Revue générale des comas et des troubles de la conscience

ParKenneth Maiese, MD, Rutgers University
Vérifié/Révisé avr. 2024
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Le coma correspond à un état de non-réponse dont le patient ne peut pas être éveillé et chez lequel les yeux du patient restent fermés. Les troubles de la conscience correspondent à des perturbations de la conscience similaires et moins graves; ces perturbations ne sont pas considérées comme étant un coma. Le mécanisme du coma ou de l'altération de la conscience implique un dysfonctionnement des deux hémisphères cérébraux ou du système réticulé activateur (également appelé système réticulé activateur ascendant). Ses causes peuvent être structurelles ou non structurelles (p. ex., troubles toxiques ou métaboliques). Les lésions peuvent être focales ou diffuses. Le diagnostic est clinique; l'identification de la cause nécessite des examens biologiques et d'imagerie. Le traitement consiste en une stabilisation des signes vitaux en urgence et une prise en charge spécifique de l'étiologie. Pour un coma chronique, la prise en charge comprend une kinésithérapie de mobilisation passive, une nutrition entérale et des mesures pour éviter les ulcères de pression.

L'altération de la conscience ou de la vigilance correspond à une baisse de la réactivité à des stimuli externes. Une altération sévère comprend

  • Coma: le patient ne peut pas être éveillé, les yeux sont fermés et ne s'ouvrent pas en réponse à une stimulation.

  • Stupeur: le patient ne peut être réveillé qu'après une stimulation intense.

Les niveaux de conscience moins altérés sont souvent qualifiés de léthargie ou, dans les cas plus sévères, d'obnubilation. La léthargie implique habituellement une fatigue et un manque d'énergie. L'obnubilation est un niveau réduit de vigilance ou de conscience. Cependant, la distinction entre les différents niveaux de conscience moins sévèrement altérés est souvent imprécise; l'étiquette est moins importante qu'une description clinique précise (p. ex., "le meilleur niveau de réponse est un retrait partiel à une pression de l'ongle").

La confusion mentale est une situation à part parce que les troubles cognitifs (de l'attention, de la cognition et du niveau de conscience) fluctuent davantage; de plus, le syndrome confusionnel est habituellement réversible. Le syndrome confusionnel est considéré comme une perte aiguë de la fonction mentale antérieure. Les patients qui présentent un syndrome confusionnel peuvent avoir des périodes d'attention et de cognition appropriées alternant avec des périodes de troubles de l'attention et de la cognition.

Physiopathologie des comas et des troubles de la conscience

Le maintien d'un état de vigilance normale implique une fonctionnalité préservée des deux hémisphères cérébraux et des mécanismes d'éveil du système réticulé activateur. La formation réticulée ascendante, également connue comme le système réticulé activateur ascendant, est constituée d'un réseau important de noyaux et de fibres de connexion dans la partie supérieure de la protubérance, du mésencéphale et du diencéphale postérieur. Pour provoquer une altération de la conscience, la lésion doit impliquer les deux hémisphères cérébraux ou un dysfonctionnement du système réticulé activateur ascendant.

Pour porter atteinte à la conscience, le dysfonctionnement cérébral doit être bilatéral; une atteinte unilatérale du cerveau n'est pas suffisante, bien qu'elle puisse provoquer de graves déficits neurologiques. Cependant, une lésion focale unilatérale massive d'un hémisphère due à un accident vasculaire cérébral (p. ex., de l'artère cérébrale moyenne gauche) ne perturbe que rarement la conscience, sauf en cas d'atteinte controlatérale ou si elle provoque une compression de l'hémisphère controlatéral (p. ex., en provoquant un œdème).

Le dysfonctionnement du système réticulé activateur ascendant peut résulter d'une maladie qui a des effets diffus, comme un trouble toxique ou métabolique (p. ex., hypoglycémie, hypoxie, urémie, surdosage d'une substance, drogue illicite ou médicament). Le dysfonctionnement du système réticulé activateur ascendant peut également être provoqué par une ischémie focale (p. ex., certains infarctus du tronc cérébral supérieur), une hémorragie ou une compression mécanique directe.

Toute maladie qui augmente la pression intracrânienne peut diminuer la pression de la perfusion cérébrale, entraînant une ischémie cérébrale secondaire. Une ischémie cérébrale secondaire peut affecter le système réticulé activateur ascendant et/ou les hémisphères cérébraux, altérant ainsi la conscience.

Lorsque les lésions cérébrales sont étendues, un engagement cérébral (voir aussi figure Engagement cérébral et tableau Effet des engagements cérébraux) peut se produire et contribuer à la détérioration neurologique car elle a les effets suivants:

  • Comprime directement le tissu cérébral

  • Bloque l'approvisionnement en sang des zones du cerveau

  • Augmente la pression intracrânienne

  • Peut induire une hydrocéphalie en obstruant le système ventriculaire cérébral

  • Provoque un dysfonctionnement des cellules vasculaires et neuronales

  • Peut déplacer les structures cérébrales d'un côté du cerveau à l'autre côté

En plus des effets directs de l'augmentation de la pression intracrânienne sur les cellules neuronales et vasculaires, les voies cellulaires de l'apoptose et de l'autophagie (qui sont des formes de mort cellulaire ou de destruction programmée) peuvent être activées. L'apoptose comprend des phases précoces et tardives qui aboutissent finalement à la destruction de l'acide désoxyribonucléique (ADN) des cellules. Dans l'autophagie, les composants du cytoplasme cellulaire sont recyclés pour tenter d'éliminer les organelles non fonctionnels, ce qui peut parfois conduire à des lésions des cellules neuronales et vasculaires (1). Des voies supplémentaires liées à l'apoptose et à l'autophagie impliquent les gènes de l'horloge circadienne qui peuvent surveiller les fonctions cellulaires quotidiennes (2). Les voies du gène de l'horloge circadienne contrôlent la survie et la mort des cellules cérébrales par apoptose et autophagie. Elles surveillent également les systèmes multiples qui impliquent le flux sanguin cérébral, l'oxygénation et le métabolisme, qui peuvent affecter le pronostic du coma.

Les troubles de la conscience peuvent évoluer vers le coma et finalement la mort cérébrale.

Référence pour la physiopathologie

  1. 1. Maiese K, Chong ZZ, Shang YC, Wang S: Targeting disease through novel pathways of apoptosis and autophagy. Expert Opin Ther Targets 16 (12):1203–1214, 2012. doi: 10.1517/14728222.2012.719499 Epub 2012 Aug 27.

  2. 2. Maiese K: Cognitive impairment and dementia: Gaining insight through circadian clock gene pathways. Biomolecules 11 (7):1002, 2021. doi: 10.3390/biom11071002

Étiologie des comas et des troubles de la conscience

Un coma ou des troubles de la conscience peuvent résulter de troubles structurels, qui causent généralement des lésions focales ou de troubles non structurels, qui provoquent le plus souvent des lésions diffuses (voir tableau Causes fréquentes de coma et de troubles de la conscience).

