cependant, si des symptômes évocateurs de tuberculose (p. ex., fièvre prolongée) et une altération de l'état général apparaissent, un traitement empirique antituberculeux peut être justifié.
Les corticostéroïdes peuvent résoudre les anomalies biochimiques hépatiques et les manifestations systémiques de la sarcoïdose, telles que la perte de poids et l'atteinte extrahépatique; cependant, ils n'empêchent pas la fibrose hépatique. Ainsi, les corticostéroïdes ne sont généralement recommandés qu'en cas de manifestations systémiques de la sarcoïdose et seulement si la tuberculose et d'autres infections peuvent être exclues en toute confiance.
Points clés
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Les granulomes hépatiques peuvent être dus à de nombreux médicaments et troubles systémiques; les troubles hépatiques primaires sont des causes rares.
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La tuberculose et la bilharziose (schistosomiase) sont les causes infectieuses les plus répandues dans le monde; la sarcoïdose est la cause non infectieuse la plus fréquente.
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Les symptômes et les complications sont principalement dus à la pathologie sous-jacente plutôt qu'aux granulomes eux-mêmes.
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Le traitement est dirigé contre la cause.
Médicaments mentionnés dans cet article
Nom du médicament | Sélectionner les dénominations commerciales |
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Allopurinol |
ZYLOPRIM |
quinidine |
No US brand name |