Un âge avancé augmente le risque de troubles de la conscience.

Tableau
Tableau

Les troubles psychiatriques (p. ex., aréactivité d'origine psychogène) peuvent simuler une altération de conscience, ils sont volontaires et peuvent se différencier d'un trouble organique de la conscience par un examen neurologique.

Symptomatologie des comas et de troubles de la conscience

La conscience est altérée à un degré variable. Les stimuli répétés éveillent les patients brièvement ou pas du tout.

Selon la cause, d'autres symptômes se développent (voir tableau Signes selon la localisation):

  • Anomalies oculaires: les pupilles peuvent être dilatées, minuscules ou inégales. L'une des pupilles ou les deux peuvent être aréactives en semi-mydriase. Les mouvements oculaires peuvent être déconjugués ou absents (parésie oculomotrice) ou comporter des types rares (p. ex., bobbing oculaire [mouvements dans le plan vertical, avec succession de déplacements rapides vers le bas suivis, après une pause dans cette position, d'une réascension plus lente vers la position de départ], dipping oculaire [mouvement lent vers le bas, suivi d'un retour rapide en position initiale], opsoclonie). Une hémianopsie latérale homonyme peut être présente. Les autres anomalies sont l'absence de clignement à la menace visuelle (touchant presque l'œil), ainsi qu'une perte du réflexe oculocéphalique (les yeux ne se déplacent pas en réponse à la rotation de la tête), du réflexe oculovestibulaire (les yeux ne bougent pas en réponse à la stimulation calorique) et des réflexes cornéens.

  • Dysfonctionnement du système végétatif: les patients peuvent présenter des anomalies de la respiration (respiration de Cheyne-Stokes ou de Biot), parfois avec une HTA et une bradycardie (réflexe de Cushing). Un brusque arrêt respiratoire et arrêt cardiaque peut survenir. Cependant, une hypotension peut survenir si l'altération de la conscience est provoquée par une infection sévère, une déshydratation sévère, une perte de sang majeure ou un arrêt cardiaque.

  • Troubles moteurs: les anomalies comprennent une hypotonie, une hémiparésie, un astérixis, un myoclonus multifocal, une posture de décortication (flexion du coude et adduction de l'épaule avec extension de la jambe) et posture de décérébration (extension des membres et rotation interne de l'épaule).

  • Autres symptômes: si le tronc cérébral est atteint, des nausées, vomissements, un syndrome méningé, une céphalée occipitale, une ataxie et une somnolence excessive peuvent survenir.

Tableau
Tableau

Diagnostic des comas et des troubles de la conscience

  • Anamnèse

  • Examen clinique général

  • Examen neurologique, y compris examen oculaire

  • Tests biologiques (p. ex., oxymétrie pulsée, mesures de glycémie et examens sanguins et urinaires)

  • Neuro-imagerie immédiate

  • Parfois, mesure de la pression intracrânienne

  • Si le diagnostic est incertain, ponction lombaire ou électroencéphalographie (EEG)

Un trouble de la conscience est diagnostiqué si les stimuli répétés ne suscitent pas ou peu de réaction de la part du patient. Si la stimulation déclenche des mouvements réflexes primitifs (p. ex., posture de décérébration ou décortication), le trouble de la conscience est certainement plus profond.

Le diagnostic et la stabilisation initiale des fonctions vitales (respiration et fonction cardiocirculatoire) doivent être concomitants. La température est mesurée pour vérifier l'hypothermie ou l'hyperthermie; si l'une des deux est présente, le traitement est commencé immédiatement. La glycémie doit être mesurée au lit du malade afin d'identifier une hypoglycémie, qui doit aussi être corrigée immédiatement. En cas de traumatisme, le cou est immobilisé jusqu'à l'examen clinique, la connaissance de l'anamnèse exacte et la réalisation d'une imagerie, qui permettront d'exclure une fracture et une lésion de la moelle épinière.

Anamnèse

Les bracelets d'identification médicale ou le contenu d'un porte-monnaie ou d'un sac à main (p. ex., carte d'identité de l'hôpital, liste de médicaments) peuvent fournir des indices sur la cause. Les proches, le personnel médical, les agents de police et tout autre témoin doivent être interrogés pour savoir dans quelles circonstances et dans quel environnement le patient a été trouvé; les récipients pouvant avoir contenu des aliments, de l'alcool, des médicaments ou des toxiques doivent être examinés et conservés pour identification (p. ex., identification de la présence de produit toxique auprès d'un centre antipoison) et analyse chimique éventuelle.

Les proches/soignants doivent être interrogés sur ce qui suit:

  • Début et évolution temporelle du problème (p. ex., si une convulsion, des céphalées, des vomissements, un traumatisme crânien, ou l'ingestion d'un produit (médicament, drogue ou une autre substance) a été observée, la rapidité de l'apparition des symptômes, si l'évolution a été progressive ou en va-et-vient)

  • État mental de référence

  • Infections récentes et possible exposition aux infections

  • Voyage récent

  • Ingestions de repas inhabituels

  • Symptômes et problèmes psychiatriques

  • Anamnèse des médicaments sur ordonnance

  • Consommation d'alcool et de drogues illicites récréatives (p. ex., anesthésiques, stimulants, dépressives)

  • Maladies systémiques antérieures et concomitantes, dont une insuffisance cardiaque d'apparition récente, des troubles du rythme, des troubles respiratoires, des infections et des maladies métaboliques, hépatiques ou rénales

  • La dernière fois que le patient était en son état mental de base

  • Pressentiments qu'ils peuvent avoir sur ce qui pourrait être la cause (p. ex., possible overdose occulte, possible traumatisme crânien occulte dû à une intoxication récente)

Le dossier médical doit être passé en revue s'il est disponible.

Examen clinique général

L'examen clinique doit être ciblé et efficace et doit comprendre un examen approfondi de la tête et du visage, de la peau et des extrémités. L'examen du cœur et des poumons est important pour évaluer le flux sanguin et l'oxygénation du cerveau.

Les signes d'un traumatisme cérébral comprennent des ecchymoses périorbitaires bilatérales (en lunettes ou yeux de raton laveur), une ecchymose derrière l'oreille (signe de Battle), un hémotympan, une instabilité du maxillaire, une rhinorrhée et une otorrhée de liquide céphalorachidien. Les contusions du cuir chevelu et les petits impacts de balles peuvent être méconnus si la tête n'est pas inspectée attentivement.

Si des blessures instables et des lésions du rachis cervical ont été exclues, une flexion passive du cou est effectuée; une raideur lorsque le cou est fléchi suggère une hémorragie sous-arachnoïdienne ou une méningite.

Les signes peuvent faire suspecter une cause:

  • Hypothermie: exposition à un environnement, noyade, surdosage sédatif, hypothyroïdie sévère, encéphalopathie de Wernicke ou, chez le sujet âgé, sepsis

  • Hyperthermie: coup de chaleur, infection, surdosage de médicaments stimulants ou syndrome malin des neuroleptiques

  • Fièvre, éruption pétéchiale ou purpurique, hypotension ou infections graves des extrémités (p. ex., gangrène d'un ou plusieurs orteils): sepsis ou infection du système nerveux central.

  • Marques d'aiguilles: surdosage d'un médicament ou d'une drogue illicite (p. ex., opiacés, insuline)

  • Morsure de langue: convulsions

  • Odeur de l'haleine: intoxication par l'alcool ou une autre substance, ou acidocétose diabétique

  • Hypotension ou anomalies du pouls: dysfonctionnement cardiaque avec hypoperfusion

  • Difficulté respiratoire: dysfonction respiratoire aiguë due à une maladie bactérienne ou virale

Examen neurologique

L'examen neurologique détermine si le tronc cérébral est intact et la localisation de la lésion dans le système nerveux central. L'examen est centré sur les éléments suivants:

  • Niveau de conscience

  • Yeux

  • Fonction motrice

  • Réflexes ostéotendineux

Le niveau de conscience est évalué en tentant de stimuler les patients initialement par des ordres verbaux, puis par des stimuli non douloureux et finalement (si nécessaire) avec des stimuli douloureux (p. ex., pression sur la région sus-orbitaire, un ongle ou le sternum).

L'échelle de coma de Glasgow (Glasgow Coma Scale) (voir tableau Échelle de coma de Glasgow) a été créée pour évaluer les patients qui présentent un traumatisme crânien. En cas de traumatisme crânien, le score attribué par l'échelle a une valeur pronostique. En cas de coma ou de trouble de la conscience de toute cause, l'échelle est utilisée car elle est relativement fiable, fournit une mesure objective de l'état de non-réponse et peut être utilisée pour la surveillance. L'échelle donne des points basés sur les réponses aux stimuli.

L'ouverture des yeux, les grimaces faciales et le retrait des membres de façon appropriée aux stimuli douloureux indiquent que la conscience est peu altérée. Les réponses motrices asymétriques à la stimulation douloureuse ou aux réflexes tendineux peuvent indiquer une lésion hémisphérique focale.

Tableau
Tableau

À mesure que l'altération de la conscience évolue vers le coma, les stimuli douloureux peuvent déclencher des réflexes de posture stéréotypiques.

  • Une posture de décortication peut se produire dans des troubles structurels ou métaboliques et elle indique des lésions hémisphériques avec préservation des centres moteurs dans la partie supérieure du tronc cérébral (p. ex., voies rubrospinales).

  • Une posture de décérébration indique que les centres moteurs de la partie supérieure du tronc cérébral, qui facilitent la flexion, ont été structurellement lésés et que seuls les centres de la partie inférieure du tronc cérébral (p. ex., voies vestibulospinales, réticulospinales), qui facilitent l'extension, réagissent à des stimuli sensoriels.

La posture de décérébration peut également se produire, bien que moins souvent, dans les troubles diffus tels que l'encéphalopathie anoxique.

Une hypotonie indique que la partie inférieure du tronc cérébral n'agit pas sur la motricité, et évoque avant tout une lésion de la moelle épinière. La paralysie flasque est le type de réponse motrice le plus grave.

Un astérixis et des myoclonies multifocales font évoquer un trouble métabolique tel qu'une urémie, une encéphalopathie hépatique, hypoxique ou toxique.

L'absence de réponse psychogène diffère d'une altération de la conscience en ce que, bien que la réponse motrice volontaire soit généralement absente, le tonus musculaire et les réflexes ostéotendineux restent normaux et tous les réflexes du tronc cérébral sont préservés. Les signes vitaux ne sont habituellement pas touchés.

Calculateur clinique 

Examen des yeux

Les points suivants sont évalués:

  • Réponses pupillaires

  • Mouvements oculaires

  • Fond d'œil

  • Autres réflexes neuro-ophtalmologiques

Réponses pupillaires et mouvements extraoculaires fournir des informations sur la fonction du tronc cérébral (voir tableau Interprétation de la réponse pupillaire et des mouvements oculaires). L'une des pupilles ou les deux pupilles deviennent habituellement fixes en début de coma à cause de lésions structurelles, mais les réponses pupillaires sont souvent préservées jusqu'à un stade tardif lorsque le coma est dû à des troubles métaboliques diffus (encéphalopathie toxique-métabolique), bien que les réponses puissent être lentes. Si une pupille est dilatée, d'autres causes d'anisocorie doivent être évoquées; elles comprennent les traumatismes oculaires passés, certaines céphalées et l'utilisation d'un patch à la scopolamine (si la scopolamine vient au contact des yeux).

Tableau
Tableau

Les fonds d'œil doivent être examinés. L'œdème papillaire peut indiquer une augmentation de la pression intracrânienne, mais il faut plusieurs heures avant qu'il n'apparaisse; l'œdème papillaire est habituellement bilatéral. Une pression intracrânienne élevée peut provoquer des anomalies plus précoces au niveau du fond d'œil, comme la perte des pulsations veineuses rétiniennes, une hyperhémie de la papille, des capillaires dilatés, un flou des marges internes de la papille, et parfois des hémorragies. Une hémorragie sous-hyaloïdienne peut signer une hémorragie sous-arachnoïdienne.

Le réflexe oculocéphalique est testé par la manœuvre des yeux de poupée chez le patient non réactif: les yeux sont observés tandis que la tête est passivement tournée de droite à gauche ou en flexion et en extension. Cette manœuvre ne doit pas être tentée en cas de fragilité du rachis cervical.

  • Si le réflexe est présent, la manœuvre provoque un mouvement des yeux dans la direction opposée de la rotation, la flexion ou l'extension de la tête, indiquant que les voies oculovestibulaires dans le tronc cérébral sont intactes. Ainsi, chez un patient en décubitus dorsal, les yeux continuent à regarder vers le haut lorsque la tête tourne d'un côté à l'autre.

  • Si le réflexe est absent, les yeux ne bougent pas quelle que soit la direction vers laquelle la tête est tournée, indiquant une atteinte des voies oculovestibulaires. Le réflexe est également absent chez la plupart des patients qui présentent une aréactivité psychogène car la fixation visuelle est consciente.

Si le patient n'est pas conscient et le réflexe oculocéphalique est absent ou que le cou est immobile, un test oculovestibulaire (calorique au froid) est effectué. Après vérification de l'intégrité du tympan, la tête du patient est surélevée de 30°, une seringue reliée à un cathéter souple est utilisée pour irriguer le conduit auditif externe avec 50 mL d'eau glacée sur une période de 30 s.

  • Si les deux yeux dévient vers l'oreille irriguée, le réflexe du tronc cérébral fonctionne normalement, suggérant que l'état de conscience n'est que modérément altéré.

  • Si un nystagmus se produit également dans le sens opposé de l'oreille irriguée, le patient est conscient et l'aréactivité psychogène est hautement probable. Chez des patients conscients, 1 mL d'eau froide est souvent suffisant pour induire une déviation oculaire et un nystagmus. Ainsi, si une aréactivité psychogène est suspectée, une petite quantité d'eau doit être utilisée (ou même le test ne doit pas être pratiqué) car le test calorique à l'eau froide peut provoquer des vertiges sévères, des nausées et des vomissements chez les patients conscients.

  • Si les yeux ne bougent pas ou un mouvement déconjugué survient après irrigation, l'intégrité du tronc cérébral est incertaine et le coma est profond. Le pronostic peut être moins favorable.

Pièges à éviter

  • Si le tonus musculaire, les réflexes ostéotendineux et la réponse à la manœuvre des "yeux de poupée" sont normaux, suspecter une aréactivité d'origine psychogène.

Certains types d'anomalies oculaires et d'autres signes peuvent suggérer un engagement cérébral (voir aussi figure Engagement cérébral et le tableau Effet des engagements cérébraux).

Modes respiratoires

La fréquence et le mode respiratoire spontanés doivent être documentés sauf en cas d'intervention sur les voies respiratoires. Ils peuvent orienter la recherche étiologique.

  • Un cycle périodique de respiration (respiration de Cheyne-Stokes ou de Biot) peut indiquer un dysfonctionnement des deux hémisphères ou du diencéphale.

  • Une hyperventilation (hyperventilation neurogène centrale) avec une fréquence respiratoire > 25/min peut indiquer un dysfonctionnement du mésencéphale ou de la partie supérieure du pont.

  • Un gasp inspiratoire avec des pauses respiratoires d'environ 3 s après une inspiration complète (respiration apnéique) indique généralement des lésions pontiques ou médullaires; ce type de respiration progresse souvent vers un arrêt respiratoire.

Examens complémentaires

Initialement, l'oxymétrie pulsée, les mesures de glycémie capillaire et un monitoring cardiaque sont effectués. Si la cause n'est pas immédiatement évidente, des examens complémentaires sont effectués.

Les examens sanguins comprennent une exploration métabolique exhaustive (dont au moins ionogramme, urée, créatinine, calcium, sériques), une numération formule sanguine avec plaquettes, un bilan hépatique et un dosage de l'ammoniémie.

Les gaz du sang artériel sont dosés, et si une intoxication par le monoxyde de carbone est suspectée, le taux de carboxyhémoglobine est mesuré.

Du sang et des urines doivent être prélevés pour mise en culture et recherche toxicologique systématique; le taux d'éthanol sérique est également mesuré. D'autres panels de tests toxicologiques et de tels tests supplémentaires (p. ex., les taux sériques des médicaments) sont réalisés en fonction de la suspicion clinique.

Un ECG (12 dérivations) est également effectué pour rechercher un infarctus du myocarde et de nouveaux troubles du rythme.

Une rx thorax doit être effectuée pour rechercher une nouvelle maladie pulmonaire qui peut affecter l'oxygénation du cerveau.

Si la cause n'est pas encore immédiatement apparente, une TDM cérébrale sans produit de contraste doit être effectuée dès que possible à la recherche de masses, d'hémorragies, d'œdème, de signes évidents de traumatisme osseux et d'hydrocéphalie. Initialement, on préfère une TDM sans injection plutôt qu'avec injection de produit de contraste pour exclure une hémorragie cérébrale; la TDM détecte au mieux les saignements cérébraux et les lésions osseuses (p. ex., fractures du crâne) dans les 72 heures suivant la blessure. Une IRM peut être effectuée à la place si elle est immédiatement disponible, mais elle n'est pas aussi rapide que les TDM de nouvelle génération et peut ne pas être aussi sensible dans le cas des lésions osseuses traumatiques: cependant, l'IRM est à présent aussi sensible que la TDM pour détecter le sang précocement ainsi que tardivement. Si la TDM sans injection de produit de contraste n'est pas diagnostique, une IRM ou une TDM avec contraste peuvent alors être effectuées; l'un ou l'autre peuvent détecter des hématomes sous-duraux isodenses, des métastases multiples, une thrombose du sinus sagittal, une encéphalite herpétique ou d'autres causes manquées par la TDM sans injection de produit de contraste. L'IRM fournit plus de détails que la TDM lorsqu'elle est effectuée > 72 heures après le début des symptômes, mais est plus difficile sur le plan logistique que la TDM si le patient est intubé.

TDM de la tête sans contraste
Hémorragie épidurale (TDM coronale)
Hémorragie épidurale (TDM coronale)

Hyperdensité classique en forme de lentille qui ne s'étend pas à travers les lignes de suture.

© 2017 Elliot K. Fishman, MD.

Hémorragie épidurale (TDM axiale)
Hémorragie épidurale (TDM axiale)

Hyperdensité classique en forme de lentille qui ne s'étend pas à travers les lignes de suture.

© 2017 Elliot K. Fishman, MD.

Hémorragie sous-durale (TDM)
Hémorragie sous-durale (TDM)

Hyperdensité en forme de croissant classique s'étendant à travers les lignes de suture.

© 2017 Elliot K. Fishman, MD.

Engagement sous la faux du cerveau
Engagement sous la faux du cerveau

L'engagement sous la faux du cerveau est le type le plus fréquent d'engagement cérébral. Dans cette image, le cerveau gauche s'est hernié sous le bord libre de la faux du cerveau (flèche) parce que l'hémorragie d'un infarctus de l'artère cérébrale moyenne a augmenté la pression intracérébrale.

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© 2017 Elliot K. Fishman, MD.

Si le coma reste inexpliqué malgré une IRM ou une TDM et les autres tests, une ponction lombaire est réalisée pour mesurer la pression d'ouverture du LCR, et éliminer une infection ou une hémorragie sous-arachnoïdienne ou d'autres anomalies. Cependant, les images IRM ou TDM doivent d'abord être revues à la recherche de masses intracrâniennes, d'une hydrocéphalie obstructive, et d'autres anomalies qui pourraient obstruer l'écoulement du liquide céphalorachidien ou le système ventriculaire et donc augmenter sensiblement la pression intracrânienne. Ces anomalies contre-indiquent la ponction lombaire. Une baisse soudaine de la pression du liquide céphalorachidien, comme cela peut se produire en cas de ponction lombaire, chez les patients qui ont une pression intracrânienne élevée pourrait déclencher un engagement du cerveau; cependant, cet accident est peu fréquent.

L'analyse du liquide céphalorachidien comprend une analyse cytologique, la mesure du taux de protéines, de glucose, une coloration de Gram, une mise en culture et parfois, selon le contexte clinique, des tests spécifiques (p. ex., antigènes cryptococcique, cytologie, mesure des marqueurs tumoraux, TPHA-VDRL [Venereal Disease Research Laboratory], Polymerase Chain Reaction (PCR) pour le virus herpes simplex, détection visuelle ou spectrophotométrique de la xanthochromie).

Si une augmentation de la pression intracrânienne est suspectée, la pression du LCR peut être mesurée si approprié pour le patient (1). Si la pression intracrânienne est augmentée, une surveillance de la pression intracrânienne est effectuée en continu, et des mesures pour la diminuer sont prises.

Si les crises peuvent être la cause du coma, en particulier si un état de mal épileptique non convulsif (crises récurrentes sans symptômes moteurs importants) est envisagé, ou si le diagnostic reste incertain, un EEG peut être effectué. Dans la plupart des cas de coma, l'EEG ne montre qu'un ralentissement et une réduction d'amplitude des ondes, mais ces anomalies aspécifiques correspondent souvent à une encéphalopathie toxique-métabolique. Chez certains patients présentant en état de mal épileptique non convulsif, l'EEG peut montrer une association de pointes, d'ondes pointues et des pointes-ondes et des ondes lentes (2). Si une absence de réponse psychogène ou une activité convulsive (pseudo-crise) résultant d'un trouble du comportement est possible, une surveillance vidéo EEG est nécessaire.

Selon la destination, les voyages récents doivent inciter à rechercher des infections bactériennes, virales et parasitaires qui peuvent conduire au coma.

Les médecins peuvent envisager de pratiquer des potentiels évoqués tels que des potentiels évoqués auditifs du tronc cérébral pour évaluer la fonction du tronc cérébral ou des potentiels évoqués somatosensoriels pour évaluer les voies du cortex, thalamique, du tronc cérébral et de la moelle épinière (p. ex., après un arrêt cardiaque).

Références pour le diagnostic

  1. 1. Le Roux P, Menon DK, Citerio G, et al: Monitoring in Neurocritical Care: A statement for healthcare professionals from the Neurocritical Care Society and the European Society of Intensive Care Medicine. Neurocrit Care 21 Suppl 2 (Suppl 2):S1–26, 2014. doi: 10.1007/s12028-014-0041-5

  2. 2. Zafar A, Aljaafari D. EEG criteria for diagnosing nonconvulsive status epilepticus in comatose - An unsolved puzzle: A narrative review. Heliyon. 2023 Nov 17;9(11):e22393. doi: 10.1016/j.heliyon.2023.e22393

Traitement des comas et des troubles de la conscience

  • Stabilisation immédiate (voies respiratoires, respiration, circulation)

  • Admission en unité de soins intensifs

  • Mesures de support et, si nécessaire, contrôle de la pression intracrânienne

  • Traitement du trouble sous-jacent

Il est nécessaire de vérifier immédiatement, en premier lieu, les voies respiratoires, la respiration et l'hémodynamique sanguine. L'hypotension doit être corrigée. Les patients qui ont des troubles de la conscience sont admis en USI afin que l'état respiratoire et neurologique puisse être surveillé. En cas d'HTA, la pression artérielle doit être prudemment réduite; abaisser la pression artérielle en dessous du niveau habituel du patient peut entraîner une ischémie cérébrale.

Puisque certains patients dans le coma sont sous-alimentés et à risque d'encéphalopathie de Gayet-Wernicke, une supplémentation en thiamine 100 mg IV ou IM doit être systématiquement administrée. Si la glycémie est basse, il faut administrer aux patients 50 mL de dextrose à 50% IV, mais seulement après qu'ils aient reçu de la thiamine.

En cas de traumatisme, le cou est immobilisé jusqu'à ce que la TDM soit effectuée pour exclure une lésion de la colonne cervicale. Certains patients en état de stupeur ou de coma après un traumatisme crânien peuvent tirer un bénéfice d'un traitement par des médicaments qui peuvent améliorer les fonctions des cellules nerveuses (p. ex., l'amantadine). Ce traitement entraîne une amélioration spectaculaire de la réactivité neurologique aussi longtemps que le médicament est poursuivi. Cependant, un tel traitement peut ne pas apporter d'amélioration à long terme.

Si une overdose d'opiacés est suspectée, de la naloxone 0,4 à 2 mg IV est administrée et répétée si nécessaire.

Si une récente overdose de certains medicaments ou d'autres substances (datant d'environ 1 heure) est possible, un lavage gastrique peut être effectué par sonde gastrique de gros calibre (p. ex., ≥ 32 Fr) après intubation endotrachéale; cependant, le lavage gastrique n'est plus que rarement effectué.

Les troubles et anomalies coexistants sont traités selon les indications. Par exemple, les anomalies métaboliques sont corrigées. La température corporelle peut devoir être corrigée (p. ex., refroidissement en cas d'hyperthermie sévère, réchauffement en cas d'hypothermie).

Intubation endotrachéale

Les patients qui présentent l'un des éléments suivants ont été traditionnellement traités par intubation endotrachéale pour éviter une inhalation (fausse route) et assurer une ventilation adéquate:

  • Respirations rares, peu profondes, ou stertoreuses

  • Saturation en oxygène basse (déterminée par oxymétrie pulsée ou mesure des gaz du sang artériel)

  • Réflexes des voies respiratoires affaiblis

  • Absence de réaction sévère (y compris la plupart des patients qui ont un score de l'échelle de coma de Glasgow 8)

Cependant, dans un essai randomisé de patients comateux avec suspicion de surdosage, l'interruption de l'intubation (sauf en cas de détresse respiratoire, de convulsions, de vomissements ou de choc) a entraîné des taux plus faibles de décès à l'hôpital et des séjours plus courts à l'hôpital et en USI (1).

Si pratiquée pour une hypertension intracrânienne suspectée, l'intubation par voie orale doit être effectuée en séquence rapide par voie orale (en utilisant un médicament paralysant) plutôt que par voie nasotrachéale; l'intubation nasotrachéale chez un patient qui respire spontanément provoque plus de toux et d'efforts de vomissement, ce qui augmente la pression intracrânienne, qui est déjà augmentée du fait des anomalies intracrâniennes.

Afin de minimiser l'augmentation de la pression intracrânienne qui peut se produire lorsque les voies respiratoires sont manipulées, certains recommandent d'administrer de la lidocaïne 1,5 mg/kg IV 1 à 2 min avant d'administrer le médicament paralysant; cela peut réduire la pression intracrânienne en empêchant l'augmentation de la fréquence cardiaque, du débit cardiaque et de la pression artérielle systolique (2). Les patients sont sédatés avant que le médicament paralytique soit administré. L'étomidate est un bon choix chez les patients souffrant d'hypotension ou ayant vécu un traumatisme car il a des effets minimes sur la PA; la posologie IV chez l'adulte est de 0,3 mg/kg pour un adulte (20 mg de taille moyenne) et 0,2 à 0,3 mg/kg chez l'enfant. Comme alternative, en l'absence d'hypotension ou si celle-ci est peu probable et si le propofol est disponible, on peut utiliser du propofol à 0,2 à 1,5 mg/kg.

La succinylcholine 1,5 mg/kg ou rocuronium 1 mg/kg IV est généralement utilisée comme paralysant. Les paralysants ne doivent être utilisés que lorsqu'ils sont jugés nécessaires pour l'intubation et nécessaires pour éviter des augmentations supplémentaires de la pression intracrânienne. Autrement, les paralysants doivent être évités car rarement, des médicaments tels que la succinylcholine peuvent induire une hyperthermie maligne et masquer les signes et modifications neurologiques.

L'oxymétrie pulsée et un dosage des gaz du sang artériel (si possible, la mesure du dioxyde de carbone expiratoire) doivent être effectués pour vérifier que l'oxygénation et la ventilation sont correctes.

Surveillance de la pression intracrânienne

Si la pression intracrânienne est augmentée, les médecins doivent surveiller la pression de perfusion intracrânienne et cérébrale et les pressions doivent être contrôlées. L'objectif est de maintenir la pression intracrânienne à 20 mmHg et la pression de perfusion cérébrale à 50 à 70 mmHg. La pression intracrânienne est habituellement plus faible chez l'enfant que chez l'adulte. Chez le nouveau-né, la pression intracrânienne peut être inférieure à la pression atmosphérique. Ainsi, les enfants sont évalués indépendamment des lignes directrices pour adultes.

Le contrôle de l'augmentation de la pression intracrânienne repose sur plusieurs stratégies (3):

  • Sédation: les sédatifs peuvent être nécessaires pour contrôler l'agitation, l'activité musculaire excessive (p. ex., due à un syndrome confusionnel), ou la douleur, qui peuvent augmenter la pression intracrânienne. Le propofol est souvent utilisé chez l'adulte (contre-indiqué chez l'enfant) parce que son délai et sa durée d'action sont rapides; la dose est de 0,3 mg/kg/h par perfusion IV continue, titrée progressivement jusqu'à 3 mg/kg/h selon les besoins. On n'administre pas de bolus initial. L'effet indésirable le plus fréquent est l'hypotension. Une utilisation prolongée à des doses élevées peut provoquer une pancréatite. Les benzodiazépines (p. ex., midazolam, lorazépam) peuvent également être utilisées. Les sédatifs pouvant masquer les symptômes neurologiques et leurs modifications, leur utilisation doit être réduite au minimum et, lorsque cela est possible, évitée. Les antipsychotiques doivent être évités si possible parce qu'ils peuvent retarder la récupération. Les sédatifs ne sont pas utilisés pour traiter l'agitation et la confusion due à l'hypoxie; l'oxygène est utilisé à sa place.

  • Hyperventilation: l'hyperventilation entraîne une hypocapnie, qui provoque une vasoconstriction, diminuant ainsi le débit sanguin cérébral dans son ensemble. Une réduction de la PCO2 de 40 à 30 mmHg peut réduire la pression intracrânienne de 30%. L'hyperventilation qui réduit la PCO2 de 28 à 33 mmHg ne diminue la pression intracrânienne pendant que 30 min et est utilisée par certains comme une mesure temporaire jusqu'à ce d'autres traitements soient efficaces. L'hyperventilation agressive jusqu'à une PCO2 < 25 mmHg doit être évitée parce qu'elle peut réduire le débit sanguin cérébral de façon excessive et entraîner une ischémie cérébrale. D'autres mesures pour contrôler l'augmentation de la pression intracrânienne peuvent être utilisées.

  • Hydratation: des liquides isotoniques sont utilisés. L'hydratation IV (p. ex., dextrose à 5%, solution saline à 0,45%) peut aggraver l'œdème cérébral et doit être évitée. L'hydratation peut rester limitée à un certain degré, les patients doivent rester euvolémiques. Si les patients ne présentent pas de signes de déshydratation ou d'hyperhydratation, une perfusion IV avec une solution physiologique normale peut être introduite à raison de 50 à 75 mL/h. Le taux peut être augmenté ou diminué selon la natrémie, l'osmolalité, la diurèse et les signes de rétention d'eau (p. ex., œdème).

  • Diurétiques: l'osmolalité sérique doit être maintenue entre 295 et 320 mOsm/kg. Les diurétiques osmotiques (p. ex., le mannitol) peuvent être administrés en IV pour diminuer la pression intracrânienne et maintenir l'osmolalité du sérum. Les diurétiques osmotiques ne traversent pas la barrière hématoencéphalique. Ils extraient l'eau des tissus du cerveau vers le plasma par effet d'un gradient osmotique, qui finalement parvient à l'équilibre. L'efficacité de ces diurétiques diminue après quelques heures. Ainsi, ils doivent être réservés au patient dont l'état se détériore (p. ex., ceux qui ont une hernie cérébrale aiguë) ou être utilisés en pré-opératoire en cas d'hématome. La posologie du mannitol à 20% est de 0,5 à 1 g/kg IV (2,5 à 5 mL/kg) en 15 à 30 min, puis administrée selon les besoins (habituellement toutes les 6 à 8 heures) à une dose allant de 0,25 à 0,5 g/kg (1,25 à 2,5 mL/kg). Le mannitol doit être utilisé prudemment en cas de coronaropathie sévère, d'insuffisance cardiaque, d'insuffisance rénale ou d'œdème pulmonaire, car le mannitol augmente rapidement la volémie. Les diurétiques osmotiques augmentant l'excrétion rénale d'eau par rapport au sodium, l'utilisation prolongée de mannitol peut également produire une déshydratation et une hypernatrémie. Le furosémide 1 mg/kg IV est également utile pour diminuer l'eau corporelle totale, surtout quand on désire éviter l'hypervolémie transitoire associée au mannitol. L'équilibre hydroélectrolytique doit être surveillé attentivement pendant la période ou les diurétiques osmotiques sont utilisés. Une solution salée à 3% est un autre potentiel agent osmotique pour contrôler la pression intracrânienne (4).

  • Contrôle de la PA: les antihypertenseurs systémiques ne sont nécessaires que lorsque l'HTA est sévère (> 180/95 mmHg). La diminution de la pression artérielle dépend du contexte clinique. La pression artérielle systémique doit être suffisamment élevée pour maintenir la pression de la perfusion cérébrale, même lorsque la pression intracrânienne augmente. L'HTA peut être traitée par une titration d'une perfusion de nicardipine (5) (5 mg/h, augmentée de 2,5 mg toutes les 5 min jusqu'à un maximum de 15 mg/h) ou par bolus de labétalol (10 mg IV en 1 à 2 min répétée toutes les 10 min jusqu'à un maximum de 150 mg).

  • Corticostéroïdes: les corticostéroïdes sont utiles dans le traitement de l'œdème vasogène du cerveau. L'œdème vasogène résulte de la rupture de la barrière hématoencéphalique, qui peut se produire en cas de tumeur cérébrale. L'œdème cytotoxique résulte de la mort et de la dégradation cellulaire, qui peuvent survenir en cas d'accident vasculaire cérébral, d'hémorragie cérébrale ou de traumatisme; il peut également se produire en cas de lésion cérébrale hypoxique due à un arrêt cardiaque. Le traitement par corticostéroïdes n'est efficace que pour les tumeurs et parfois pour les abcès du cerveau en cas d'œdème vasogène. Les corticostéroïdes sont inefficaces dans l'œdème cytotoxique et peuvent augmenter la glycémie, aggraver l'ischémie cérébrale et compliquer la prise en charge du diabète sucré. En l'absence d'ischémie cérébrale, une dose initiale de dexaméthasone 20 à 100 mg, suivie de 4 mg 1 fois/jour semble efficace tout en minimisant les effets indésirables. La dexaméthasone peut être administrée IV ou par voie orale.

  • Évacuation du liquide céphalorachidien: le liquide céphalorachidien peut être lentement retiré par un shunt inséré dans les ventricules pour réduire la pression intracrânienne. Le liquide céphalorachidien est éliminé à raison de 1 à 2 mL/minute pendant 2 à 3 minutes. Le drainage continu du liquide céphalorachidien (p. ex., par un drain lombaire) doit être évité car il peut entraîner un engagement cérébral.

  • Position: positionner le patient de façon à maximiser le flux veineux sortant de la tête permet de minimiser l'augmentation de la pression intracrânienne. La tête du lit peut être relevée de 30° (avec la tête au-dessus du cœur) tant que la pression de perfusion cérébrale reste dans la plage désirée. La tête du patient doit être maintenue en position médiane et la rotation et la flexion du cou doivent être minimisées. L'aspiration trachéale, qui peut augmenter la pression intracrânienne, doit être limitée.

Si la pression intracrânienne continue à augmenter en dépit d'autres mesures pour la contrôler, les éléments suivants peuvent être utilisés:

  • Hypothermie titrée: lorsque la pression intracrânienne augmente après un traumatisme crânien ou un arrêt cardiaque, une hypothermie de l'ordre de 32 à 35° C a été utilisée pour réduire la pression intracrânienne à < 20 mmHg. Cependant, l'utilisation de l'hypothermie pour abaisser la pression intracrânienne est controversée; quelques preuves suggèrent que ce traitement pourrait ne pas réduire efficacement la pression intracrânienne chez les adultes ou les enfants et pourrait avoir des effets indésirables (6).

  • Coma pentobarbitalique: le pentobarbital peut réduire le débit sanguin cérébral et les besoins métaboliques. Cependant, son utilisation est controversée parce que l'effet sur le résultat clinique n'est pas toujours bénéfique, et le traitement par le pentobarbital peut amener des complications (p. ex., une hypotension). Chez certains patients qui présentent une hypertension intracrânienne réfractaire qui ne répondent pas à l'hyperventilation standard et à une thérapie hyperosmolaire, le pentobarbital peut en dernier ressort améliorer le pronostic fonctionnel (5). Le coma est induit en administrant du pentobarbital 10 mg/kg IV en 30 min, suivi de 5 mg/kg/h pendant 3 heures, puis 1 mg/kg/h. La posologie peut être ajustée pour supprimer les décharges d'activité sur l'EEG, qui est continuellement surveillé. L'hypotension est fréquente et traitée en administrant des liquides et, si nécessaire, des vasopresseurs. Les autres effets indésirables possibles sont des troubles du rythme, une dépression myocardique et une altération de la recapture ou de la libération du glutamate potentiellement neurotoxique dans le cerveau.

  • Craniotomie décompressive: une craniotomie avec duroplastie peut être pratiquée pour faire de la place à l'œdème cérébral. Cette procédure peut prévenir les décès, mais le résultat fonctionnel global peut ne pas s'améliorer beaucoup, et elle peut entraîner des complications telles que l'hydrocéphalie chez certains patients (7). Elle peut être très utile dans les infarctus cérébraux avec engagement imminent, en particulier chez les patients de < 50 ans.

Soins de longue durée

Les patients ont besoin de soins méticuleux à long terme. Les stimulants, les sédatifs et les opiacés doivent être évités.

La nutrition entérale est commencée en prenant des précautions pour éviter une inhalation (p. ex., surélévation de la tête du lit); une jéjunostomie percutanée est placée par voie endoscopique si nécessaire.

Dès le début, une attention particulière est portée sur les troubles cutanés afin d'éviter les ulcères de pression. Les patients doivent fréquemment être retournés et changer de position pour éviter les ulcères de pression, mais la tête doit être maintenue surélevée. Des matelas pneumatiques spéciaux peuvent aider à gérer les escarres.

Des pommades sont appliquées pour éviter la sécheresse oculaire.

Les exercices de mobilisation passive effectués par des kinésithérapeutes ainsi que l'installation et le maintien des postures des membres si besoin par bandage permettent de limiter les phénomènes de rétraction. Le début précoce de la kinésithérapie peut améliorer le pronostic fonctionnel en cas de polynévrite et de myopathie.

Des mesures sont également prises pour éviter les infections urinaires et les thromboses veineuses profondes.

Références pour le traitement

  1. 1. Freund Y; Viglino D, Cachanado M, et al: Effect of noninvasive airway management of comatose patients with acute poisoning: A randomized clinical trial. JAMA 330 (23):2267–2274, 2023. doi: 10.1001/jama.2023.24391

  2. 2. Mostafa HM, Ibrahim RW, Hasanin A, et al: (2023) Intravenous lidocaine for attenuation of pressor response after endotracheal intubation. A randomized, double-blinded dose-finding study. Egypt J Anaesthesia 39:1:241-248, 2023. doi: 10.1080/11101849.2023.2187142

  3. 3. Cook AM, Jones GM, Hawryluk GWJ, et al: Guidelines for the acute treatment of cerebral edema in neurocritical care patients. Neurocrit Care 32 (3):647–666 2020. doi: 10.1007/s12028-02-00959-7

  4. 4. Shi J, Tan L, Ye J, Hu L. Hypertonic saline and mannitol in patients with traumatic brain injury: A systematic and meta-analysis. Medicine (Baltimore). 2020;99(35):e21655. doi:10.1097/MD.0000000000021655

  5. 5. Ragland J, Lee K: Critical Care Management and Monitoring of Intracranial Pressure. J Neurocrit Care 9(2):105-112, 2016. doi: 10.18700/jnc.160101

  6. 6. Moler FW, Silverstein FS, Holubkov R, et al: Therapeutic hypothermia after in-hospital cardiac arrest in children. N Engl J Med 376 (4):318-329, 2017. doi: 10.1056/NEJMoa1610493

  7. 7. Su TM, Lan CM, Lee TH, et al: Risk factors for the development of posttraumatic hydrocephalus after unilateral decompressive craniectomy in patients with traumatic brain injury. J Clin Neurosci 63:62–67, 2019. doi: 10.1016/j.jocn.2019.02.006 Epub 2019 Mar 1.

Pronostic des comas et des troubles de la conscience

Le pronostic en cas de troubles de la conscience dépend de la cause, de la durée et de la profondeur de l'altération de la conscience. Par exemple, l'absence des réflexes du tronc cérébral est de mauvais pronostic après un arrêt cardiaque, mais ce n'est pas toujours le cas après une overdose de sédatifs. En général, si le coma dure < 6 heures, le pronostic est plus favorable.

Après un coma, les signes pronostiques suivants sont considérés comme favorables (1):

  • Retour anticipé de la parole (même si incompréhensible)

  • Mouvements oculaires spontanés qui peuvent suivre des objets

  • Tonus musculaire normal au repos

  • Capacité à obéir à des ordres

Si la cause est réversible (p. ex., surdosage de sédatifs, certains troubles métaboliques comme l'encéphalopathie urémique), les patients peuvent perdre l'ensemble de leurs réflexes du tronc cérébral et de leurs réponses motrices, mais récupérer totalement. Après un traumatisme crânien, une cotation entre 3 et 5 sur l'échelle de coma de Glasgow (Glasgow Coma Scale) peut indiquer une lésion cérébrale fatale, en particulier si les pupilles sont fixes ou si les réflexes oculovestibulaires sont absents.

Après un arrêt cardiaque, il convient d'exclure les principaux facteurs confondants d'un coma dont les sédatifs, un blocage neuromusculaire, une hypothermie, des troubles métaboliques et une insuffisance rénale ou hépatique sévères. En cas d'absence de réflexes du tronc cérébral au jour 1 ou s'ils disparaissent plus tard, des tests de mort cérébrale sont indiqués. Le pronostic est mauvais en présence de l'une des caractéristiques suivantes (2):

  • État de mal épileptique myoclonique (tics bilatéraux synchrones des structures axiales, souvent avec ouverture des yeux et déviation vers le haut des yeux) qui se produit dans les 24 à 48 heures après un arrêt cardiaque

  • Aucun réflexe pupillaire à la lumière 24 à 72 heures après un arrêt cardiaque

  • Pas de réflexe cornéen 72 heures après un arrêt cardiaque

  • Posture en extension ou pas de réponse à des stimuli douloureux 72 heures après un arrêt cardiaque

  • Pas de réponse 20 millisecondes (N20) après stimulation du potentiel évoqué somatosensoriel

  • Taux d'énolase neurone-spécifique sérique > 33 mcg/L

  • Troubles préexistants tels que coronaropathie, hypertension et diabète sucré

Si les patients qui ne répondent pas après un arrêt cardiaque ont été traités par hypothermie (souvent pendant environ 24 heures après l'arrêt), 72 heures doivent être ajoutées aux temps ci-dessus parce que l'hypothermie ralentit la récupération du métabolisme cérébral. Si un des critères ci-dessus est rempli, le résultat est généralement (mais pas toujours) défavorable; ainsi, la décision d'arrêter ou non la réanimation peut être difficile à prendre.

Les patients peuvent également avoir d'autres complications non neurologiques, en fonction de la cause et de la durée des troubles de la conscience. Par exemple, un médicament ou un trouble cause de coma métabolique peut également provoquer une hypotension, des troubles du rythme, un infarctus du myocarde, ou un œdème pulmonaire. Une hospitalisation prolongée en USI peut également entraîner une polynévrite, une myopathie et d'autres complications (p. ex., embolie pulmonaire, ulcères de pression, infection des voies urinaires).

Références pour le pronostic

  1. 1. Levy DE, Caronna JJ, Singer BH, Lapinski RH, Frydman H, Plum F. Predicting outcome from hypoxic-ischemic coma. JAMA. 1985;253(10):1420-1426.

  2. 2. Sandroni C, Cariou A, Cavallaro F, et al. Prognostication in comatose survivors of cardiac arrest: an advisory statement from the European Resuscitation Council and the European Society of Intensive Care Medicine. Intensive Care Med. 2014;40(12):1816-1831. doi:10.1007/s00134-014-3470-x

Bases de gériatrie: coma et altération de la conscience

Les patients âgés peuvent être davantage sensibles au coma, à l'altération de la conscience et à la confusion en raison de nombreux facteurs, dont les suivants:

  • Moindre réserve cognitive en raison des effets sur le cerveau de l'âge et/ou de troubles cérébraux préexistants

  • Risque accru d'interactions médicamenteuses affectant le cerveau dues à la polymédication

  • Risque accru lié à l'accumulation et aux effets des médicaments sur le cerveau en raison d'une diminution du fonctionnement des organes assurant le métabolisme des médicaments et l'élimination liée à l'âge

  • Risque plus élevé de dosage médicamenteux inapproprié dû à la polymédication et aux schémas posologiques complexes

  • Présence de comorbidités (p. ex., diabète sucré, hypertension, maladie rénale)

  • Risque plus élevé d'hématome sous-dural dû à une rupture traumatique des veines traversant l'espace sous-dural entre la dure-mère et la surface du cerveau atrophique vieillissant

Des problèmes relativement mineurs, tels que la déshydratation et les infections urinaires, peuvent modifier l'état de conscience des personnes âgées.

Chez les patients âgés, l'état mental et les capacités de communication peuvent être compromis, ce qui complique la détection de la léthargie et de l'obnubilation.

La diminution de la réserve cognitive et de la neuroplasticité liée à l'âge peut nuire à la récupération de la lésion cérébrale.

Points clés

  • Le coma et les troubles de la conscience exigent un dysfonctionnement des deux hémisphères cérébraux ou un dysfonctionnement du système d'activation réticulaire.

  • Les manifestations comprennent des anomalies des yeux (p. ex., anomalie du regard conjugué, réponses pupillaires, et/ou des réflexes oculo-céphaliques ou oculovestibulaire), des signes vitaux (p. ex., respirations anormales), et de la fonction motrice (p. ex., flaccidité, hémiparésie, astérixis, myoclonies multifocales, posture de décortication ou de décérébration).

  • Un historique complet des événements antérieurs est essentiel; interroger les témoins et les parents/personnes qui s'occupent du patient sur l'évolution temporelle des modifications de l'état mental et sur les causes possibles (p. ex., voyage récent, ingestion de repas inhabituels, exposition possible à des infections, à des drogues illicites ou à l'alcool, ou de possibles traumatismes).

  • Effectuer un examen clinique général, dont un examen approfondi de la tête et du visage, de la peau, et des extrémités et un examen neurologique complet (en mettant l'accent sur le niveau de la conscience, les yeux, la fonction motrice, et les réflexes ostéotendineux), suivi par des examens sanguins et urinaires appropriés, le dépistage toxicologique et les mesures de la glycémie au doigt.

  • Dès que le patient est stabilisé, effectuer une TDM sans contraste ou, si immédiatement disponible, une IRM pour rechercher des masses, une hémorragie, un œdème, une hydrocéphalie ou des signes de traumatisme osseux (en particulier sur une TDM); globalement, l'IRM fournit plus de détails à des fins diagnostiques lorsqu'elle est effectuée 72 heures ou plus après le début des symptômes.

  • Assurer une perméabilité des voies respiratoires, une respiration et une circulation adéquate.

  • Administrer de la thiamine IV ou IM et du glucose IV si la glycémie est basse et de la naloxone IV en cas de suspicion de surdosage d'opiacés.

  • Le contrôle de la pression intracrânienne au moyen de diverses stratégies, qui peuvent comprendre des sédatifs (au besoin) pour contrôler l'agitation, une hyperventilation temporaire, des liquides et des diurétiques pour maintenir une euvolémie et des antihypertenseurs pour contrôler la pression artérielle.

  • Traiter la cause.

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